Alain Soral, Dieudonné et l'antisémitisme primitif

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Antisémitisme ou antisionisme ou les deux?

Peut-être avez-vous vu déjà entendu parler de ce personnage franco-suisse qu'est Alain Soral et qui s'emploie quotidiennement à répandre sur la toile toutes sortes de propos polémiques. Compagnon de route d'un autre personnage assez controversé - Dieudonné - Alain Soral s'est vu banni de plusieurs tribunes médiatiques en France et il est soupçonné par plusieurs d'alimenter sournoisement un antisémitisme des plus primitifs. Qu'en est-il vraiment?
Il va sans dire que Soral, Dieudonné et leurs partisans entretiennent une forme de double discours dont on peut néanmoins en décoder aisément les véritables lignes directrices. Malgré ses airs songés et la prétendue «conscience sociale» de ses adeptes, le discours «soralien» est tout orienté en fonction d'un nouvel antisémitisme que l'on prend bien soin de camoufler derrière le concept d'antisionisme. Derrière cette haine obsessionnelle de l'État juif, n'est jamais très loin ce véritable mépris pour le peuple qu'il abrite.
Je n'aurais pas pensé écrire un papier sur l'idéologie véhiculée par Dieudonné et Alain Soral, mais c'est leur popularité grandissante - même ici au Québec - qui m'en aura convaincu. Si j'ai récemment vu, encore une fois, différentes «entrevues maison» d'Alain Soral diffusées sur les réseaux sociaux, c'est surtout la récente controverse française entourant la «quenelle» qui m'aura convaincu d'aborder brièvement le sujet.
La quenelle représente un geste de plus en plus populaire en France, geste qui évoque pour plusieurs une véritable prise de position antisémite. Dieudonné définit cette forme de salut nazi inversé comme un «geste de contestation vis-à-vis du système», mais les situations compromettantes où Alain Soral et Dieudonné ont témoigné de leurs convictions antijuives sont devenues trop nombreuses pour que l'on puisse leur accorder le bénéfice du doute.
Par exemple, en juillet dernier, Soral se rendait sur le site du Mémorial de la Shoah, à Berlin, pour se faire photographier avec le bras droit tendu et la main gauche pointant vers l'épaule. Quant à Dieudonné, la chanson qu'il aime entonner avec son public lors de ses spectacles, Shoananas - en référence au génocide nazi évidemment - ne serait pas dépourvue de toute inspiration haineuse si elle n'est pas tout simplement de très, très mauvais goût.
En vérité, dans l'univers de ce nouveau courant idéologique, ce système que l'on cherche à abattre renvoie directement à un monde dont les moindres facettes seraient totalement administrées, dirigées et contrôlées par une poignée de Juifs malveillants. Jean-Yves Camus, un spécialiste de l'extrême-droite européenne, définit les partisans de Dieudonné comme «une mouvance transversale, antisystème et complotiste, dont l'antisémitisme reste la colonne vertébrale.»
Autrement dit, les partisans d'Alain Soral et de Dieudonné - qu'on ne pourrait toutefois pas réduire à un seul et même groupe - carburent aux théories de la conspiration qui semblent redevenir de plus en plus populaires partout en Occident. Soral et Dieudonné offrent au public une grille de lecture de la réalité simplifiée à l'extrême: les Juifs, épaulés par l'État américain, gouverneraient le monde. Le sort de l'Humanité dépendrait en entier des volontés de quelques personnages machiavéliques, capitalistes et surtout sionistes.
Évidemment, la prolifération de ces clichés n'est pas sans rappeler les vieux pamphlets antisémites publiés aux XIXe et XXe siècles. C'est en 1901 qu'était publié Les Protocoles des Sages de Sion, ce célèbre livre judéophobe commandité par les autorités russes, dont l'objectif était d'alimenter artificiellement des rumeurs entourant un plan juif de domination mondiale. Aujourd'hui, c'est un peu ce fantasme idéologique qui est au cœur du «phénomène soralien».
Alain Soral et Dieudonné sont donc à l'avant-garde d'une nouvelle extrême-droite française, n'en déplaise à leurs partisans dont plusieurs se prétendent «progressistes». Ne soyons pas dupes: le négationnisme coule dans les veines de ces deux personnalités comme la sève coule dans les arbres au printemps. Il faudra d'urgence veiller à ce que leur discours n'imprègne pas davantage les idées de la jeunesse, sans pour autant mettre en péril la liberté d'expression.


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