Suite au défilé de l'OTAN et aux déclarations délirantes des officiels américains sur l'agression russe imaginaire dans le Donbass, et la nécessité pour la Russie de retirer des troupes qui n'ont jamais été là, tous attendaient de voir quelle forme cette déclaration de guerre allait prendre.
Comme je le craignais il y a un mois et demi en arrière, il semble que l'ébauche de la loi de réintégration du Donbass qui va être votée par la Rada, sera la version déclarant ouvertement la Russie comme étant le pays agresseur, et les territoires actuels des deux républiques populaires comme étant des territoires occupés. L'usage de la force militaire pour les récupérer serait alors justifiée par cette loi, qui permettrait aussi d'instaurer la loi martiale (permettant au passage de faire taire totalement toute dissidence, voire de liquider en toute légalité ceux qui rêvent de renverser Porochenko, comme Avakov, Tymochenko, ou Tourtchynov).
Pourquoi un tel revirement ? Parce que les néoconservateurs américains en ont assez du statut quo des accords de Minsk, ils sont en train de perdre la guerre en Syrie, leurs marionnettes de Daech se faisant exterminer par l'armée syrienne épaulée par l'aviation russe. Alors il leur faut allumer un autre brasier pour déclarer la guerre à la Russie par procuration. Ils ont besoin de cette guerre, sans laquelle le système américain tout entier va s'effondrer.
Et comme les armées des Républiques Populaires de Donetsk et de Lougansk (RPD et RPL) respectent le cessez-le-feu, les multiples provocations de l'armée ukrainienne durant l'été n'ont pas réussi à leur faire franchir la ligne rouge qui aurait permis à Kiev de justifier une future grande offensive.
Porochenko étant trop timoré, les néoconservateurs ont commencé à le mettre sur un siège éjectable en activant les groupuscules néo-nazis et la presse occidentale aux ordres, histoire de lui montrer que nul n'est indispensable en ce monde, et que s'il ne se décidait pas à être aussi radical que les groupuscules néo-nazis ukrainiens sus-mentionnés, ils allaient placer ces derniers au pouvoir.
Porochenko a parfaitement compris l'avertissement et n'a pas l'intention de finir comme son prédécesseur (Viktor Ianoukovytch), voire pire. Il va donc obéir, et mettre lui-même le feu aux poudres (et si ça foire, il sera désigné comme responsable, comme Saakachvili en Géorgie).
C'est la représentante du président à la Rada, Irina Loutsenko, qui a lâché le pavé dans la mare. D'après elle le projet de loi est prêt à 99,9 % pour être soumis au vote du parlement.
« Pour la première fois, la notion que la Russie est un état agresseur sera introduite au nouveau législatif », a-t-elle déclaré.
Mais l'Ukraine ne veut pas perdre les fonds du FMI dont elle a un besoin vital pour survivre. Or le règlement du FMI interdit de prêter à un pays en guerre. L'Ukraine va donc mentionner dans cette loi une référence à l'article 51 de la charte de l'ONU sur l'auto-défense. L'Ukraine ne serait donc pas en guerre, elle se défend simplement. Quand on dit que le diable se cache dans les détails. Le pire est que les autorités ukrainiennes ne cachent même pas pourquoi elles n'appellent pas un chat, un chat.
« Cela signifie que l'Ukraine a le droit de se défendre. Une fois de plus, ce n'est pas une guerre, mais de l'auto-défense. C'est pour que le Fonds Monétaire International nous donne des ressources, c'est pour les investisseurs, » a-t-elle ajouté.
Le plus magique dans l'histoire, c'est que la Russie fait partie du FMI, et se retrouverait donc à financer un pays qui l'a déclaré comme état agresseur. Kafka doit se retourner dans sa tombe. On marche complètement sur la tête avec ce projet de loi. Sans parler des immigrés ukrainiens vivant et travaillant en Russie qui vont se retrouver (ainsi que leur famille restée en Ukraine) dans une situation des plus compliquées, pour ne pas dire bizarre.
Cette loi, permettrait aussi à l'Ukraine de se défausser de sa responsabilité pour les crimes de guerre de son armée dans le Donbass, et de rejeter la faute sur l'état agresseur, comme l'a déclaré Rouslan Bortnik, le directeur de l'Institut Ukrainien d'Analyse et de Gestion Politique.
« Cette définition va bloquer la possibilité pour les résident du Donbass de lancer des poursuites judiciaires auprès de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), puisque cela permettra à l'Ukraine d'ignorer ces plaintes et de dire que sa souveraineté ne s'étend pas aux territoires occupés, » a-t-il expliqué.
En gros, « si les gens sont bombardés par notre armée, ce n'est pas de notre faute, c'est la faute des Russes ». Le cynisme à l'état pur. Pour lui, cette définition dans la loi ukrainienne pourrait aussi donner des arguments supplémentaires à Kiev dans son conflit judiciaire avec la Russie face à la Cour Internationale de Justice de l'ONU.
Pour le politologue ukrainien, Andreï Zolotarev, reconnaître la Russie comme étant l'état agresseur, reviendrait de fait à dénoncer unilatéralement les accords de Minsk. Kiev serait alors celle qui briserait les accords de Minsk tout en pouvant continuer à venir jouer les victimes et les pleureuses en hurlant à l'agression russe, en priant pour que la Russie intervienne pour de vrai, pour fignoler le tableau.
En plus de ne pas respecter la nouvelle trêve (33 violations du cessez-le-feu de lundi à mardi, et 84 obus tirés hier soir sur le territoire de la RPD), établie pour permettre à la rentrée scolaire de se faire dans le calme, l'Ukraine s'apprête à renforcer le blocus économique, cette fois avec la Russie. Les radicaux se sont en effet préparés à bloquer toute fourniture de charbon à l'Ukraine depuis la Russie. Quand les Ukrainiens souffriront du froid ou de coupures d'électricité cet hiver, la propagande de Kiev leur dira que c'est de la faute de la Russie.
Et les États-Unis rajoutent de l'huile sur le feu, en livrant des armements « défensifs » à l'Ukraine, dont certains sont déjà arrivés dans le Donbass. Mais au vu de la vitesse à laquelle l'Ukraine perd son armement, et son armée (entre désertions, morts hors combat, alcoolisme, et affrontements entre unités régulières et bataillons néo-nazis), les choses sont plutôt mal parties.
Sans compter que la Russie, avec Vladimir Poutine à sa tête, n'a pas l'intention de foncer dans le chiffon rouge qui lui est tendu par Kiev. Poutine sait quel rôle on veut lui faire jouer, et il ne le jouera pas. La Russie n'interviendra pas. Elle n'offrira pas ce prétexte à l'Ukraine, ni à l'OTAN de se servir de son intervention pour justifier une guerre de l'Europe contre la Russie. La RPD et la RPL étant parfaitement capables de se défendre contre l'armée ukrainienne, la Russie va laisser cette dernière se casser les dents définitivement contre les milices populaires lors d'un ultime chaudron « made in Donbass ». Et cette fois il n'y aura pas de Minsk III.
L'Ukraine pourra hurler par après que si elle a été battue c'est parce que la Russie est intervenue, et que si le pays s'effondre c'est parce qu'il a été vaincu par la Russie, légalement, sur le plan international, sans preuves solides, cela ne vaudra rien.
Ce plan américano-ukrainien sent tellement le sapin, que certains au sein de l'UE semblent d'un seul coup se réveiller, comme si ils comprenaient qu'il est temps de prendre ses distances avec le bourbier ukrainien. Le parlement européen a été le premier à ouvrir le bal, en déclarant vouloir s'attaquer au problème de la prolifération du néo-nazisme en Ukraine (sic) !!!
Il y a quelques propagandistes (pardon « journalistes ») français qui doivent avoir frôlé la crise cardiaque en lisant cette annonce. Eux qui nous avaient juré, la main sur le cœur, qu'il n'y avait pas de néo-nazis au pouvoir en Ukraine après le Maïdan, voilà que le parlement européen met les pieds dans le plat, parlant ouvertement de la glorification des collaborateurs des Nazis, des changements de noms de rues, des marches aux flambeaux, et des symboles nazis d'un certain nombre de bataillons ukrainiens. Oups.
Le second à être redescendu sur terre c'est Jean-Claude Juncker (peut-être a-t-il enfin décidé d'arrêter l'alcool), en déclarant que « l'Ukraine n'a rien à voir ni avec l'Union européenne, ni avec l'OTAN » (sic bis). Puis en ajoutant que « 60 guerres se déroulent actuellement, aucune d'entre elles n'a lieu sur le territoire européen, si on ne compte pas l'Ukraine ». En clair : si l'Ukraine veut faire la guerre à la Russie, ça sera sans nous !
Encore pire, au lieu de dire cela en privé à Porochenko, Jean-Claude Juncker lui a fait savoir sa position directement en public à la presse. Un véritable camouflet pour le président ukrainien.
Et histoire d'enfoncer le clou, Jean-Claude Juncker s'est aussi fendu d'une déclaration sur la nécessité pour l'UE de collaborer avec la Russie pour assurer sa sécurité :
« La surface des pays appartenant à l'UE est de 5,5 millions de kilomètres carrés. Le territoire russe en couvre 17,5 millions. Y a-t-il d'autres questions? », a-t-il déclaré. « Il est nécessaire de trouver un moyen de dialoguer avec la Russie au sujet de notre avenir commun ».
La prise de conscience va très loin, puisqu'il a poursuivi sur le rôle déclinant de l'UE à l'échelle internationale, et la nécessité de cesser d'agir en maîtres du monde :
« L'histoire évolue très rapidement, et parfois plus vite que nous ne la comprenons. Nous nous sentons et nous agissons comme des maîtres du monde, alors que nous devrions agir dès aujourd'hui de manière plus modeste », a ainsi souligné le président de la Commission européenne.
L'Ukraine et son patron, les États-Unis, vacillent de plus en plus, et cette instabilité systémique ne peut que déboucher sur la guerre ou l'effondrement (ce dernier pouvant d'ailleurs suivre la première option). Et si certains va-t-en guerre sont prêt à entraîner l'UE et l'OTAN dans leur sillage, d'autres semblent beaucoup moins prêts à se sacrifier au nom des intérêts américains.
Il faut s'attendre dans les semaines qui viennent à des attaques sous faux-drapeau après le vote de cette nouvelle loi à la Rada, afin que Kiev justifie la future offensive contre la RPD et la RPL au nom du soi-disant droit à l'auto-défense de l'Ukraine, qui n'est qu'un permis de génocider sa propre population sous couvert d'agression russe et d'occupation imaginaire.
Il est temps pour les instances internationales de se réveiller, et de mettre le holà à cette folie, avant qu'il ne soit trop tard.
Christelle Néant
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