Manifestations et forces policières

Carré rouge sur fond noir

COBP (Comité Opposé à la Brutalité Policière)

Texte publié également dans Cyberpresse du samedi 17 mars 2012 sous le titre "Un État policier".
Avant-hier, j'ai constaté que nous vivons dans un État policier.
J'ai constaté que l'expression de mes idées politiques était réprimée par des grenades. J'ai encore la vision de l'explosion à quelques mètres de mon visage, j'ai encore les oreilles qui résonnent.
J'ai fait l'expérience de la répression gratuite et arbitraire. Non, ce n'est pas vrai, ce n'était pas vraiment arbitraire. C'est parce que nous défendions des idées politiques critiques que nous avons eu droit à l'anti-émeute et à des explosifs.
La manifestation se déroulait dans un calme incroyable, de la manière la plus pacifique qui soit. Nous étions à la queue de la manifestation, des policiers nous suivaient pas trop loin derrière. Nous marchions tranquillement sur Sherbrooke.
Environ à l'angle de Hutchison, les policiers ont commencé à charger. Nous n'avons jamais été avertis de quoi que ce soit. Jamais les policiers, qui étaient pourtant très présents et commençaient à nous encercler, ne nous ont avertis que la manifestation était devenue «illégale» ou que nous devions nous disperser. Il n'y avait pas de casse, pas de violence, il n'y avait même pas de slogans anti-policiers pour «excuser» leur charge. Rien du tout, on ne faisait que marcher.
Pourquoi charger?
Les policiers ont chargé sans nous rentrer dedans. Pas encore. C'était de l'intimidation, tout simplement. Quand ils ont chargé, plusieurs manifestants ont commencé à courir, paniqués. Les policiers avaient atteint leur but: déranger une simple marche qui se déroulait dans le calme. Et faire peur, car oui, ça faisait peur. Entendre et voir des dizaines de policiers habillés en armure courir derrière soi, ça fait peur. On ne sait pas ce qu'ils vont faire. On se dit qu'on n'a rien fait, qu'il n'y a pas eu de «grabuge», alors pourquoi chargeraient-ils? Pourquoi frapperaient-ils? Mais ils approchent et ils font du bruit, alors on panique et on court.
Puis nous nous sommes ressaisis et nous avons recommencé à marcher calmement. Peu de temps après, BOUM! Une grenade assourdissante explose à quelques mètres devant moi, environ un pied au-dessus de ma tête, c'est-à-dire à 7 pieds du sol. Je dois dire que c'est la première fois que je voyais une explosion d'aussi près. Le son de la déflagration résonne encore dans mes oreilles.
La panique gagne plusieurs manifestants, qui recommencent à courir. BOUM! Une autre grenade explose pas très loin. À ce moment, l'anti-émeute charge pour vrai et un manifestant se fait engloutir par les policiers. La grenade atteint son but: séparer la manifestation. Je fais partie du lot qui se fait séparer. Nous marchons sur Aylmer, car les policiers nous empêchent de rejoindre la manifestation sur Sherbrooke. Ils utilisent des arguments convaincants: BOUM! Une autre grenade explose derrière nous.
Ma copine et moi décidons alors que c'est terminé pour nous. Nous parvenons à nous éloigner de la manifestation et des policiers. C'est terminé pour nous, mais seulement pour aujourd'hui. Car une telle violence gratuite nous révolte. La répression policière basée sur le profilage politique, c'est digne d'un État policier.
Nous sommes en colère.
Et nous imaginons bien comment peuvent être en colère ceux qui reçoivent des coups et se font arrêter parce qu'ils manifestent (bref, ceux qui sont moins chanceux que nous). Sans compter ceux qui se font blesser gravement. Et nous imaginons bien comment ceux qui sont victimes à chaque jour de la répression policière doivent être encore plus en colère. Nous comprenons pourquoi nombreux sont ceux qui haïssent la police, pourquoi il y a un sentiment de révolte dans l'air.
Nous retournerons aux manifestations. Ils ne nous auront pas comme ça. Pas avec la peur. S'il faut lutter pour la démocratie, alors nous lutterons.
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Gabriel Boisclair - Bachelier en sciences politiques et philosophie et étudiant en acupuncture au collège de Rosemont


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