G8 et G20

Sheila Fraser refuse de publier son rapport

Corruption généralisée



La vérificatrice générale, Sheila Fraser.
Photo: Reuters


Joël-Denis Bellavance et Malorie Beauchemin - La Presse (Ottawa) La vérificatrice générale Sheila Fraser refuse de publier dès maintenant son rapport final sur la manière dont le gouvernement Harper a géré les fonds publics en organisant les sommets du G8 et du G20.
Ce faisant, elle refuse de donner suite à la demande des trois partis de l'opposition et du Parti conservateur qui ont demandé la publication de ce rapport final après que le contenu d'une ébauche de ce rapport ait fait l'objet d'une fuite ce matin.
«Nous ne publierons pas notre rapport d'audit sur le Fonds d'infrastructure du G8, et nous nous abstiendrons de tout commentaire sur le sujet. La Loi sur le vérificateur général nous interdit de présenter des rapports quand le Parlement n'est pas réuni. Le Bureau du vérificateur général du Canada conserve la garde de ses rapports jusqu'à ce que ceux-ci soient remis au président de la Chambre des communes, lequel se charge de les déposer en Chambre», a affirmé Mme Fraser dans un communiqué de presse.
«Je recommande fortement au public d'attendre que la version définitive de notre rapport sur le Fonds d'infrastructure du G8 soit présentée au Parlement et rendue publique. Nous mettons beaucoup d'effort à préserver le caractère confidentiel de nos rapports jusqu'au moment où ils sont déposés. Il semble qu'une version préliminaire de ce rapport a été rendue publique par une source extérieure au Bureau du vérificateur général», a-t-elle dit.
«Dans le cours normal d'un audit, nous avons pour pratique de montrer aux ministères et organismes que nous vérifions des versions préliminaires de notre rapport. Cela leur donne la possibilité de confirmer les faits sur lesquels nos conclusions sont fondées, de nous fournir des renseignements supplémentaires s'il y a lieu, et de préparer leurs réponses à nos recommandations. Il arrive que des renseignements supplémentaires nous soient communiqués à cette étape de la confirmation des faits. Seule la version définitive de nos rapports, celle présentée au Parlement, est représentative des constatations et des conclusions d'un audit», a-t-elle ajouté.
Outrés des nouvelles révélations concernant les sommets du G8 et du G20 qui seraient contenues dans le rapport de la vérificatrice générale sur la question, les chefs des partis en campagne électorale réclament que le document soit rendu public avant les débats de cette semaine.
«On savait qu'ils (les conservateurs) avaient dépensé de l'argent comme des marins en état d'ébriété dans la circonscription de Tony Clement, mais ce qu'on ne savait pas, c'est qu'ils semblent avoir menti au Parlement, et agi en contradiction avec la loi. C'est très grave», a lancé le chef du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff, de retour à Ottawa après un arrêt de campagne à Kingston.
La Presse Canadienne a obtenu un brouillon du rapport, datant de janvier, qui indique que le gouvernement conservateur de Stephen Harper aurait induit en erreur la Chambre des communes, dans l'octroi de fonds liés à la tenue du sommet du G8 à Muskoka, l'été dernier. Le véritable rapport n'a pas pu être déposé au Parlement tel que prévu au début avril, en raison du déclenchement des élections.
Dans ce rapport préliminaire, Mme Fraser laisserait entendre que le gouvernement Harper a trompé le Parlement afin de faire approuver des projets en marge du G8. Ces projets qui ont coûté 50 millions de dollars ont favorisé le comté du ministre Tony Clement.
Des toilettes publiques à 20 kilomètres du site du sommet du G8, un million de dollars pour des trottoirs à 100 km de là, un belvédère à une heure de route; les projets, déjà, avaient fait tiquer.
On lit dans le rapport que le ministre Clement, le maire de Huntsville et le gérant du complexe hôtelier où s'est tenu le sommet sont ceux qui ont choisi les 32 projets financés par les fonds publics, sans tenir compte des besoins du sommet ou des conditions d'octroi de fonds imposées par le gouvernement.
Le rapport de la Mme Fraser en vient à suggérer que ce processus pourrait avoir été illégal.
Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a lui aussi réclamé que le rapport soit rendu public immédiatement, jugeant qu'il était dans l'intérêt public d'avoir cette information avant la tenue des débats des chefs.
Le chef du NPD, Jack Layton, a aussi réclamé le dévoilement du rapport final de la vérificatrice générale avant les débats des chefs afin que les Canadiens aient l'heure juste dans ce dossier.
M. Layton a aussi exigé la tenue d'une enquête publique entourant la gestion des sommets du G8 et du G20 par le gouvernement Harper. La tenue de ces deux sommets a coûté près d'un milliard de dollars aux contribuables canadiens l'an dernier.
«Encore une fois, il semble que le gouvernement conservateur aide ses amis avant d'aider les familles. Cela indique encore une fois qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas à Ottawa», a dit M. Layton en conférence de presse.
Le Parti conservateur a affirmé que le rapport préliminaire de la vérificatrice générale diffère du rapport final qu'elle a produit. Les conservateurs ont aussi demandé que le rapport final soit rendu public.
«Notre compréhension des spéculations dans les médias au sujet du contenu du rapport de la vérificatrice générale ne reflète pas la version finale du rapport. Nous demandons à la vérificatrice générale et au Président de la Chambre des communes de rendre public la version finale du rapport. Nous sommes prêts à aider à faciliter la distribution de la version finale du rapport de toutes les façons possibles», a dit Carl Vallée, un porte-parole du Parti conservateur.
Le leader du gouvernement en Chambre, John Baird, doit réagir cet après-midi à Ottawa.
- Avec la Presse canadienne


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