À l’impossible nul n’est tenu

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Un mauvais débat



Ce fut le seul débat des chefs en anglais avec le premier ministre sortant, Justin Trudeau. Cinq modératrices et six chefs de parti sur scène — deux éléments déjà historiques en soi. Le résultat, lui, était plus décevant. Trop de « lignes » préfabriquées. Une inévitable cacophonie. De longue mémoire d’analyste politique, ce fut l’un des pires débats des chefs des dernières années. Point.




À deux semaines du scrutin, dans une campagne truffée de micro-mesures clientélistes, la question de l’urne, la seule semble-t-il, reste donc la même. De quel premier ministre les électeurs veulent-ils pour les prochaines années : le libéral Justin Trudeau ou le conservateur Andrew Scheer ?




Seule exception : l’électorat québécois. Contre toute attente, malgré l’avance des libéraux dans les intentions de vote, Yves-François Blanchet, le très efficace écho de François Legault à Ottawa, ramène le Bloc québécois à la vie. Si la remontée du Bloc se poursuit, même les péquistes, en quête eux-mêmes d’un chef, vont finir par voir M. Blanchet dans leur propre soupe.




Cour d’école




Et au Canada anglais ? Ce débat des chefs, aux relents parfois de cour d’école, permettra-t-il à Andrew Scheer de s’imposer comme premier ministre potentiel ? La réponse dépendra du type de leadership recherché par les nombreux électeurs qui, du moins le jurent-ils aux sondeurs, sont indécis.




Depuis sa mauvaise performance au Face-à-Face TVA, les attentes envers le chef conservateur étaient immenses. Or, à l’impossible nul n’est tenu. Dès ses premières remarques, Andrew Scheer s’est déguisé en kamikaze maladroit. Il accusait en effet Justin Trudeau de mentir, d’être une fraude et un faux féministe. M. Scheer a même sorti le supposé blackface passé de M. Trudeau du cercueil blindé dans lequel l’électorat l’avait pourtant enterré.




Si carnassières fussent-elles, même les attaques cinglantes de Stephen Harper contre ses adversaires libéraux n’auront jamais été aussi hystériques. Préférant l’insulte répétitive à la « vente » de son propre programme, M. Scheer « trumpérise » de plus en plus sa rhétorique électorale.




Meilleure chance la prochaine fois




Son modus operandi, multipliant les attaques personnelles, vise uniquement à présenter son adversaire libéral comme un menteur dénué du moindre sens de l’éthique. Cela plaira peut-être aux amateurs de « vieille » politique à la négative. Pour les autres, le choix n’en sera que plus clair.




Aux antipodes, le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a montré à quel point il pratique un leadership nettement plus positif. Idem pour la chef du Parti vert, Elizabeth May qui, face à M. Singh, vise le même électorat progressiste.




La présence de Maxime Bernier, chef du Parti populaire du Canada, était aussi incongrue que celle d’un communiste à un congrès caquiste. Quant à Yves-François Blanchet, heureux dans sa campagne parallèle, il joue de sa défense de la loi québécoise sur la laïcité comme d’un violon strident aux oreilles fatiguées des autres chefs.




Et l’urgence climatique ? Et le vieillissement de la population ? Et l’accès au logement et à la propriété ? Et les droits des Franco-Canadiens ? Meilleure chance jeudi soir, au prochain et dernier débat des chefs en français.






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