La campagne électorale montre des chefs de parti prêts à tout pour gagner des votes. Tous conviennent que les systèmes de santé et d’éducation sont déficients, mais ce sont des sujets complexes, surtout parce qu’on ne veut pas y investir d’argent, et peu propices à la compétition. Il faut se démarquer autrement, avec des bonbons pour tout le monde, et une improvisation propice au gaspillage.
Dans la valse des milliards de dollars, une grande part est constituée de dépenses en infrastructures. Ces dépenses sont facilement acceptées par les milieux d’affaires parce qu’elles génèrent de l’activité et des profits pour l’industrie de la construction et tous les secteurs d’activités connexes. Elles sont aussi plus faciles à vendre politiquement que les dépenses courantes pour les services publics. En effet, ces dernières sont l’objet de débats publics parce qu’elles doivent être équilibrées avec les revenus et qu’elles s’accordent avec les hausses d’impôts. Au contraire, les règles comptables permettent d’envoyer directement et silencieusement les dépenses en immobilisations directement à la dette. Ainsi l’augmentation de la dette qui résulterait uniquement des promesses de chacun des grands partis dans la présente campagne électorale dépasse largement les quelques 16 milliards de dollars déjà versés au fil des ans au Fond des générations, et qui ont été prélevés à même les budgets disponibles pour la santé et l’éducation. De plus, au cours des cinq prochaines années la dette nette augmentera beaucoup plus que la valeur du Fond des générations.
Malgré les sommes impressionnantes promises en nouvelles dépenses et en baisses d’impôt, le ratio de la dette au PIB diminuerait, ou augmenterait légèrement pour Québec solidaire, au cours des prochaines années selon les cadres financiers présentés par les partis. À environ 40%, ce ratio est tout à fait raisonnable et il n’y a aucune raison de priver la population de services publics essentiels pour faire des versements au Fond des générations. Ce qui compte pour les générations futures, c’est une gestion rigoureuse des dépenses publiques et l’argent emprunté pour déposer au Fond de générations n’est que de la poudre aux yeux.
Le Québec est aujourd’hui beaucoup plus prospère qu’il y a quarante ans, la richesse par habitant y est beaucoup plus élevée, et malgré le vieillissement de la population on pourrait facilement se payer des services publics de grande qualité. Malheureusement, avec le temps, ce sont les ressorts de la politique qui ont évolué. Progressivement, à la suite de la Révolution tranquille, les acteurs politiques ont changé, les représentants des élites traditionnelles ont repris leur place, et la priorité est devenue la baisse des impôts grâce à une réduction des dépenses en services publics, appuyée par une privatisation de services. La notion que les mieux nantis devraient payer une part importante des impôts pour assurer des services publics de qualité à toute la population a été remise en question et le modèle américain, générateur d’inégalités de classe, de pauvreté extrême et de criminalité, s’est imposé subtilement parmi les élites québécoises.
Au milieu des années quatre-vingt-dix, le programme de départ à la retraite de milliers d’employés des services publics implanté par le Premier ministre Lucien Bouchard pour atteindre le déficit zéro a été un moment critique du revirement des priorités. Non seulement les réseaux publics ont-ils été privés de leurs ressources humaines les plus expérimentées mais le signal a été donné, aussi par la précarisation des emplois, la détérioration des conditions de travail et la glorification du privé, qu’une carrière dans les services public n’était plus valorisante.
Par ailleurs, la pression sur les services publics vient en bonne partie de l’immigration massive des vingt dernières années, orchestrée par les milieux d’affaires. On fait valoir le manque de main-d’œuvre mais pour chaque travailleur qui arrive, il y a une famille à prendre en charge. Les partis au pouvoir subventionnent à coup de milliards d’argent public la croissance des entreprises ce qui implique, dans notre contexte démographique, que les entreprises exigent un nombre toujours plus élevé d’immigrants. Le Canada a choisi une croissance économique qui mise sur une forte croissance de la population, un doublement sur quelques décennies, ce qui n’assure en rien un enrichissement et un plus grand bien-être pour les Canadiens. Au Québec, une telle politique implique la minorisation des Québécois francophones et leur assimilation rapide au Canada anglo-saxon.
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