L'heure a sonné

Le PQ tient-il vraiment à sa base militante ?

Tribune libre

« Il est proposé que le Parti Québécois défende le gel des droits de scolarité ou toute autre position permettant de diminuer l’endettement étudiant et de maintenir l’accès aux études supérieures. »

Tel était le libellé de la proposition qui a été adoptée cet après-midi par une large majorité des délégués présents au Conseil national du Parti Québécois, qui se tenait toute la fin de semaine à Drummondville. Cette proposition, dont les grandes lignes avaient été coulées au quotidien Le Soleil vendredi dernier, émanait du Comité national des jeunes (CNJPQ) et avait été finalement adoptée par cette même instance vendredi soir. Le libellé original était cependant légèrement différent. Un petit détail qui fait toute la nuance, en fait. Je parle bien entendu du « OU », qui laisse place à une grande gamme d’interprétations, je l’accorde. Au départ, c’était un « ET ». Mais il semblerait que la pression était forte pour remplacer ces deux petites lettres, loin d’être insignifiantes…
Bien sûr, les jeunes du PQ connaissent le sens réel qu’ils confèrent à leur proposition. C’est-à-dire, le gel des droits de scolarité dans une perspective de gratuité scolaire, ce que signifiait dans les faits « toute autre position permettant de diminuer l’endettement étudiant et de maintenir l’accès aux études supérieures ». Les hautes instances du parti, bien qu’elles aient voulu diluer le message, le comprennent également très bien. Et c’est là que réside la clé.
Le vote sur cette proposition a en effet été le clou du spectacle de ce Conseil national. Les jeunes se présentant tout d’un bloc au micro qui entendait les opinions « POUR », la poignée de gens (pas plus de 5) qui s’est alors présentée au micro des « CONTRE » avait bien peu de poids vis-à-vis des dizaines qui se trouvaient de l’autre côté de la salle. L’un d’eux est même allé jusqu’à proposer un amendement qui aurait rayé « le gel des droits de scolarité » de la proposition. À ce moment, la file entière des « POUR » s’est mutée derrière le micro des « CONTRE ». Ce mouvement de masse était bien beau à voir et l’amendement fut rejeté en un rien de temps. C’est dire que les militants délégués du Parti Québécois, ainsi que la plupart de ses élus (i.e. tous ceux qui avaient le droit de vote cette fin de semaine), tiennent au gel des droits de scolarité. La proposition dans son entièreté fut donc par la suite facilement adoptée, la Première ministre ayant même voté en sa faveur.
Que penser maintenant de sa déclaration, faite quelques minutes plus tard en entrevue, où elle affirme qu’une indexation est égale à un gel ? Je dois avouer qu’encore une fois, c’était une affirmation bien maladroite. Il y a quelque chose qui me dépasse au Parti Québécois: les communications. Je me demande parfois comment elles peuvent être aussi incompétentes et laisser les ministres ainsi que la PM dire n’importe quoi n’importe quand. Il me semble qu’il n’y a nul besoin d’être un grand stratège politique pour imaginer que si le PQ choisit finalement l’indexation des droits de scolarité à l’issue du Sommet sur l’enseignement supérieur qui se tiendra à la fin du mois, il peut mettre une croix sur la quasi-totalité de son vote jeunes. Tenons-le nous pour dit, quelle motivation aura l’aile jeunesse à continuer de militer pour un parti qui ne le prend pas en considération, surtout quand un nouveau parti comme Option nationale attire un nombre de plus en plus important d’entre eux ? Bref, je crois que cela risque d’être un suicide politique et c’est pourquoi je crois, ou ose espérer, que pour une fois, les stratèges du parti la verront venir.
Car c’est bien beau, se ranger derrière un parti pour l’indépendance, comme je le fais. Pour les idées aussi, de façon globale et avec les compromis qu’une coalition au centre implique, bien entendu. Par contre, il y a des limites que je ne pourrai pas tolérer et je ne pense pas me tromper en affirmant que je ne suis pas la seule, loin de là. Cette vision marchande de l’éducation, dont toute hausse est la continuité logique (qu’elle soit de 3 ou de 82%), est tout simplement inacceptable. J’ai participé activement à la lutte étudiante du printemps dernier et je ne veux surtout pas que tout cela ait été fait en vain. Que l’énergie et l’espoir de tous ces jeunes québécois soient relégués aux oubliettes. Je militerai pour l’indépendance sans allégeance politique au niveau provincial s’il le faut.
En espérant que les stratèges soient à l’oeuvre avant qu’il ne soit trop tard. C’est l’heure de voir si le PQ tient réellement à sa base militante.
_


Laissez un commentaire



5 commentaires

  • Yves Rancourt Répondre

    11 février 2013

    Madame Fournier,
    Tout comme vous, j'ai porté le carré rouge dans les manifestations et ai appuyé fortement la cause étudiante. Mais, contrairement à vous, je trouve tout à fait raisonnable cette idée d'augmenter les droits de scolarité au rythme du coût de la vie, soit de 2 à 3%. Il s'agirait là d'un gain énorme pour les étudiants, sachant que le gouvernement précédent voulait les augmenter d'environ 80%. On ne réalise pas à l'évidence dans certains milieux que les finances publiques sont dans un état précaire et que le gouvernement doit faire des contorsions budgétaires énormes, à l'encontre souvent de l'opinion publique et de l'opposition à l'Assemblée nationale, pour permettre ce compromis plus que raisonnable.
    Alors, si vous voulez retirer votre appui à ce gouvernement qui a pris d'énormes risques politiques en supportant la cause étudiante( ça explique pourquoi il est minoritaire), libre à vous mais, de mon humble point de vue, vous faites une très mauvaise lecture de la situation, et c'est aussi désespérant pour la cause de l'indépendance nationale qui a besoin plus que jamais de faire unité. Et, soit dit en terminant, je suis bien à l'aise de vous exprimer mon point de vue à ce sujet, n'étant pas membre de ce parti et ne leur devant rien.
    Mes salutations.

  • Stéphane Sauvé Répondre

    11 février 2013

    Vous écrivez: " Il y a quelque chose qui me dépasse au Parti Québécois : les communications. "
    Or justement, il est d'une évidence ronflante que l'un des principaux problèmes au PQ depuis Boisclerc, est son manque d'efficacité communicationnelle. Et comment pourrait-il en être autrement, alors que nous avons maintenant au PQ des politiciens professionnels qui commmu-niquent que dans une perspective d'obtenir et garder le pouvoir, et non dans celle de FAIRE l'INDÉPENDANCE.
    Il y a un dicton qui dit, « Si tu n'es pas honnête par conviction, sois-le par intérêt. " Or, c'est bien cela le problème, il n'y a pas de conviction au PQ, et le seul intérêt est celui du pouvoir. Et quand tu cherches le pouvoir pour le pouvoir, tôt ou tard, tu disparais.
    Je place ici un commentaire de Francois Ricard à l'article de Patrick Diotte (http://www.vigile.net/L-attitude-du-PQ-et-un-des). Ce commentaire pointe vers le principal problème du PQ: Un manque de conviction.
    "René Lévesque, juste avant sa mort, a reconnu que Parizeau avait raison. C’est à ce moment-là seulement qu’il est devenu indépendantiste. Avant il ne l’était pas.
    La population a voulu de René Lévesque et n’a pas voulu de Pierre Bourgault. Mais René Lévesque et le PQ d’alors ont tout fait pour que la population rejette Pierre Bourgault.
    Nous avons quelqu’un qui pourrait remplacer René Lévesque, indépendantiste, et Jacques Parizeau : Jean-Martin Aussant.
    Un Jean-Martin Aussant que Mme Marois et le PQ, comme pour Bourgault déjà, essaient de jeter hors scène.
    Un débat des chefs où Mme Marois a insisté pour que JM Aussant soit absent.
    Un sommet sur l’éducation, un sommet tronqué puisque l’on ne veut même pas débattre de la gratuité scolaire, où le PQ a refusé un siège à JM Aussant.
    L’attitude du PQ est en cohérence avec la volonté provinciale de sa direction, une province distincte bien sûr mais une province.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 février 2013

    Monsieur Votre question est fausse! À vous entendre Mde Marois se comporterait commme un Jen Charest ou un Duplessis..
    La pensée ça n'appartient à personne. Le jour où vous vous poserez la question : Qu'est-ce que la Souveraineté au lieu de êtes-vous en faveur de la Souveraineté ?
    Vous découvrirez tout comme moi Que la Liberté commence le jour où tu penses sans demander aux autres....?
    J'ai réussi et j'ai souvent des surprises à écouter les gens qui essaient de faire aujourd'hui ce qui doit être fait demain.....

  • Archives de Vigile Répondre

    11 février 2013

    ...si vous voulez partir, et bien partez ...parce que l'heure est au Pays ,l' heure est ...à se mettre un toit sur la tête...pas à mettre les meubles en dedans...mais on va y venir...pas longtemps après .

  • Archives de Vigile Répondre

    11 février 2013

    « Il est proposé que le Parti Québécois défende le gel des droits de scolarité ou toute autre position permettant de diminuer l’endettement étudiant et de maintenir l’accès aux études supérieures. »
    Le PQ se fout pas mal des ses membres, c'est une vrai farce.
    Le problème avec cette proposition c'est que pour les néo-libéraux, la hausse des frais de scolarité n'a aucune influence sur accessibilité, la droite nous a cassé les oreilles avec cette fausseté pendant tout le printemps érable.
    Ensuite, la Pauline Marois pour diluer encore plus cette proposition, vient nous dire que l'indexation est en fait un gel des frais de scolarité, ce qui laisse sous-entendre qu'il vont garder le cap sur l'indexation. Alors, peut importe qu'il y est un "ou" ou un "et" dans la proposition, le PQ va continuer de l'avant et faire à sa tête.