Document L'Humanité - C'est par ces mots que Michael Moore commence un discours prononcé devant 60 000 manifestants enthousiastes, réunis devant le Capitole de Madison, la capitale du Wisconsin. C'était le samedi 5 mars. Depuis trois semaines des rassemblements, devant le siège du Parlement, mobilisent les opposants aux coupes à la hache dans les services publiques, les libertés syndicales annoncées par le nouveau gouverneur, ultra conservateur Républicain, du clan des « Tea parties » de Jim Walker.
« Contrairement à ce que ceux qui sont au pouvoir voudraient faire croire pour que vous renonciez à vos retraites, et aussi réduire vos salaires et abandonner la vie que vos grands parents avaient, l'Amérique n'est pas en faillite, poursuit Michael Moore. Il n'y a pas photo. Le pays est submergé de richesse et d'argent. C'est simplement que cet argent n'est pas entre vos mains. Il a été transféré par le plus grand hold-up de l’Histoire, des travailleurs et des consommateurs aux banques et dans les portefeuilles des plus riches.
Aujourd'hui 400 Américains détiennent plus de richesses que la moitié de tous les Américains. Laissez-moi vous dire encore que 400 personnes d’une richesse obscène ont pour la plupart bénéficié dans une certaine mesure du renflouement de 2008 (le bail out) par les contribuables; maintenant ils ont un butin, des actions et des propriétés plus élevé que n'en possèdent 155 millions d'Américains réunis. Si vous ne pensez pas qu'on puisse appeler cela un coup d'Etat vous n'êtes pas honnêtes envers vous mêmes, envers ce que vous savez au fond de vous même être la vérité.
Et je comprends pourquoi. Pour nous, admettre qu'un petit groupe de gens inconnus avec un tel monceau d'argent contrôle notre économie, signifierait que nous devons accepter de reconnaître l'humiliation que nous avons abandonné notre précieuse démocratie à l'élite fortunée, Wall Street, les banques et les 500 de « Fortune » ( le classement des plus riches établis par l'hebdomadaire, ndlr) qui dirigent cette République, et que jusqu'au mois dernier, nous nous sommes sentis complètement désespérés, incapable de faire quoi que ce soit en face de cette situation.
Je ne possède qu'un diplôme du second degré. Mais quand j'étais à l'école, chaque étudiant avait de quoi tenir un semestre d'économies pour obtenir son diplôme. Et voici ce que j'ai appris. L'argent ne pousse pas sur les arbres. Il se gagne quand nous faisons quelque chose. Il se gagne quand nous avons un bon travail, avec de bons salaires que nous utilisons pour acheter des choses nécessaires et créer plus d'emplois. Il grandit quand nous développons un large système d'éducation qui fait naître une nouvelle génération d'inventeurs, d'entrepreneurs, d'artistes, de scientifiques et de penseurs qui donnent de nouvelles grandes idées pour la planète. Et ces nouvelles idées créent des nouveaux emplois, et créent de nouveaux revenus pour l'Etat. Mais si ceux qui ont le plus d'argent ne paient pas leur part d'impôts, l'Etat ne peut fonctionner. Les écoles ne peuvent éduquer les meilleurs et les plus brillants qui vont créer ces emplois. Si les plus riches gardent la plus grande partie de leur argent ; nous avons vu ce qu'ils en font, au jeu impudent des profits à Wall Street et l'effondrement de notre économie. L'effondrement qu'ils ont créé nous coûte des millions d'emplois. Cela a aussi causé la réduction des revenus. Et la population a finit par souffrir de leur réduction des impôts, de la réduction des emplois, pour retirer la richesse hors du système, et le retirer de la circulation.
La nation n'est pas en faillite mes amis. Le Wisconsin n'est pas en faillite. C'est un grand mensonge. C'est l'un des trois plus grands mensonges de cette décennie : l’Amérique, le Wisconsin sont en faillite, l'Irak a des armes de destruction massive et plaisante Michael Moore, les Packers (l'équipe de Baseball du Wisconsin) ne peut gagner le Super Bowl sans Brett Favre.
La vérité c'est qu'il y a une quantité d'argent. Ils l’ont détourné au fond d'un puits dans leurs propriétés bien gardées. Ils savent qu’ils ont commis des crimes pour en arriver là et ils savent qu'un jour vous pouvez demander que cet argent soit utilisé pour vous. Aussi ils ont acheté et payé des centaines de politiciens à leur ordre à travers le pays .Et au cas où cela ne marcherait pas, ils ont verrouillé leurs propriétés, et leurs jets sont toujours prêts à partir, en attendant le jour qu'ils espèrent ne jamais voir venir. Pour prévenir ce jour où le peuple demande que le pays lui revienne.
Pour éviter ce jour, ils ont fait deux choses très efficaces.
1. Ils contrôlent le message. En possédant la plupart des médias. Ils ont convaincu en expert beaucoup d'Américains sans grands moyens, d'acheter leur version du rêve américain et de voter pour leurs politiciens. Cette version du rêve vous dit que vous pouvez vous aussi être riche, un de ces jours- c'est l'Amérique où tout peut arriver si vous vous débrouillez vous-même ! Ils ont consciencieusement donné des exemples abondants, pour vous montrer comment un pauvre type peut devenir un homme riche, comment l'enfant d'une mère seule en Hawaï peut devenir Président, comment un type diplômé peut devenir un célèbre producteur de cinéma. Ils vont jouer ces histoires toute la journée jusqu'à cela change tous vos projets- parce que vous, oui vous aussi, vous pouvez être un jour riche, président, gagnant d'un Oscar. Le message est clair: travaillez sans relâche, ne bougez pas et soyez sûr de voter pour le parti qui protège l'homme riche que pourrez être un jour.
2. Ils ont fabriqué une pilule empoisonnée en sachant que vous ne voudrez jamais la prendre. C'est leur version de la destruction générale assurée. Et quand ils ont menacé lâcher cette arme de destruction massive, de l’économie, l'annihilation de septembre 2008, nous avons fermé les yeux. Comme l'économie et la Bourse s'effondraient et que les banques étaient lancées dans un système Ponzi, Wall Street a sorti cette menace: ou bien on prend des milliards de dollars aux contribuables américains ou l'économie va s'effondrer. Payez ou adieu aux économies. Adieu aux retraites, adieu aux crédits de l’Etat, adieu aux emplois, aux maisons et à l'avenir. Ce fut effrayant et tout le monde a été accablé et parla de peur. Prenez notre argent! Nous ne craignons rien. Nous allons même en imprimer plus pour vous! Allez, prenez-le. Mais laissez nous tranquille, s'il vous plaît
Les patrons dans leur bureaux et ceux des fonds de spéculation ne pouvaient pas s'empêcher de rire, de jubiler et trois mois plus tard, ils s'échangeaient des chèques de formidables bonus et s'émerveillaient d'avoir joué une nation pleine d'imbéciles. Des millions avaient perdus leurs emplois et des millions avaient perdu leurs maisons. Mais il n’y avait aucune révolte.
Jusqu'à maintenant. Au Wisconsin. Jamais le Michigan (voisin, ndlr) n'avait été aussi heureux de partager un grand lac avec vous. Vous avez éveillé le géant endormi connu comme le peuple travailleur des Etats-Unis d'Amérique. Maintenant la terre tremble et le sol change sous les pieds de ceux qui sont au pouvoir. Votre message a inspiré des gens dans les cinquante Etats et ce message est : Nous l'avons fait. Nous rejetons ceux qui nous disent que l'Amérique est en faillite. C'est exactement le contraire. Nous sommes riches de talents, d'idées, de travail et oui, d’amour. D'amour et de compassion envers ceux qui n'ont commis aucune faute et sont parmi nous. Mais qui désirent encore ce que nous désirons tous: rendez nous notre pays. Rendez nous notre démocratie ; notre nom les Etats Unis d'Amérique. Non l'Amérique des entreprises. Mais les Etats Unis d'Amérique.
Comment y arriver ? Eh bien nous faisons un peu ici comme en Egypte, un petit peu de Madison. Et pensons un moment à nous rappeler que c'est un pauvre homme vendeur de fruits qui a donné sa vie en Tunisie pour attirer l'attention sur un gouvernement dirigé par des milliardaires qui étaient un affront à la liberté, à la moralité et à l'humanité.
Merci Wisconsin. Vous avec avez ouvert la possibilité de penser qu'il y avait une dernière chance d'écarter la menace qui pesait sur ce qui fait que nous sommes Américains. Pendant trois semaines vous avec tenus dans le froid, vous avez couché sur le sol, rallié des villes de l'Illinois. Quoiqu'il arrive, vous l'avez fait et une chose est sûre : Madison est seulement un début. La suffisance des riches leur a échappé. Ils ne peuvent se contenter de l'argent qu'ils ont pris au Budget. Ils ne peuvent être satisfaits en supprimant des millions d'emplois et en s'installant au delà des mers pour exploiter partout les pauvres. Non, ils veulent encore plus- quelque chose de plus que tous les riches du monde. Ils veulent nos âmes. Ils veulent supprimer notre dignité. Ils veulent nous faire taire pour que nous ne puissions même pas nous assoir à une table avec eux et discuter sur de simples choses comme la taille d'une classe de l'école, ou de la veste pare balles des forces de police ou de permettre à un pilote, quelques heures supplémentaire de repos afin qu'il ou qu'elle soit capable de faire leur travail, leur emploi à 19.000 dollars par an. C'est ce que gagnent les pilotes qui naviguent sur les lignes intérieures des vols pour Madison. Ils veulent supprimer ce repos. Ils veulent les humilier et les déshumaniser. Après tout, ce n'est qu'un effort de plus.
Et cela mes amis, c'est l'erreur fatale de l'Amérique des Entreprises. Mais en essayant de nous détruire, ils ont donné naissance à un mouvement _ un mouvement qui est devenus massif, une révolte non violente à travers le pays. Nous savons tous qu'il y a eu un jour nouveau et c'est notre part. Beaucoup de gens dans les médias ne comprennent pas cela. Ils disent qu'ils étaient concentrés sur l'Egypte et n'ont rien vu venir. Maintenant ils jouent la surprise et reste coi devant la venue de centaines de milliers de gens à Madison ces trois dernières semaines pendant ce temps d’hiver brutal. « Pourquoi se groupent-ils dans la froid ? Il y a eu l'élection en novembre et cela supposait que c'était réglé ! »
Il y a quelque chose qui arrive ici, et vous ne savez ce que c’est, n'est ce pas?
L'Amérique n'est pas à la dérive. La seule chose qui le soit c'est le la boussole morale des dirigeants. Et nous devons régler cette boussole et diriger nous mêmes le bateau maintenant. Et n'oubliez jamais, aussi longtemps que notre Constitution existe, que c'est une personne, un vote, et que c'est une chose que les riches haïssent le plus en Amérique, parce que même s'ils possèdent l'argent et toutes les cartes, ils savent que c'est un principe immuable. Nous sommes plus nombreux qu'eux.
Madison ne reculez pas. Nous sommes avec vous. Nous vaincrons ensemble. »
[Michael Moore->35792]
Traduction : Jacques Coubard
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