La République du Plateau en mode électoral

Tribune libre


« N’a de convictions que celui qui n’a rien approfondi. » - Cioran

Le Plateau-Mont-Royal est un peu devenu mon terrain de jeu depuis que j’y travaille. J’y conduis un minibus non loin du parc Jarry. Entre deux quarts de travail, j’en profite pour visiter les lieux environnants. J’y observe les femmes courir en leggings de sport. Le bureau de police est juste à côté et nous partageons le même paysage qui se trémousse comme pour semoncer les regards. Nous sommes dans la circonscription de Laurier-Dorion du député Gerry Sklavounos, désormais célèbre pour avoir été dénoncé par Alice Paquet en raison de présumés abus sexuels. Comté qui appartenait autrefois à la jolie péquiste Elsie Lefebvre, la plus jeune députée nommée à l’Assemblée nationale, qui passa à la postérité de la politique québécoise pour s’être fait traiter de chienne à micro fermé par l’honorable Premier ministre libéral Jean Charest.
Plus au Sud, en empruntant le boulevard Saint-Laurent on voit les premières pancartes électorales. Au sud du boulevard nommé en l’honneur du plus célèbre intendant de la Nouvelle-France on aperçoit le marché Jean Talon, puis la Petite-Italie au sein de laquelle on peut apercevoir une petite église qui abrite la fraternité Saint Pie X, branche dissidente de l’Église qui n’a plus de reconnaissance canonique et dont la pratique demeure en opposition radicale à la doctrine imposée par Vatican II. La rue Saint-Denis n’est pas loin. Puis la rue Papineau. Ça ne prend pas la tête de ce dernier pour comprendre que les habitudes de vie n’ont rien à voir avec le reste du Québec. Les produits frais, pains, viandes froides, fromage, fruits et légumes, abondent dans les petites épiceries et restaurants pittoresques. Étrangement, l’accès à ses produits frais, moins commercial que dans les supermarchés, est plus facile qu’en région où pourtant ils sont cultivés et produits. Le prix de ces denrées est même parfois moindre dans les marchés de ce fabuleux Plateau. Monde fantastique où l’apparition d’une licorne chevauchée par une femme flambant nue n’aurait rien de surprenant.
Le comté de Gouin est pour l’instant vacant. Il avait été occupé par Françoise David et juste avant par André Boisclair, mais fait encore plus intéressant, il fut le siège, d’Yves « Robin des banques » Michaud… alors que ce dernier se présentait pour le parti libéral. Il y a donc fort probablement déjà eu de la justice sociale dans le programme du Parti libéral.
Incroyable !
Quand je vous disais qu’on pouvait voir apparaître, dans ce conté, une licorne chevauchée par une femme flambant nue sans que personne ne s’en étonne, en voilà l’exemple le plus fascinant.
Les pancartes des différents candidats politiques ont pris place sur les lampadaires. Pour moi, il n’y a que deux candidats. Un seul des deux est affiché. Celui de gauche évidemment. Pour ce qui est du candidat libéral, il n’est pas un candidat, il est un âne qu’on a livré en holocauste aux dieux du parti libéral pour faire rigoler les argentiers du parti. Je niaise à peine. Un militant communautariste qui défend la cause des lesbiennes, gaies, bisexuelles, transsexuelles, transgenres et queer et qui utilise sa couleur de peau pour se vendre, tout en militant au parti libéral…. Il sera bien remercié par les dieux rouges quand il atteindra le paradis des ânes libéraux qui ont livré leur âme toute crue à des gens qui n’en n’ont pas.
Deux candidats en entrevue
Il s’adonne que les deux vrais candidats je les ai eu tous les deux reçus en entrevue en tant que journaliste non officiel. Je précise – non officiel – puisque pour moi à la minute où on vous sait journaliste pour une publication grand public, le naturel des réponses diminue énormément.
Vous savez ce qu’on dit ? Les femmes et les enfants d’abord. Donc d’abord, ce cher GND.
Il se prénomme Gabriel Nadeau-Dubois. Je l’ai eu en entrevue à Trois-Pistoles dans le cadre de l’Échofête qui avait pris une tournure assez étrange. Victor-Lévy Beaulieu et le maire de Trois-Pistoles Jean-Pierre Rioux s’échangeaient des lettres de bêtises à travers le Devoir et La Presse en raison de la présence de Nadeau-Dubois. Raoul Duguay chanta un poème à Gabriel devant une foule assez dense. L’entrevue se déroula derrière la scène où les musiciens tels les Vulgaires-Machins, Grimskunk et autres troubadours allaient ensuite s’exécuter. Durant l’entrevue, ça grouillait de partout autour de nous. Les artistes se préparaient et festoyaient. Pépé et sa guitare en bedaine formaient à lui seul un décor assez spectaculaire.
Mais pas de quoi déconcentrer la vedette de cette après-midi là, je parle bien sûr de Gabriel. Au final, un type sympathique. Très propre de sa personne. Peut-être dort-il avec son veston et sa chemise au col savamment relevée ? Je ne saurais dire, mais tout porte à le croire. Jeune homme très talentueux qui connaît la cassette du « rebelle politique » par cœur, le tapis rouge de la politique lui ayant été déroulé pour une raison qui demeure incompréhensible, mais pour lequel seuls ceux qui sont nés avec une couronne sur la tête pourraient lui reprocher d’en avoir saisi l’opportunité. Toutefois, le succès médiatique a tellement été rapide et hors de son contrôle qu’en rebroussant le chemin du radicalisme, à la manière de son comparse des manifs étudiantes de 2012 Léo Bureau-Blouin1, il aurait déçu tous les naïfs petits radicaux et fils à papa qui le vénèrent et aurait ainsi perdu toute son influence, donc ses opportunités de carrière en public. Bref, on ne choisit pas toujours nos soutiens. La providence lui est pour l’instant un peu ingrate quand, par la connaissance de l’histoire, l’on connaît le sort réservé à ceux qui n’ont pas su refuser la couronne précocement accordée.
Pour ce qui est de sa pensée politique… comme il est l’objet d’un mouvement qui l’a surpassé, il ne peut que suivre la parade dans laquelle il est pris. Celle d’une gauche malthusienne, donc inefficace. Dans un vidéoclip ou dans une télésérie, une fille qui se dévêt à un trop jeune âge jette un malaise. Son innocence de petite fille perdue à jamais au profit d’un désir de séduire avant même d’en avoir appris les tenants et aboutissants de son marchandage bien dissimulé. Par contre, le même malaise est rarement exprimé pour un jeune homme qui se jette trop jeune dans l’arène politique. Pourtant, il s’agit de la même précocité de la perte d’innocence. Avant même que GND, nourrit par les expériences de vie, se soit formé une pensée politique bien construite, il était déjà politicien. La jeune fille prend déjà les aspects d’une prostituée, lui, d’un politicien.
Alexandre Cormier-Denis
L’autre vrai candidat est beaucoup moins connu de la presse grand public. Il s’agit pourtant d’une candidature fort intéressante. La première chose que je lui aie dite lorsque je l’ai rencontré: « Votre CV est vraiment étrange. »
Et pour moi-même : Qui diable étudie en Égypte et en Tunisie ? Les Égyptiens et les Tunisiens eux-mêmes ne veulent pas étudier là… Je vous jure… une licorne chevauchée par une femme flambant nue serait passée devant le bar où nous discutions que j’aurais été trop distrait pour me rendre compte qu’elle venait de passer.
On a parlé politique. Du chanoine Groulx. De l’histoire du Québec. Sa cohérence ne se démentait pas. Ne manquait plus qu’on parle de hockey autour d’une Laurentides pour égaler, en termes de réalisme, le spectacle d’une licorne chevauché par une femme flambant nue. Mais c’est là que j’ai réalisé ce qui ne fonctionnait pas avec Gabriel Nadeau Dubois : il est trop normal pour ce conté anormal. C’est comme présenter un Nigérien dans le comté du Nord-du-Québec avec pour seul votant les esquimaux. Dans Gouin, le parti qui arriverait à présenter une licorne chevauchée par une femme flambant nue gagnerait.
À défaut d’une licorne et d’une femme nue, le parti libéral présente monsieur Marleau… Le parti indépendantiste - le seul qui s’inscrit dans une logique québécoise à cette élection partielle puisque le Parti québécois n’aura pas de candidat - présente encore mieux qu’une licorne chevauchée par une femme flambant nue, il présente un Québécois… (fait rare) de surcroît un Québécois intelligent qui ose s’assumer comme politicien et afficher sa sympathie pour le souverainisme du Front national…
Attendez… Vous ne me croyez pas ?
Vous ne me croyez pas…
Je vous jure que je l’ai vu de mes yeux vu ! Ça existe pour vrai ! Je sais bien que c’est plus facile de vous convaincre que j’aie réellement vu une licorne chevauchée par une femme flambant nue, mais ce gars existe pour vrai !
Mathieu Plourde Turcotte


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1 commentaire

  • Lise Reid Répondre

    4 mai 2017

    Je sais de qui vous parlez et si j'avais le droit de vote dans cette circonscription de Gouin il aurait mon vote.