Gouverner au gré du vent

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Cap sur nulle part






Est-ce parce que les deux mots se ressemblent ?




Toujours est-il que j’ai toujours vu un lien entre «gouverner» et «gouvernail».




On gouverne un État com­me on pilote un navire dans une tempête. La nature a beau se déchaîner, il faut garder le cap coûte que coûte.




Ne jamais quitter la destination du regard quoi qu’il advienne.




«Le pilote ne te promet point une heureuse traversée: il te promet ses utiles services, son habileté à conduire un vaisseau», comme l’écrivait Sénèque, le philosophe préféré de Lucien Bouchard.




La démocratie de l’informe




Malheureusement, plus ça va, plus j’ai l’impression que nos élus gouvernent comme un bouchon en liège sur la mer.




Ils flottent au gré du courant.




Ce ne sont plus eux qui dirigent: c’est la marée, les vents, les flots.




Le gouvernement ne fend plus courageusement les vagues tel un paquebot puissant, il se contente de suivre paresseusement les mouvements de la société.




Il n’agit plus: il réagit.




Le sociologue français Jean-Pierre Le Goff appelle ça «la démocratie de l’informe».






Le gouvernement dirige au gré des sondages et de l’actualité.










«La façon dont on prépare et multiplie les lois, dont on avance et on recule au gré des pressions des uns et des autres, pour aboutir à des synthèses alambiquées qui finissent par mécontenter tout le monde constitue une sorte de modèle-type d’une gouvernance postmoderne qui navigue à courte vue au gré des évolutions, des événements et des groupes de pression, a-t-il expliqué au Figaro, vendredi dernier.




«La concertation, la démocratie participative, la recherche d’un compromis acceptable ont bon dos pour masquer l’absence de tout projet clair et cohérent.»




La doctrine des Rolling Stones




Regardez le gouvernement actuel.




Vous voyez un plan d’ensemble, vous? Une idée unificatrice, un projet, un programme?




Moi non plus. Je ne vois qu’un gouvernement qui dirige au gré du vent, des sondages et de l’actualité.




Un peu d’écologie parce que c’est la mode, un réinvestissement timide dans l’éducation pour calmer la grogne populaire, un éventuel projet de loi sur Uber parce que l’industrie du taxi l’exige, un léger recul sur les frais de garderie pour plaire aux familles, etc.




Ça va dans tous les sens.




C’est à se demander s’il y a un capitaine à bord.




On remettrait les commandes de la province à une firme de sondages qu’on obtiendrait les mêmes résultats.




Et comme Jean-Pierre Le Goff le dit si bien, pour cacher leur incapacité à gouverner, nos élus disent qu’ils «écoutent le peuple».




«On vous donne ce que vous voulez.»




Mais est-ce le rôle d’un gouvernement?




Comme le chantent les Rolling Stones: «You can’t always get what you want / But if you try sometimes, well you might find you get what you need.»




Parfois, il vaut mieux avoir ce dont on a besoin qu’obtenir ce qu’on veut...




La fin des grands voiliers




Les gouvernements ne veulent plus nous amener nulle part. Ils se contentent de garder le bateau à flot, point.




Il ne coule pas? C’est qu’on a fait notre boulot. Le reste...




On a remplacé les grands voiliers majestueux par des petits canots.




Après ça, on se demande pourquoi la politique n’excite plus personne.



 




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