Le phénomène Zemmour

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Apprivoiser le séfarade magique


Notre chroniqueur Mathieu Bock-Côté séjourne actuellement à Paris, d’où il observe l’actualité française d’un œil québécois.







Tout le monde parle de lui, en France, et on commence même à s’y intéresser dans la presse internationale ? De qui ? D’Éric Zemmour, l’homme qui vient troubler l’élection présidentielle française, qui aura lieu en avril 2022.


On le sait, en 2017, Emmanuel Macron avait remporté par surprise l’élection présidentielle. Il avait pour adversaire Marine Le Pen. Le premier était centriste, la seconde associée au populisme. Les sondages, depuis, annonçaient trois choses : qu’ils allaient de nouveau s’affronter, que Marine Le Pen ne pouvait pas gagner et que les Français ne souhaitent pas les voir s’affronter.






Polarisation


Ils cherchaient donc une figure forte pour déverrouiller le système.


Qui est Éric Zemmour ? Il s’est d’abord fait connaître comme journaliste et essayiste. À partir de 2006, il a participé comme chroniqueur à On n’est pas couché, une émission très populaire en France, jouant un rôle un peu similaire à Tout le monde en parle chez nous. Il a depuis gagné une immense notoriété.


Dans un système médiatique soumis au politiquement correct, il en est venu à incarner l’opposition officielle. Extrêmement intelligent, incroyablement cultivé, redoutable débatteur, il a su placer au cœur du débat public la question de l’immigration massive, dans un pays où ses effets sont catastrophiques, comme en conviennent même plusieurs figures historiquement associées à la gauche. De nombreux quartiers, en France, sont dans une situation de partition ethnique et soumis à l’islamisme. N’oublions pas non plus les nombreux attentats islamistes depuis 2012.


Ne trouvant personne pour défendre ses idées, il a décidé de faire le saut en politique. Il fait trembler tous les partis à droite, qui voient leurs électeurs aller vers lui.


J’ajoute qu’on aurait beau chercher, il ne se compare à aucun homme politique québécois.








Écoutez Les idées mènent le monde, une série balado qui cherche a éclairer, à travers le travail des intellectuels, les grands enjeux de sociétés.





Mais le presque candidat Zemmour traîne quelques casseroles. D’abord, des déclarations d’un machisme méditerranéen qui cadrent bien mal dans une société qui croit avec raison à l’émancipation féminine. Il cherche à se rattraper depuis, mais y parviendra-t-il ?


Ensuite, des réflexions historiques alambiquées qui poussent ses détracteurs à le présenter à coup de citations tronquées comme un disciple du maréchal Pétain, et à l’associer à l’extrême droite, ce qui est grotesque, mais la caricature s’est imprimée dans le débat public.


Faut-il le comparer à Donald Trump ? Plus ou moins. S’il polarise beaucoup, il est infiniment plus profond que l’ancien président américain.


Zemmour oblige ses adversaires à s’emparer de questions autrefois censurées.


Diabolisation


On peut être d’accord ou non avec lui, admirer son courage et se désoler de ses outrances. Mais on ne devrait pas se croire obligés de le maudire. Quand j’observe le traitement que lui réservent en ce moment certains de nos médias, où des commentateurs ne connaissant à peu près rien à la politique française le présentent comme un monstre, je suis atterré.


Ils ne parviennent pas à comprendre comment il peut recevoir l’appui d’environ 17 % des Français, en ce moment, ce qui lui permettrait de participer au deuxième tour de l’élection présidentielle.


Et ils ne comprendront pas s’il remporte la présidentielle dans six mois. 


Les Français et le débat  


Les Français débattent tout le temps. Pour le Québécois installé ici, c’en est même fascinant. On le voit avec la place des émissions de débat à la télévision. Il y en a des bonnes et des moins bonnes. Mais elles valorisent la diversité des points de vue sur tous les thèmes de société. Ces émissions permettent de mettre l’actualité en contexte, de l’inscrire dans une perspective plus large. À quand de semblables émissions chez nous ?


La COVID ? Vraiment ?  


Si je ne suivais pas l’actualité, je serais tenté de croire que la COVID est terminée. Au quotidien, la vie a repris ses droits, les restaurants sont bondés, les hommes et les femmes se font la bise ou se serrent la main, avant de s’entasser dans des événements dont nous avions perdu l’habitude depuis un an et demi. Dernière trace de la COVID : le masque, qu’on porte à moitié, et les antivax, marginaux, mais mobilisés.


Les Français aiment les journaux papier  


Partout, la presse papier est en crise. La France ne fait pas exception. Mais la presse papier conserve un prestige exceptionnel. Un article important ne peut se contenter d’être publié sur un site web. Il doit être dans le journal. À Paris, on trouve encore des kiosques, et dans les cafés, les clients lisent souvent leur journal à l’ancienne, à la manière d’un rituel qui ne doit pas tomber. Je m’y plie aussi avec plaisir !












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