Affaire Skripal: rien ne va plus entre Moscou et Londres

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Poutine comparé à Hitler

Moscou « a honte », Londres fait référence à l’Allemagne nazie : la Russie et le Royaume-Uni sont passés aux invectives sévères mercredi après l’empoisonnement de l’ex-espion russe Sergueï Skripal en Angleterre, à l’origine d’un regain de tensions Est-Ouest.


Point d’orgue d’une journée marquant une nouvelle étape dans la guerre des mots à laquelle se livrent les deux pays, le chef de la diplomatie britannique, Boris Johnson, a trouvé « juste » de comparer la Coupe du monde de soccer en Russie avec les Jeux olympiques de Berlin en 1936 sous Hitler.


« Franchement, c’est à vomir de penser à Poutine en train de se glorifier lors de cet événement sportif », a-t-il ajouté en réponse à un parlementaire qui estimait que le président russe, Vladimir Poutine, allait utiliser la Coupe du monde « comme Hitler a utilisé les Jeux olympiques de 1936 ».


« De tels parallèles […] sont inadmissibles et indignes d’un chef de la diplomatie d’un État européen », a aussitôt déclaré la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, sur Facebook.


L’empoisonnement de Sergueï Skripal a ravivé le climat d’affrontement Est-Ouest, latent depuis l’annexion de la Crimée par Moscou en mars 2014, et a exacerbé les tensions entre Moscou et Londres, dont les relations étaient déjà glaciales.


Londres a expulsé 23 diplomates russes du territoire britannique et annoncé le gel des relations bilatérales. La Russie, qui clame son innocence dans l’affaire Skripal, a rétorqué en expulsant à son tour 23 diplomates britanniques et en mettant fin aux activités du British Council dans le pays. La première ministre britannique, Theresa May, a dit « réfléchir activement » à d’autres mesures de rétorsion contre Moscou, selon son porte-parole.


Mais Moscou nie toute responsabilité, dément même l’existence d’un programme d’armes neurotoxiques du nom de « Novitchok » en URSS ou en Russie, qui aurait été utilisé contre Skripal et sa fille, et affirme que Londres refuse de lui fournir des informations sur le sujet.


À Moscou, tous les ambassadeurs étaient invités mercredi au ministère des Affaires étrangères pour écouter la position russe dans cette affaire.


Lors d’une longue démonstration, snobée notamment par les ambassadeurs britannique, français et américain, un responsable du ministère des Affaires étrangères russe, Vladimir Ermakov, a dénoncé les « incohérences » de la version britannique. Interpellé par une diplomate britannique sur ses éventuels programmes d’armes chimiques, il lui a répondu : « Sortez donc un peu de votre russophobie, de votre mentalité insulaire […] J’ai honte pour vous. »


L’UE appuie Londres


Affirmant à de nombreuses reprises « n’accuser personne », M. Ermakov a martelé que, dans tous les cas, Londres est responsable du sort de Sergueï Skripal, 66 ans, et de sa fille Ioulia, 33 ans, hospitalisés depuis le 4 mars à Salisbury, ville du sud de l’Angleterre.


« Soit les autorités britanniques ne sont pas en mesure de fournir une protection contre ce type, disons-le ainsi, d’attaque terroriste, soit elles ont directement ou indirectement — je n’accuse personne de quoi que ce soit — mis en scène une attaque contre un citoyen russe », a-t-il expliqué.


« N’importe quelle substance toxique militaire aurait fait de multiples victimes sur le lieu de l’empoisonnement. Mais à Salisbury, cela n’a pas du tout été le cas », a affirmé ce diplomate, responsable du département du ministère chargé de la non-prolifération et du contrôle des armements.


Quant à l’agent innervant en cause, identifié par Londres comme produit dans le cadre du programme soviétique d’armes chimiques « Novitchok », il a insinué qu’il pouvait venir des États-Unis, et s’est excusé auprès de la Suède et de la Slovaquie pour des déclarations précédentes les désignant comme possible lieu d’origine.


Les dirigeants de l’UE, qui ont resserré les rangs derrière Londres, sont prêts à se « coordonner sur des mesures » contre la Russie, selon un projet de déclaration préparé pour leur sommet jeudi et vendredi à Bruxelles.


« Nous sommes aux côtés de la Grande-Bretagne, nous sommes solidaires » avec Londres, a déclaré la chancelière allemande, Angela Merkel, dans un discours.


Donald Trump avait semblé se démarquer en n’abordant pas le sujet lors d’un entretien téléphonique mardi avec Vladimir Poutine, qu’il a félicité pour sa réélection triomphale dimanche pour un quatrième mandat.


Mais mercredi, le président Trump et son homologue français, Emmanuel Macron, « ont réaffirmé leur solidarité avec le Royaume-Uni […] et sont tombés d’accord sur la nécessité de prendre des mesures pour que Moscou rende des comptes », selon un communiqué diffusé par l’exécutif américain.


> La suite sur Le Devoir.



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