Lactatia, drag-queen à 10 ans

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La Presse banalise la sexualisation des enfants et les référents pédophiles au nom de la « diversité sexuelle »

À 2 ans et demi, Nemis Quinn Mélançon a demandé à sa mère de le maquiller. Trois ans plus tard, il a imaginé une chorégraphie sur la chanson Break Free, d'Ariana Grande, vêtu d'un tutu rose. Peu avant ses 8 ans, il a réalisé que toutes ses passions le poussaient à devenir drag-queen. Depuis, son alter ego, Lactatia, est l'un des enfants drags les plus connus de la planète !



Repéré en 2017 dans la foule d'un spectacle de Bianca Del Rio à Montréal, alors qu'il était lui-même habillé en drag, Nemis a été invité sur la scène : les vidéos de Lactatia et de la célèbre drag-queen sont vite devenues virales. Instantanément, les médias de partout ont voulu parler à Nemis, ce qui a obligé ses parents à faire le tri. « On refuse les entrevues des médias qui veulent seulement soulever la controverse », explique sa mère, Jessica Mélançon. 


« Si je n'ai pas envie de le faire, on décline poliment », renchérit Nemis, qui ajoute avoir adoré la séance photo avec Teen Vogue. « Il y avait une grosse table d'accessoires seulement pour moi, deux maquilleurs, un artiste de manucure et une personne aux perruques ! »


Au fond, Nemis ne fait rien d'autre que se costumer, se maquiller et préparer des numéros pour le plaisir. Le jour où sa grande soeur lui a suggéré de regarder RuPaul's Drag Race, il a eu une révélation. « Je voulais absolument essayer la drag après avoir découvert l'émission ! J'aime particulièrement Ginger Minj de la septième saison parce qu'elle est super divertissante. Je m'inspire beaucoup d'elle. J'aime faire réagir les gens. »


 


Sa mère confirme que son garçon essaie toujours d'attirer l'attention dans un groupe. Une perception qu'il s'empresse de nuancer avec une éloquence étonnante chez un enfant de 10 ans.




« Parfois, je me sens très gêné, j'ai peur de faire certaines choses ou de parler aux gens. Mais tout ça disparaît en drag. Je me sens plus confiant. »


- Nemis Quinn Mélançon, alias Lactatia




La drag est donc un désir naturel chez lui et non un choix imposé par ses parents. « Beaucoup pensent qu'on l'a forcé à devenir une drag-queen et qu'on fait ça pour l'argent, dit Mme Mélançon. Pourtant, mon mari et moi, on est plutôt heavy metal. Si on l'avait poussé à faire quoi que ce soit, ç'aurait été de s'habiller tout en noir et de jouer de la basse dans un groupe de metal. » 


« Ils ne font pas d'argent avec la drag ! réagit Nemis. Si je fais des prestations rémunérées, ça me revient pour que je m'achète des perruques ou des jouets, ça ne revient pas à mes parents pour qu'ils s'achètent de nouveaux téléphones... »


Drag Kids


Les Quinn Mélançon, qui se décrivent comme des parents non conventionnels, ont tout simplement embrassé la passion de leur fils. 


« Je sais que tous les parents ne réagiraient pas ainsi et je trouve ça tellement triste. On est conditionnés à s'en faire avec ce que les autres pensent de nous : les voisins, la famille ou l'Église. Nous, on s'en fout ! », lance Jessica Mélançon.




Ils se préoccupent toutefois du bien-être de Nemis/Lactatia. En effet, la jeune drag-queen ne peut pas se produire dans les bars ou dans les salles réservées au public adulte. « On accepte les invitations des évènements familiaux pour tous les âges, comme le spectacle de House of Laureen au Pied-du-Courant. On participe à la représentation de 20 h, mais pas à celle de 22 h. »


En avril dernier, le festival Hot Docs de Toronto a présenté en première le documentaire Drag Kids, auquel Nemis et sa famille ont participé afin de démystifier l'art de la drag pour les enfants - deux réalités parfois difficiles à concilier. Si la drag est un art coloré, flamboyant et extrêmement créatif, nombre de critiques lui reprochent de promouvoir la féminité toxique. Jessica Mélançon explique qu'elle n'a pas permis à Nemis de changer l'allure de son corps pour se vieillir.




« Il ne peut pas mettre de fausse poitrine ou du rembourrage pour avoir des courbes ni se dessiner un faux décolleté. Il doit suivre sa ligne de puberté. S'il veut être un enfant drag, il doit demeurer un enfant. »


- Jessica Mélançon, mère de Nemis




Des principes que le garçon accepte sans rechigner. « Je suis d'accord avec mes parents. J'ai quand même hâte au jour où je pourrai mettre de faux seins. Mais c'est très cher. Je ne sais pas si j'en ai besoin. »


Ils doivent aussi composer avec les limites de l'hypersexualisation dans les numéros de drag. « Nemis fait du voguing avec les poses hypersexuées. Mais beaucoup de personnes que j'ai consultées me rappellent que de nombreuses formes de danse peuvent être perçues de manière sexuelle, comme le hip-hop, le ballet ou le contemporain. Dans notre famille, on est très sex positive et body positive. Mais c'est une question complexe. »


Vivre avec l'incompréhension


Autre élément avec lequel il est difficile de composer : les réactions des camarades de classe. « En général, les jeunes à l'école ne comprennent pas la drag, dit Nemis. Ils ne font pas la différence entre ça et vouloir être trans. » 


L'équipe-école a aussi du mal à composer avec le plaisir qu'a Nemis à jouer avec les codes de genre, en portant, par exemple, un short rose, un t-shirt à motifs d'arc-en-ciel ou une robe. « Une enseignante m'a écrit un courriel pour m'avertir que mon fils s'était habillé en fille pour aller à l'école, relate sa mère. Elle a même dit qu'il était travesti... » 


Elle refuse toutefois d'imposer à Nemis des vêtements de garçon.




« Il porte ce qu'il veut. Et il pourra mettre du maquillage s'il le désire quand il sera au secondaire. Je suis une maman progressive, mais j'ai conservé certaines vieilles règles de mes parents. »


- Jessica Mélançon, mère de Nemis




La situation s'envenime parfois quand le garçon est victime d'intimidation. « Nemis est l'enfant différent, celui qui est ouvertement queer. C'est difficile à gérer avec les autres jeunes. S'ils l'intimident ou l'attaquent, Nemis va répliquer encore plus fort. » 


Elle décrit une situation où un intimidateur a poussé Nemis dans un trou d'eau. « Nemis a passé la journée à accumuler de la gomme pour la lui coller dans les cheveux. Le garçon a dû se faire couper beaucoup de cheveux... Je lui ai expliqué qu'il devait gérer ça différemment cette année à l'école. » 


Diverti par l'anecdote, Nemis ne semble pas s'en faire. « Les réactions des autres m'amusent beaucoup. Ça ne me blesse pas. »




La même désinvolture l'habite sur les réseaux sociaux. Suivie par plus de 28 000 personnes sur Instagram et 44 000 sur Facebook, Lactatia ne reçoit presque jamais de commentaires haineux, contrairement à beaucoup d'autres enfants drags. 


« Les messages négatifs sont rares, mais on ne répond jamais aux trolls et aux haters, dit sa mère. On les bloque et on demande aux personnes qui nous suivent de ne leur donner aucune attention. »


Très demandé, Nemis se rendra à Denver le 18 août pour participer à la soirée Dragutante. « C'est l'équivalent du bal des débutantes pour les jeunes filles qui font leur entrée dans le monde, mais pour les drags de moins de 18 ans. » 


Dans quelques années, Nemis aimerait beaucoup participer à Drag Race Canada. Mais d'ici là, ses parents le tiennent à distance des compétitions. « Si World of Wonder, la compagnie qui produit RuPaul's Drag Race, lançait Drag Race Junior, je serais contre, dit Jessica Mélançon. Les jeunes n'ont pas assez d'expérience. Ils vont être épuisés et dans la ligne de mire de beaucoup trop de critiques. Les parents vont être mis les uns contre les autres. Et les possibles contrecoups sur l'internet sont énormes. Ce serait une mauvaise idée. »




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