Économie - Qui dit vrai?

Crise du capitalisme mondial



Le premier affirme que le Canada est en bonne posture et qu'il faut maintenir le cap sur l'atteinte du déficit nul une année plus tôt que prévu, soit en 2014-2015; le deuxième soutient qu'il faut être prêt à intervenir à tout moment puisque l'économie mondiale évolue plus négativement que prévu. Le premier, optimiste, est ministre des Finances; le second, réaliste, est gouverneur de la banque centrale.
À la demande des partis d'opposition qui n'ont pourtant pas su profiter de l'occasion pour faire valoir leur point de vue, le ministre des Finances, Jim Flaherty, et le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, témoignaient hier devant le Comité des finances des Communes. Tout en faisant bien attention de ne pas contredire son patron, le gouverneur Carney s'est tout de même montré à la fois plus réaliste, en dressant un portrait peu reluisant des perspectives économiques, et plus souple, en se disant prêt à intervenir rapidement en cas d'aggravation de la crise.
De son côté, le ministre Flaherty a maintenu la ligne du gouvernement, qui considère que la réduction du déficit est le seul objectif qui mérite toute l'attention des Canadiens. Selon M. Flaherty, c'est parce que les États-Unis et l'Europe sont trop endettés que les marchés financiers ont perdu confiance dans la gestion des gouvernements.
Si l'affirmation contient une part de vérité incontestable, elle est loin d'expliquer la crise qui secoue les marchés depuis plusieurs semaines. Ce que craignent ceux qu'on appelle «les investisseurs», c'est d'abord que la récession revienne hanter l'économie réelle. À commencer par les entreprises, dont les ventes et les profits seraient touchés, puis les gouvernements, qui verraient leurs revenus fondre à nouveau, avant même de s'être rétablis de la dernière récession.
Quand le ministre Flaherty invite les gouvernements européens et américain à mettre de l'ordre dans leurs finances, il oublie d'ajouter que c'est un peu, voire beaucoup, grâce aux dépenses extraordinaires de ces gouvernements si la demande pour les ressources naturelles du Canada n'a pas chuté de façon dramatique depuis 2008.
Bien sûr, le gouvernement fédéral a aussi apporté sa contribution sous la pression des partis d'opposition majoritaires. Mais comment réagira un gouvernement majoritaire si la situation mondiale se détériore? Adoptera-t-il un nouveau programme de relance ou maintiendra-t-il son objectif de devancer d'une année l'atteinte du déficit zéro, avec ce que cela exigerait de compressions additionnelles aux quatre milliards déjà prévus?
Tous les gouvernements des pays développés subissent les contrecoups de la faible croissance économique. En demandant à des pays frappés par des taux de chômage catastrophiques de réduire rapidement leurs dépenses, comme le suggère M. Flaherty, le monde entier risque de sombrer dans une récession pire que la précédente, doublée d'une crise sociale.
Quoi qu'en dise notre ministre conservateur, le moment est donc mal choisi. Mieux vaudrait pour lui, et pour nous, qu'il se demande, dès maintenant, comment son gouvernement contribuera à soutenir la croissance et l'emploi si d'aventure nous devions subir les contrecoups d'une chute de la demande mondiale pour les ressources. Car cette fois, contrairement à 2008, les consommateurs canadiens, qui sont aussi endettés que leurs voisins américains, ne seront pas au rendez-vous.


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