UN NOUVEAU MOUVEMENT POLITIQUE

Les indépendantistes pour le NON !

Chronique de Jean-Claude Pomerleau


L’historien indépendantiste Éric Bédard nous annonce aujourd’hui dans Le Devoir et Gesca-La Presse (qui n’en demandait pas tant), qu’il ne votera pas pour le Bloc.
Entre autres raisons, ce dernier reproche au Bloc d’avoir signé une entente de coalition avec Stéphane Dion : "En signant cette entente, Gilles Duceppe tournait le dos à celles et à ceux qui ont toujours considéré que la question nationale primait toutes les autres." (Éric Bédard)
http://www.ledevoir.com/politique/e...
L’argument de cet intellectuel, comme celui de tous les intellectuels, est très rationnel. Ce qu’il n’a pas compris c’est que la politique ne l’est pas, c’est pourquoi le réel lui échappe. En fait, avec cette proposition de coalition, Gilles Duceppe avait piégé Stéphane Dion, bref c’était le baiser de la mort. En effet, puisque la réaction de l’Ouest à cette coalition aurait été drastique et aurait mené, rien de moins, qu’à l’éclatement du Canada (mon argumentaire est ici) :
http://www.vigile.net/La-fin-du-Can...
M Éric Bédard, ci-devant historien, est passé à coté d’un temps fort de l’histoire sans le voir. Par définition l’historien pratique l’art de prévoir le passé, pas étonnant que le présent lui échappe. Même le Pratte à penser de La Presse a vu, à l’époque, le danger de cette situation pour l’unité canadienne et l’urgence de sauver le soldat Harper : "La crise qui menace l’unité du pays prime sur les intérêts supérieurs du Québec, selon André Pratte.
Réagissant à la crise politique qui se développe à Ottawa, M. André Pratte, éditorialiste du journal La Presse, qui a compris la gravité de la situation, a exprimé à deux reprises ses craintes qu’elle pourrait mettre en cause l’unité du pays. C’est pourquoi, en mission pour sauver le soldat Harper, il lui recommande de céder. Sinon la prise du pouvoir par la coalition risque de mettre « en marche un engrenage qui, à terme, nuira à l’unité du pays. »
(...)
http://www.vigile.net/Gesca-La-Pres...
Ce que M Éric Bédard n’a pas compris c’était que le projet de coalition nous aurait permis d’atteindre notre objectif, sans les risques inhérents au combat : " Voir un ennemi tomber par la flèche d’un autre" (Sun Tzu). On ne peut demander à un historien d’avoir l’intelligence politique d’un géopoliticien. Mais on peut lui demander en quoi sa sortie aide la cause censée lui tenir à cœur, dans un contexte ou les circonstances commandent de resserrer les rangs.
M Éric Bédard n’est pas seul dans le camp des indépendantistes pour le NON.
Il y en a une multitude d’autres qui souffrent du syndrome Nestor Turcotte, le Pape des indépendantistes pour le NON. Voici un extrait de son commentaire suite au texte de M Éric Bédard :
"Si les élections ne servent qu’à empêcher un parti de gouverner, à quoi peuvent-elles bien servir ? À prolonger le séjour des carriéristes bloquistes et à augmenter leur fond de pension ? Si tel est le cas, il faut s’en débarrasser"
Ces indépendantistes pour le NON ont comme trait commun d’être des platoniciens de l’analyse politique ; enfermés dans une logique simpliste, ils sont incapables de comprendre la véritable nature de la bête politique. Elle est le fait d’intérêts, de rapports de forces (complexes) et d’effectivité. Leurs lunettes rationnelles les rendent aveugles à l’appréciation correcte du contexte et la situation. Ils s’imaginent qu’il suffit de magnifier le pays dans le verbe pour faire avancer la cause. Au mieux, leurs verbiages insignifiants sur la pureté des intentions est sans incidence sur le réel, au pire ils nuisent à la cause en tirant dans leurs rangs. Ils préfèrent tirer sur Pauline-la-pas-fine que sur les libéraux qui pillent leur État devant leurs yeux (maudites lunettes). Ne sachant pas que c’est sur les assises de cet État que reposent les moyens de notre politique.
On n’a pas assez de nos adversaires, nous voilà avec une autre opposition :
Les indépendantistes pour le NON !
...
P.S. Je ne suis pas dans le business d’écrire des chroniques d’humeurs. J’interpelle rarement des personnes en particulier, si je le fais ici c’est que cela sert mon propos. La situation est grave et il importe de comprendre la game et se demander en toutes circonstances en quoi cela sert la cause. Et il est clair que les indépendantistes pour le NON ne contribuent en rien à la faire avancer


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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    4 avril 2011

    Je retiens une chose du texte de M. Pomerleau: la lecture des évènements au Québec servie par la bouche de nos intellectuels et nos pseudos-experts passe sans cesse à côté.
    Ils n'honorent pas l'intelligence des individus par ces procédés, ils la rendent vil.
    Ils rendent les gens comme les bêtes de champs: des ruminants juste bon à digérer ce que nous leur faisons manger. Tout ça sous l'illusion d'une fine analyse...
    Rien dans le monde fonctionne par la raison. Tout avance par notre capacité à distinguer les éléments d'un fait accompli, auquel la raison ne sert que d'outil. Par exemple, l'analyse de M. Pomerleau et le constat évident que le PLQ déstructure et ampute l'avenir de notre État-Nation avec les potentiels de tensions sociales qui viennent avec demande de mettre en oeuvre cette capacité de distinction.
    C'est un travail rigoureux qui demande discipline et une bonne dose d'abnégation. D'ailleurs merci M. Pomerleau pour ce travail et l'exemple que vous fournissez à ceux qui voudrait faire de même.
    Les métiers qui travaillent les idées ont toujours existées, sauf que c'est la première fois qu'ils ursupent depuis trop longtemps maintenant la place des décideurs.
    Respecter la dignité des gens c'est de leur parler des faits tel quel, rien moins, rien de plus.
    Patrice Beaudoin

  • Archives de Vigile Répondre

    31 mars 2011

    Vous avez raison, le PLQ forme le pire gouvernement que j'aie connu au Québec, leurs actions sont illégitimes, ils démolissent morceaux par morceaux, rien n'est jamais trop grave, au contraire d'ailleurs, ici, tout est monnayable et monnayé. Je suis furieux de la mollesse de nos médias qui sont quasiment complices de ce sabordage avec leur position d'observateur "neutre et objectif".
    Il faut impérativement arrêter ce massacre. L'idéal serait qu'un PQ solide (soutenu par la population) et déterminé, prenne le pouvoir. On verra aux prochaines élections. Le problème est que le PQ, sans être anti-nationaliste, n'est pas du tout nationaliste. C'est inexplicable. Il suffirait qu'il le soit, nationaliste, pour obtenir des records de votes aux élections. L'ADQ disparaitrait complètement. Mais non, les leaders du PQ ne sont plus nationalistes.
    Après Parizeau, les péquistes au pouvoir (sous Bouchard et sous Landry) ont plus joué le néolibéralisme économique que le nationalisme (et pourtant, M. Landry est nationaliste lui-même). Est-ce que mes souvenirs sont bons ? il me semble que nous avons perdu quelques morceaux aussi sous la gouverne du PQ. Mais rien de comparable avec l'ère Charest.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    31 mars 2011

    M Bouchard,
    Je constate que vous ne partagez pas le même sentiment d'urgence que moi sur la nécessité de sortir Charest du pouvoir le plus tôt possible. La mienne tient au constat que que le PLQ a un plan qui est celui de dépossession systématique du Québec. Si vous allez sur ma page d'auteur (Vigile) vous trouverez des textes sur le détournement de nos ressources (dès 2008):
    http://www.vigile.net/Les-Liberaux-font-mains-basses-sur
    Et de nombreux textes sur la Caisse de dépôt (2008 à 2011).
    Tout ce suivi m'a amené à conclure que les libéraux ont traversé la ligne rouge de la corruption à la trahison de l'intérêt nationale. Donc il faut les sortir du pouvoir le plus vite possible de toute urgence
    Donc la chute des libéraux nous laisse avec un choix pour le moment (en attendant la venue d'un autre parti, qui aura la même mission que les libéraux): Le Parti Québécois.
    Je ne suit pas un béat du Parti Québécois. Je fais simplement le constat que Madame Marois a adopté le Plan Larose et que cela constitue un changement de paradigme salutaire dans le contexte. J'ai commenté le Plan Larose en janvier 2008:
    http://www.vigile.net/Pauline-l-important-c-est-Larose
    Et le Plan Marois, dernièrement (après 3 ans d'observation):
    http://www.vigile.net/Le-difficile-changement-de
    Ce dernier texte donne à voir que l'État peut (et doit) agir avec envergure; je donne l'exemple de Lesage, élu de justesse en 1960, il est réélu avec 56% en 1962. Ce qui expliquait ce changement, il a proposé une politique d'État d'envergure (Nationalisation de l'Hydro) à laquelle la population a adhéré. C'est ce qui a changé la dynamique politique pour la suite de l'histoire.
    Le Plan Marois propose aussi une politique d'envergure: Une deuxième Révolution tranquille, entre autre: Une Constitution d'État et une politique d'indépendance énergétique.
    Il faut savoir que la politique n'est pas statique; et que ce Plan Marois peut déclencher cette dynamique qui mène à la rupture.Cela ne dépendra que de la volonté et la détermination de ceux qui seront à la direction politique du plan.
    C'est là que le mouvement souverainiste pourra agir pour influencer cette dynamique, pour la faire aboutir à l'objectif final.
    Merci pour vos commentaires,
    JCPomerleau

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    31 mars 2011

    En politique, il faut savoir manoeuvrer, disons. Même si cela veut dire signer un pacte avec un personnage aussi vil et repoussant que Stéphane Dion...
    Cela me fait penser à un dicton américain, «Politics make strange bedfellows»...
    Sauf que c'est sûr que le Bloc, après tant d'années de présence à Ottawa, finit par sembler faire partie du décor, au Parlement canadien. Comme s'il faisait partie intégrante du système fédéral dont nous voulons sortir. Cela, je présume, doit être inconfortable pour Gilles Duceppe...
    Au fond, tant qu'elle n'aura pas son propre pays, la nation québécoise et ses représentants semblent, condamnée à ainsi aller de situation inconfortable en situation inconfortable. Vivement que les électeurs d'ici, comprennent où est vraiment leur avenir!

  • Archives de Vigile Répondre

    31 mars 2011

    Bonjour M. Pomerleau,
    Excusez-moi, j’en ai encore long à dire mais je n’insisterai plus après. J’ai toujours dit que le BQ à Ottawa était une bonne chose et je continue à le croire. Je ne suis pas un indépendantiste pour le non, comme vous dites, j’ose croire que vous faites les nuances. Le Bloc améliore la démocratie en représentant le mieux les intérêts du Québec, mieux que quiconque auparavant. Je me souviens très bien des libéraux de Chrétien, ils étaient pires que le PC en ce qui concerne le « nation building » et la folklorisation du Québec, notre « encarcanement ». Mais il faut mesurer les choses, vous avez raison, et on mesure vraiment mal les choses quand on retire son appui au BQ sous le prétexte de M. Bédard (selon ce que vous en dites, je n’ai pas encore lu à ce sujet).
    Par ailleurs, plusieurs autres intervenants s’imaginent que les critiques du PQ ici sur Vigile sont désastreuses pour la Cause. Voyons donc, voyons la réalité. Les élus se fichent bien de ce qui se dit ici. Vigile dérange, oui, mais il n’a jamais réussi à changer quoi que ce soit à l’action du PQ. Et la grande majorité de québécois désintéressés politiquement ne connaissent même pas notre existence. Je crois que beaucoup s’illusionnent sur notre pouvoir, ici. Je ne dis pas que nous sommes inutiles ; mais s’il faut se limiter à encourager l’élection du PQ, Vigile sera encore plus marginalisé. Vigile porte bien son nom, soyons vigilants.
    Éliminer le PLQ du pouvoir, en faire la priorité, c’est louable, c’est absolument légitime. Ma mesure des choses est que pour régler un problème ponctuel, nous allons retarder sciemment notre émancipation.
    L’essentiel est de créer un rapport de force (« créer » parce qu’il est pratiquement inexistant) c’est clair. Mais le PQ sera élu sur une faible majorité, s’il n’est pas minoritaire. Je vous l’ai déjà dit, c’est cela qui ne marche pas. Impossible dans ces circonstances de faire quoi que ce soit, ce sera toujours traduit dans l’opinion publique comme des chicanes provoquées, des crises inutiles, etc.. On sait tous cela, non ? Considérant ce qu’il est aujourd’hui, la façon dont il agit et la vision des choses qu’il exprime, après 1 an ou 2 au pouvoir, le PQ ne sera plus en mesure de faire quoi que ce soit en ce qui concerne notre rapport de force face au Canada. Ceux d’entre nous qui veulent que le PQ prennent le pouvoir coute que coute sans considérer ce qu’il sera en mesure de faire ensuite (c’est différent des promesses et de la volonté officielle), ce sont ceux-là les pressés, ceux-là qui nous précipitent dans notre anéantissement. Il faut se décoller le nez de la vitre et juger le PQ à ses actes.
    Vous parlez d’effectivité. Il est impossible de faire la révolution en cachette, par défaut. Vous connaissez pourtant « la véritable nature de la bête politique », comme vous dites. Comment se fait-il que vous soyez tant confiant envers la volonté officielle, le plan Marois, sans tenir compte des acteurs en présence et de leurs actes passés et présents ? Pauline Marois le dit et le répète : ultimement, pour faire la souveraineté, il faudra un référendum comme on les connaît. Rien à discuter de ce côté. J’admire Gérald Larose et j’aime bien Jean-François Lisée mais là, c’est Pauline Marois le leader. Son histoire politique, son action n’autorisent pas, il me semble, tout cet espoir que vous portez en elle, bien au contraire.
    Je souhaite que le PQ change d’attitude avant les prochaines élections, montre son sérieux. Mais ça ne changera pas. Tout indique qu’il agira comme il l’a toujours fait. Croyez-vous que le PQ se fera élire avec un mandat clair de faire tel ou tel geste de souveraineté ? Il promettra une Constitution sur le bout des lèvres, des études, des rencontres un peu partout avec les gens pour discuter de souveraineté, mais la seule usure du pouvoir aura raison de ses promesses. Nous le savons bien, comment pouvez-vous croire que ce sera différent ? Ce le serait si 50 % des gens ou plus votaient PQ mais ce ne sera pas ainsi.
    Sitôt au pouvoir le PQ sera assailli de tous les côtés. Sans mandat clair pour procéder, le plan Marois prendra le bord assez vite, vous verrez. Entre les deux, entre subir encore 4 ans du PLQ, permettant un renouvellement en profondeur du PQ, entre ça et avoir un PQ menotté condamné à gérer la province pendant 10 ans, je préfère le premier choix.
    Mon objectif est l’indépendance de notre pays, et il faut s’atteler à cela tout de suite, pas dans 7 ou 8 ans peut-être, quand les québécois seront tannés, comme ils se tannent toujours, du gouvernement en place.
    Mais je ne veux pas m’acharner, vous avez compris mon point de vue je crois. Si le PQ prend le pouvoir j’en prendrai acte et je donnerai la chance au coureur.