Hong Kong | Des milliers de manifestants prodémocratie défilaient à nouveau samedi à Hong Kong malgré la pluie, lors d’un week-end test pour la popularité de leur mouvement, tandis que les craintes s’intensifient sur les intentions de Pékin.
Parallèlement, des milliers de partisans progouvernementaux, dont beaucoup agitaient des drapeaux chinois, se sont rassemblés dans un parc pour condamner le mouvement prodémocratie et soutenir la police, illustration frappante des divisions qui s’accroissent dans la ville.
Dix semaines de protestations ont plongé le centre financier international dans la crise, la Chine continentale dirigée par les communistes adoptant un ton de plus en plus dur, y compris en qualifiant les actions les plus violentes des manifestants de «quasi terroristes».
Les militants prodémocratie ont prévu deux rassemblements, samedi et dimanche, pour montrer à Pékin et aux dirigeants non élus de la ville que leur mouvement bénéficie toujours d’un large soutien public, malgré des approches de plus en plus violentes d’une minorité d’éléments radicaux.
Mardi, les manifestants avaient bloqué l’embarquement des passagers à l’aéroport de la ville et ensuite agressé deux hommes qu’ils accusaient d’être des espions chinois.
Ces images ont terni un mouvement qui s’en était pris jusque-là principalement à la police ou aux institutions gouvernementales, mais elles ont déclenché un examen de conscience parmi les protestataires.
La propagande de Chine s’est aussitôt emparée de ces violents dérapages, les médias d’État s’empressant de diffuser un déluge d’articles, d’images et de vidéos sur le sujet. Ils ont également diffusé des images de soldats chinois et de transports de troupes blindés de l’autre côté de la frontière, à Shenzhen.
Washington a prévenu Pékin qu’une intervention militaire serait une «grosse erreur», tandis que les experts estiment qu’elle serait un désastre économique et en termes d’image pour la Chine.
Manifestations rivales
Les rassemblements de samedi ont débuté par une marche de milliers d’enseignants sous une pluie torrentielle pour soutenir le mouvement prodémocratie, en grande partie emmenée par de jeunes militants.
Dans l’après-midi, une foule encore plus importante s’est rassemblée pour marcher à Hung Hom et à To Kwa Wan, deux quartiers portuaires populaires auprès des touristes chinois du continent.
Certains protestataires s’en sont pris aux locaux de la Fédération des syndicats, une organisation pro-Pékin, les couvrant de graffitis et les bombardant d’œufs.
«Le gouvernement n’a pas encore répondu à une seule revendication et a intensifié la pression policière pour réprimer la voix du peuple», a déclaré à l’AFP un manifestant de 25 ans disant se prénommer Mars. «Si nous ne descendons pas dans la rue, notre avenir, notre prochaine génération sera confrontée à davantage encore de répression», a-t-il ajouté.
Mais la principale manifestation du week-end est attendue dimanche, véritable test de la détermination des militants prodémocratie comme de celle des autorités pro-Pékin.
De l’autre côté du port, des partisans de Pékin se sont réunis également en nombre dans un parc où plusieurs orateurs dénonçaient la violence des manifestants prodémocratie, pendant que des vidéos diffusées sur un écran géant montraient quelques récents affrontements avec la police. «Leurs actes ne sont pas humains, ils [les prodémocraties] sont tous devenus des monstres», a déploré Irene Man, retraitée de 60 ans soutenant le gouvernement. «Ce sont des émeutiers, dénués de raison, sans pensée.»
«Rationnel, non violent»
Le grand rassemblement prodémocratie attendu dimanche se veut «rationnel, non violent», à l’appel du Front civil des droits de l’homme, organisation non violente à l’origine des manifestations record de juin et juillet auxquelles ont pris part des centaines de milliers de personnes.
La police a donné son feu vert au rassemblement dans un grand parc de l’île de Hong Kong, mais a interdit aux manifestants de défiler dans la rue. Ce genre d’interdiction a presque systématiquement été ignoré par les manifestants ces dernières semaines, donnant lieu à des heurts avec les forces de l’ordre.
Les autorités justifient ces interdictions par les violences de plus en plus récurrentes lors des cortèges, les manifestants s’en prenant aux commissariats.
Née en juin du refus d’un projet de loi controversé autorisant les extraditions vers la Chine, la mobilisation a depuis élargi ses revendications pour demander notamment l’avènement d’un véritable suffrage universel, sur fond de crainte d’une ingérence grandissante de Pékin.