La République populaire de Donetsk – L’histoire que les médias occidentaux ne racontent pas

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Sur les traces de la Crimée

Mon refus de croire tous les articles des médias occidentaux sur « l’agression russe » fait de moi un « troll du Kremlin ». Ma punition pour ne pas propager la « ligne du parti » – l’« esquive » simple, efficace, par les médias occidentaux – n’a cependant pas diminué mon engagement permanent à voir l’autre côté.


Ayant précédemment enquêté sur la réunification de la Crimée avec la Russie, ce mois de mai, j’ai tourné mon attention sur la naissance de deux nouvelles formations gouvernementales en Ukraine de l’Est, la République populaire de Donetsk (RPD) et la République populaire de Lugansk (RPL). Les Américains n’entendent que ce que Kiev « rapporte », ou ce que que la machine de propagande étasunienne sort – que ce sont des régimes fantoches nés de « l’agression russe » et maintenus en place énergiquement par « l’occupation ». N’étant pas un « correspondant de guerre » courageux, il est vrai que j’ai entrepris mon voyage avec une certaine appréhension – pas par peur de « l’agression russe », mais parce que le régime de Kiev bombarde continument des cibles civiles.


Je serai éternellement reconnaissant à mon nouveau collègue Konstantin Dolgov pour m’avoir montré la triste « Allée des anges » – un mémorial profondément émouvant aux enfants tués jusqu’à aujourd’hui par les forces armées du régime de Kiev. Ensuite, mon contact virtuel avec Patrick Lancaster, un journaliste américain qui réside là-bas maintenant, et Alexander Sladkov, un correspondant russe qui y vit aussi souvent, mais, le plus important, « courir vers le son des tirs » m’a permis de contrer le blocus de l’information sur la guerre par les médias occidentaux.


Une rue du centre de Donetsk – Le Donetsk Palace

Alors que j’approchais de la grande ville de Donetsk (auparavant plus d’un million de résidents, aujourd’hui beaucoup plus petite à cause du flux de réfugiés en Russie – le paradoxe de gens courant se réfugier dans les bras de l’« agresseur »…), je craignais de voir un centre endommagé par les bombardements de Kiev et des gens effrayés et privés des biens les plus élémentaires. Contrairement aux « patriotes » ukrainiens à la télévision russe, j’ai été soulagé de voir une ville active et animée, avec un centre charmant, et ravi de voir une population qui, loin d’être apeurée, croit fermement en un avenir meilleur, une fois sortie de l’Ukraine.


Malgré le blocus total de Kiev, la ville de Donetsk semble avoir un assortiment raisonnable de marchandises et de nourriture. Cela semble venir pour l’essentiel d’un commerce et d’une coopération croissante avec la Russie, une voisine limitrophe et le partenaire le plus important de l’« ancienne » Ukraine, celle d’avant la guerre. En fait, pendant que j’étais là-bas, une conférence s’est tenue pour renforcer cette coopération et, à cause du blocus économique de Kiev, le rouble a remplacé la hrivna ukrainienne. Les médias occidentaux ne douteront pas un instant que ce soit une preuve supplémentaire de l’« agression russe ».


Le marché en plein air à la gare de Donetsk

Ma « ressource » la plus importante pendant mon trop court séjour était Ekaterina Pavlenko, une jeune députée locale au Parlement de la RPD. Ekaterina elle-même n’est certainement pas un « agresseur russe » ou une « force d’occupation ». Bien au contraire, elle est très typique des résidents locaux dont les ancêtres, principalement d’origine russe, ont vécu sur ce territoire pendant des générations. Ekaterina, auparavant engagée sur des questions « sociales » n’est même pas une « politicienne typique ». Au fur et à mesure que je la connaissais davantage, ses yeux expliquaient tout – ils montraient le mélange unique d’un désir brûlant de promouvoir la vie de la nouvelle république indépendante et de bonté et d’amour sous-jacents pour ceux qui l’entourent. Ekaterina a résumé très éloquemment la conviction de la nouvelle république : ce sont les terres ancestrales des habitants actuels, pas un objet de marchandage dans un conflit géopolitique plus vaste, ou un « sujet » de domination pour Kiev. C’est certes difficile à comprendre pour l’Américain moyen étant donnée notre nature très volatile.


J’ai fini tout à fait accidentellement à Donetsk pour leur « Jour de la République » – leur 4 juillet. En tant qu’hôte d’Ekaterina, j’étais invité, sans aucun contrôle ni surveillance, à regarder, filmer et pour finir rejoindre un défilé massif de célébration constitué de dizaines de milliers de gens, littéralement, représentant tous les aspects de la vie dans toutes les régions de la RPD. Les médias occidentaux seront déçus d’apprendre qu’il n’y avait pas de forces d’occupation russes lourdement armées de mitrailleuses pour forcer les gens à participer. En fait, au-delà du jour du défilé, contrairement aux cris de Kiev, du genre du « petit garçon qui criait au loup », à propos d’une invasion russe massive, on ne voyait aucun signe de la présence d’une quelconque armée régulière russe.


Le mouvement Donbass Libre – le groupe auquel appartient Ekaterina – au défilé du Jour de l’Indépendance à Donetsk, le 11 mai 2017

À mes crédules compatriotes américains, qui pourraient dire qu’« ils se sont simplement cachés », je demanderais simplement comment cacher des dizaines de milliers de soldats – selon Kiev –, une importante infrastructure de soutien et des armes lourdes aux « yeux » des satellites, sans parler des « téléphones intelligents » dans une zone de la taille du Connecticut. Les seules conclusions qu’on peut en tirer est que soit il n’y a en effet pas de domination russe (l’évaluation la plus simple et la plus exacte), soit que les Russes ont inventé une nouvelle technologie « furtive » pour les chars et les soldats, soit, en supposant une certaine présence russe, que les habitants sont vraiment reconnaissants pour le soutien et la défense qu’ils apportent. Aucun de ces conclusions n’est bonne pour l’Occident…


Alors que j’étudiais les cartes locales, que je marchais et utilisais les transports publics (3 roubles… à peu près 5 cents américains), les noms de rues et de nombreux monuments m’ont parlé davantage non seulement de l’héritage majoritairement russe de la population, dont les ancêtres ont vécu ici pendant des siècles (en 1922, la taille de la République ukrainienne naissante a augmenté de 25% après que Lénine lui a « cédé » la plus grande « Novorussie » russe – incluant tout le Donbass, Kharkov et Odessa), mais d’une population qui honore et révère aussi ceux qui ont donné leur vie pour vaincre le fascisme. Comme cela se passe dans tout le reste de l’Ukraine, si Kiev parvenait à reprendre le contrôle, les noms des rues à référence russe seraient certainement modifiés et tous les monuments seraient renversés – en particulier ceux rappelant la victoire soviétique sur Hitler. En d’autres termes, la soi-disant « décommunisation » de Kiev est clairement une « dérussification » – un triste nettoyage ethnique du XXIe siècle, largement passé sous silence


Un monument de la Seconde Guerre mondiale à Donetsk, preuve de l’engagement russe contre Hitler

Comme je m’« autofinançais », j’ai dû choisir un hôtel plus « économique » que le haut de gamme « Palace de Donetsk ». Lorsque je suis arrivé à l’hôtel et y suis entré, je n’ai pas trouvé simplement un palace, mais l’endroit où vivaient les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Difficile de critiquer ces braves gens de préférer rester dans leur chambre plutôt que de faire leur travail de révélation des bombardements continuels de Kiev sur des cibles civiles.


En évitant les lignes de front, j’ai toutefois sauté dans un tramway en direction de la gare principale, fermée à cause des bombardements de Kiev au début de la guerre – et assez proche de zones actuellement bombardées. Tandis que le tram, lentement mais sûrement, traçait sa route vers la gare, je regardais autour de moi avec appréhension, m’attendant à ce que les passagers en descendent bien avant. Au lieu de quoi, j’ai trouvé des gens de mon âge (mûr) qui ont fait le voyage jusqu’au bout. Après m’être promené autour de la gare abandonnée et d’un complexe commercial voisin – montrant toujours des traces des bombardements – je me suis dirigé vers ce qui semblait être à l’origine plusieurs petits kiosques. J’ai été choqué cependant de constater que c’étaient simplement les « avant-postes » d’un immense marché de diverses marchandises et de produits cultivés localement plutôt appétissants. Lorsque j’ai demandé aux vendeurs s’ils n’avaient pas peur d’être si près du front, la nature stoïque très typique des Russes a émergé – « la vie continue », avec un soupir triste et mélancolique : « Bien sûr, nous souhaitons qu’ils (Kiev) nous laissent vivre dans la paix et la tranquillité. »


Toujours en guerre – pas d’armes. Et: Prenez garde aux munitions non explosées. Une affiche sur les portes d’un magasin local à Donetsk.

En résumé, si l’Occident envoyait des correspondants objectifs et compétents en RPD, ils ne trouveraient en effet ni « occupation » ni « agression », mais des gens d’ascendance russe déterminés à avancer vers un avenir basé non sur la haine et le rejet de leurs « frères slaves » ukrainiens, mais sur des valeurs positives et favorables à la vie telles que la liberté, la justice et l’autodétermination. Étant donné que les États-Unis ont commencé de cette façon il y a quelques siècles, il est tragiquement ironique qu’aujourd’hui ils soutiennent les efforts du régime de Kiev pour se débarrasser des Russes « indésirables ».


Stephen Ebert est analyste politique américain et écrit pour les médias russes.


Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Catherine pour le Saker francophone



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