Le 22 mars 2012

Le début de "NOUS"

Le rouge, c’est la guerre. Et nous. Nous nous devons de la faire à notre façon.

Tribune libre

22 MARS 2012
La couleur rouge n’aura jamais autant eu le visage de la fleur de lys aujourd’hui. Notre drapeau bleu et blanc saigne. Il se montre enfin. Prend enfin position sur les cadavres du passé. Aujourd’hui 22 mars 2012, j’ai pleuré au moins 3 fois en voyant mes compatriotes se lever debout, crier leurs tripes, leurs cerveaux.

Je ne peux concevoir qu’une partie de la population (et SURTOUT le gouvernement) n’entende pas ces cris du cœur. Je ne peux concevoir que certaines personnes pensent que nous, en tant qu’étudiants, cherchons seulement à «sécher» les cours. Je ne peux toujours pas concevoir que des gens ne voient pas l’urgence de faire bouger les choses, de renverser le gouvernement, de nous faire Pays.

J’ose espérer que ce merveilleux mouvement d’éveil social, de mobilisation massive, d’intérêt public, ait créé dans les esprits endormis une lueur, une conscience, un goût de liberté. J’ose rêver que ce soir, comme moi, plusieurs personnes auront pris le crayon (le clavier plutôt) pour simplement écrire ce sentiment incroyable qu’ils ont ressenti aujourd’hui. Qu’est-ce que ça fait d’être avec plus de 200 000 personnes qui vont dans la même direction? Ne sentez-vous pas une fierté de savoir que vous dites tout haut ce que vous pensez? Ne sentez-vous pas en vous les vibrations de triompher enfin, d’essayer de prendre le volant en vous entêtant contre ce conducteur malhabile?

Le rouge, c’est la guerre. Et nous. Nous nous devons de la faire à notre façon. Nous sommes des êtres humains, nous savons voir l’injustice. Nous ne voulons pas nous faire écraser. Nous n’acceptons pas d’être blessés physiquement et/ou psychologiquement. Nous ne désirons pas être brimés dans notre opinion, nos valeurs et nos idées. Nous ne voulons pas la mort de nos amis, de nos racines. Nous sommes des êtres humains pourvus d’une conscience et d’une intelligence sociale sans bornes, et nous la guerre, nous la faisons dans le RESPECT. Nous avons la chance de vivre dans un endroit où il fait bon vivre, où nous n’avons pas le problème de la faim ou de mortalité massive. La plupart de nous avons au moins un toit sur la tête. Nous n’avons pas le problème d’être sous un système politique dictatorial, nous avons choisi la démocratie, le pouvoir au peuple, à la majorité. Maître chez soi.
Imaginez-vous un instant. Si un peuple est comme un être humain, comme vous et moi, il est alors normal que nous n’acceptions pas collectivement de nous faire planter un couteau dans le dos, de nous faire trahir par les personnes en qui nous avons remis notre confiance (le gouvernement que nous avons choisi). Qu’ensemble nous n’acceptions pas de nous faire traiter comme des idiots.

Chaque personne dans sa vie n’a qu’un désir au final : être libre. Alors pourquoi ne pensons-nous pas qu’en tant qu’entité humaine (une société unique), nous pouvons être libres? Nous voulons être libres et contrôler ce qui se trame dans notre maison, alors pourquoi pas le faire ensemble dans notre grande propriété qu’est le Québec?
Je rêve peut-être. J’espère peut-être, comme bien d’autres avant moi. Je me ferai peut-être dire que c’est un message de souverainiste fatigante, de p’tite jeune en art qui ne connait rien à la politique de ce monde, etc. Non, mesdames, messieurs, je ne connais peut-être pas grand-chose à la politique, mais je sais au moins qu’en tant que personne, et donc en tant que partie intégrante d’une société, dans la vie je ne veux pas pleurer, je ne veux pas me faire insulter. Je veux qu’on me considère.
Voilà pourquoi nous devrons faire de la province du Québec un pays. Pour que lorsque, comme aujourd’hui, nous disons ensemble haut et fort que ce que ceux qui nous gouvernent, nous proposent, et bien ça ne fonctionne pas pour nous. Pour que lorsque ça ne fonctionne pas pour une majorité de personnes, et bien qu’on nous écoute et qu’on trouve un compromis.
Alors à tous ceux qui portent leur carré rouge sur leur chandail, à tous ceux qui l’ont dans la tête : « NOUS SAVONS QUE NOUS NE SOMMES PAS SEULS ». NOUS SAVONS QU’ENSEMBLE, PLUS QUE JAMAIS, NOUS VOULONS CHANGER LES CHOSES ET NOUS ALLONS LES CHANGER. ENSEMBLE, LIBÉRONS-NOUS DES LIBÉRAUX. ENSEMBLE, CONSTRUISONS LE QUÉBEC À NOTRE IMAGE. IL EST TEMPS DE DIRE AU REVOIR À PAPA, MAMAN. IL EST TEMPS DE CHANGER LE COURS DE NOTRE HISTOIRE.
CONTRE LA HAUSSE DE L’IGNORANCE.

« Aujourd’hui sur la place publique qui murmure
_ j’entends la bête tourner dans nos pas
_ j’entends surgir dans le grand inconscient résineux
_ les tourbillons des abattis de nos colères »
_ - Gaston Miron
« Aussi longtemps que nos chansons seront des épées lorsque nous les brandirons »
_ - Mahmoud Darwich

Caroline Thisdale


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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2012

    @ Didier
    Entièrement d'accord avec votre commentaire qu'il faudrait s'abstenir de voter pour que cesse ce maintien du statu quo qui aide à sécuriser, à anesthésier le peuple en le maintenant dans un état de dépendance envers les décideurs politiques (?) qui ne respectent même pas leurs promesses et leur programme électoral.
    La démocratie (?), c'est une cage à homards, un gros leurre; le peuple ne décide rien et n'est même pas consulté. S'il a la malheur de contester un peu sur des mesures impopulaires; on lui lance un os pour qu'il se calme. Maintenant, la seule fois que je me déplacerai pour aller voter, c'est lorsqu'un vrai parti indépendantiste proposera de déclarer unilatéralement l'indépendance du Québec en prenant le pouvoir. Aussi bien dire que j'ai définitivement décroché.
    André Gignac 27/3/12

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2012

    J'ai entendu un animateur de radio, l'un de ceux que l'on peut compter dans le nombre des "satisfaits" de la société, qui y est allé d'une remarque d'une logique implacable, je dois cependant l'admettre.
    Cet animateur de radio disait que les contraventions données à certains étudiants lors de certaines manifestations étant plus élevés que l'augmentation suggérée des frais de scolarité, il ne comprenait pas pourquoi les étudiants ne se résignaient pas au bout du compte à accepter l'augmentation.
    C'est vrai que lorsqu'on le prend comme ça, cet animateur de radio a raison...

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2012

    Pour se libérer des libéraux (et aussi des péquistes, parce que Michel Chartrand disait que ces deux partis se ressemblaient comme une paire de fesses), il faudrait délégitimer le processus électoral en s'abstenant d'aller voter.
    Car on sait que les humbles et les démunis ne vont pas voter. Les seuls qui vont voter sont les "satisfaits", les repus et les heureux de leur sort.
    Les élections ne sont qu'une façade démocratique servant à reproduire le statu quo.
    Et pour les étudiants, qu'ils arrêtent d'agir comme un lobby ou groupe de pression parmi tant d'autres et qu'ils tentent d'inclure leurs revendications légitimes dans un projet de société.
    Qu'ils réclament aussi un revenu universel pour une véritable répartition de la richesse collective et pour faire en sorte que tous puissent vivre décemment au Québec.

  • Serge Jean Répondre

    26 mars 2012

    Caroline, vos sentiments sont tout à fait pertinents,et vivants. C'est ce qu'il faut pour ressuciter le peuple écrasé d'amnésie et de spoliation. Le peuple ne sait pas qu'on le cache, il faut lui dire.
    Votre message est quelque chose de beau et de vivant.
    Jean

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mars 2012

    Chère Caroline,
    Que ce cri du coeur de la part des étudiants de ce Québec que nous aimons sache appeler au réveil et à l'éveil tous ceux et celles qui ne s'interrogent plus sur l'avenir de ce Peuple en voie de perdition dans une assimilation où par trop règnent les valeurs économiques comme instances décisionnelles influençantes
    Que les étudiants, jeunes et pleins d'espoir quant à leur avenir, sachent que par eux et l'exemple de leur action mobilisatrice contribue à ce que naisse ou persiste ce qui jamais ne devrait s'éteindre : la parole d'un Peuple qui, lorsqu'il le faut.. doit hausser le ton
    Vous êtes jeunes, pleins d'espoir.. votre Action démonstrative montre que lorsqu'il le faut, il faut désobéir au nom d'un Idéal
    Vous militez.. pacifiquement, montrant votre désaccord envers des décisions économiques qui ne font pas sens
    Vous constituez une relève.. non pas comme seuls étudiants en peine de payer des études.. mais comme relève d'une société qui peut refuser qu'un système se perpétue dans certains abus au détriment de certaines valeurs liées à des libertés fondamentales autrement plus importantes que les valeurs économiques régissant bien souvent pour les plus nantis
    Alors Oui.. Votre Action porte sur des symboles, des symboles que nous espérons autres, autres que ce monde jouissant de valeurs économiques
    Votre mobilisation peut également signifier que ce que vous voulez, c'est d'un Québec : Autrement, autrement régi et ceci passe par son Indépendance, au moins par son Indépendance
    Je ne sais pas si vous réalisez que , beaucoup et beaucoup.. vous pouvez porter par votre action en signifiant votre désaccord dans une espérance qu'il existe une autre façon de régir ce monde.. au-delà de ses règles économiques restrictives pour les uns et enrichissantes pour les autres
    Je rêve.. je rêve de votre jeunesse osant encore croire qu'il peut y avoir autre chose que ce qui existe et je vous encourage dans votre dire disant : Non, nous ne voulons pas et nous espérons qu'il peut y avoir autrement quelque chose qui ne convient pas, qui ne peut plus convenir
    S Caron

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mars 2012

    JE ne pense pas que Gaston Miron songeait aux frais de scolarité des étudiants en écrivant ces mots.
    Il invitait au dépassement, à l'engagement, à la lutte pour la liberté. Et la liberté a un prix. C'est plus que 325.00$ par année.
    NT