La politique française en rase-mottes

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Il ne s'agit pas uniquement d'un mal français

Café du Commerce ? Cour de récréation ? La vie politique française poursuit sa descente aux abîmes. Faute de résoudre les vrais problèmes, les politiciens s’envoient des pelures sur la place du marché électoral. Lorsqu’un député-maire critique un ministre, on pourrait s’attendre à un certain niveau d’analyse et de réflexion dans l’attaque argumentée et dans la défense construite. Non, le premier compare le second à un tract. Celui-ci stigmatise de façon outrancière l’indigence intellectuelle de son adversaire. Certes, ça ne volait pas haut.
L’argument faisant de madame Taubira un tract en faveur du FN révèle l’obsession des campagnes électorales. Le gouvernement fait le jeu du FN ? Peut-être, mais cette idée vient naturellement chez le politicien pour qui la politique n’est effectivement qu’un jeu. On pourrait espérer d’un élu en charge de l’avenir d’une ville importante et de l’élaboration des lois de son pays – ce qui fait déjà beaucoup – qu’il se passionne davantage pour ses projets municipaux et pour ses propositions législatives que pour l’agitation stérile des partis politiques. Au lieu de dénoncer de façon lapidaire le ministre de la Justice, il aurait été plus judicieux de démontrer la nocivité de sa politique pénale, systématiquement hostile à l’incarcération. L’ennui, c’est que l’UMP l’avait précédé sur le chemin.
Madame Taubira veut permettre d’éviter la prison pour les condamnations de moins de cinq ans. La dernière loi pénitentiaire de l’ancienne majorité, que je n’ai pas votée pour cette raison, avait entamé le processus pour les condamnés à deux ans. Certes, les parts d’idéologie et d’économie sur la gestion hôtelière des prisons ne sont pas les mêmes, mais les résultats en matière de sécurité vont dans le même sens : l’augmentation de l’insécurité et des violences.
La réponse du garde des Sceaux est tout aussi révélatrice. Elle est caractérisée non par une prise de hauteur dans la réflexion mais par un mépris et une haine indignes des fonctions qu’elle exerce. Au moins paraît-elle donner à la psychanalyse adlérienne, celle du complexe d’infériorité, l’occasion de se rappeler à nous.
Quelle dose massive de ressentiment a-t-on dû accumuler au cours de sa vie pour manifester à ce point le désir d’abaisser les autres ? Elle a voulu prendre son contradicteur de haut, mais en allant rejoindre le distributeur de tracts sur la place du marché, pour l’insulter à l’heure où les éboueurs ramassent les « déchets », selon le mot injurieux qu’elle a employé, elle est descendue manifestement plus bas que lui.
Cet incident dérisoire n’est inquiétant que sur un point. Le niveau du personnel politique français s’est effondré. La France enregistre des résultats calamiteux sur le plan économique. Sa croissance est aujourd’hui plus faible que celle de l’Espagne et elle ne doit un répit qu’au contexte qui s’est amélioré sans qu’elle y ait la moindre part. On attendrait des responsables politiques une détermination soutenue pour redresser le pays. Non, ils préfèrent, comme le Premier ministre et même le président de la République en donnent malheureusement l’exemple, participer aux joutes partisanes en vue des élections départementales. Pour ceux qui ont connu les hommes politiques qui entouraient le général de Gaulle, attachés au sens de l’État, non sans une discipline et une réserve dans les propos qu’on jugerait aujourd’hui excessives, le comportement des politiciens actuels leur rappelle un passage des Mémoires de guerre : « Édouard Herriot déclina mon offre de faire partie du gouvernement. Je lui demandai d’aider à la reconstruction de la France ; il me déclara qu’il se consacrerait à restaurer le parti radical. » On y est revenu !


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