Michel Leclerc - Président du conseil d’administration de l’Association minière du Québec - M. Sansfaçon, la poursuite des travaux de la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de modernisation de la Loi sur les mines est une belle occasion de débattre sereinement et positivement d'un sujet primordial puisque les ressources minérales appartiennent à tous les Québécois.
Dans ce contexte, c'est avec étonnement que nous avons pris connaissance de [votre éditorial sur l'industrie minière publié dans Le Devoir du mercredi 19 mai dernier->27983]. Vous y avez affirmé que les Québécois ne retirent pratiquement rien de l'exploitation de leurs propres ressources. Je tiens ici à exprimer mon profond désaccord et vous invite à consulter les données récentes sur l'industrie rendues publiques il y a quelques semaines, lesquelles contredisent clairement vos propos.
En effet, selon une étude sur les retombées socioéconomiques réalisée par la firme indépendante en information économique et commerciale E&B DATA, l'industrie minérale est un pilier de l'économie du Québec et de ses régions. Ainsi, d'ici 2013, c'est 4 milliards de dollars additionnels qui seront investis dans de nouvelles mines au Québec. C'est aussi plus de 52 000 emplois directs et indirects, une masse salariale de 1,9 milliard et une rémunération moyenne des employés du secteur minier supérieure de 42 % au salaire moyen des Québécois. C'est aussi une contribution de près de 7 milliards au PIB. Et contrairement à certaines informations véhiculées publiquement, l'industrie minérale contribue de manière importante aux recettes fiscales du gouvernement avec une contribution nette qui se chiffrait à 327 millions en 2007.
Le débat sur les droits miniers ou les redevances doit d'ailleurs être mis en contexte. La contribution globale de sociétés minières en diverses taxes va bien au-delà des seules redevances. Ainsi, en comparant, par exemple, la contribution en taxes directes perçues en Australie par rapport au Canada, sur la base d'un rapport publié en 2009 par PricewaterhouseCoopers qui a analysé les contributions fiscales de quatorze compagnies d'envergure internationale, celle-ci était de l'ordre de 14 % au Canada contre environ 9 % en Australie.
Toute comparaison entre pays doit aussi tenir compte des conditions de marché propres à chacun. Sur le plan des ressources minérales, l'Australie bénéficie non seulement d'un bassin concentré de ressources, d'un nombre élevé d'exploitations de très grande taille souvent accompagnées de minerai riche, mais aussi, elle se situe également à proximité de marchés aux besoins sans cesse croissants, comme la Chine et l'Inde. Dans ce contexte, vouloir transposer des mesures plus onéreuses sans tenir compte des impacts sur la compétitivité de notre industrie équivaut à mettre en péril un secteur économique vital pour le présent et l'avenir du Québec.
Toujours sur le plan des redevances, vous faites état du rapport du vérificateur général publié l'an dernier. Hélas, celui-ci n'a pas inclus l'ensemble de l'industrie minérale et de ses fournisseurs dans son analyse, et il n'a couvert qu'une période de cinq ans pour une industrie dont le cycle d'activité se situe davantage entre 10 et 20 ans. Il faut aussi tenir compte des sommes considérables qu'une entreprise doit investir pour développer un gisement. Ces investissements élevés en capital, ainsi que les coûts majeurs d'exploitation, doivent être amortis sur la durée de vie de la mine. Cela a un impact sur les revenus, sur les déductions annuelles auxquelles l'entreprise a droit, sur ses profits et, conséquemment, sur les redevances qu'elle doit payer sur ces profits.
Nous ne prétendons pas que notre dossier est parfait, mais les erreurs du passé sont révolues. L'industrie aujourd'hui investit dans la recherche et le développement de nouvelles technologies pour assurer une exploitation sécuritaire et responsable des ressources ainsi qu'une restauration efficace et durable des sites, en collaboration avec les intervenants concernés. Nous sommes tournés vers les défis de l'avenir, ouverts d'esprit, mais aussi déterminés à continuer à contribuer à l'essor économique du Québec et de ses régions. C'est ainsi que nous souhaitons participer au débat public en cours sur les enjeux de notre industrie sur la base d'une information complète et équilibrée.
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Michel Leclerc - Président du conseil d'administration de l'Association minière du Québec
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Réplique de l'éditorialiste
Le discours qui consiste à dire que les retombées économiques et fiscales vont au-delà du calcul des redevances vaut pour toutes les industries, qu'elles soient manufacturières, de services ou de ressources. La différence, dans le cas des mines et des forêts, c'est que le produit qui constitue à la fois la matière première et le bien fini vendu à très fort prix sur le marché n'appartient pas à l'entreprise qui l'exploite, mais à l'ensemble de la collectivité. Que les minières aient à payer des salaires et des impôts comme toute autre entreprise, ce n'est que normal. Ce qui ne l'est pas, c'est que, sous prétexte de retombées économiques, l'État leur cède pour presque une bouche de pain des richesses non renouvelables d'une valeur inestimable pour les générations futures. Rien ne justifie ce cadeau.
Jean-Robert Sansfaçon
Réplique à Jean-Robert Sansfaçon
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