Pourquoi Erdogan est-il devenu anti-euro-atlantiste ?

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Il a découvert le double jeu des Américains

Les bombardements aériens russes ont été extrêmement efficaces, car ils avaient planifié de créer des brèches dans les dispositifs des islamistes que les forces syriennes terrestres de l’armée seraient en mesure de développer, pour libérer plus de 50% du territoire occupé par les djihadistes. La CIA et le Pentagone ont échoué dans la création d’une armée d’opposants pour combattre l’armée arabe syrienne. Par conséquent, contrairement à la Russie, la soi-disant coalition anti-Etat-islamique dirigée par les Etats-Unis, après plus de deux ans de bombardements, n’a réalisé aucune destruction significative de l’Etat islamique parce que, au sol, il n’y avait pas de troupes alliées des Etats-Unis pour en profiter et exploiter les bombardements.


Cela a conduit, en Janvier 2016, la Maison Blanche à décider de changer de stratégie, en introduisant les Kurdes en tant que forces terrestres dans leur offensive contre l’Etat islamique. Les Etats-Unis ont très bien pesé que les conséquences de leur plan stratégique pour vaincre l’État islamique entraînerait automatiquement la création d’un Etat kurde, garanti par la Maison Blanche. Le Kurdistan serait un territoire d’une superficie de 390 000 km² comprenant une partie de la Turquie, la Syrie, l’Irak et l’Iran et aurait une population de plus de 30 millions.


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Le plan est basé sur un article du lieutenant-colonel Ralph Peters, professeur à l’académie de commandement et d’état-major des États-Unis publié dans l’édition de Juin 2006 du Journal des Forces Armées [[1]]. Soit quatre ans avant la guerre civile en Syrie et huit ans avant l’avènement de l’Etat islamique en Irak et en Syrie.


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Et ici se pose la question de savoir si le conflit en Irak et en Syrie n’avait pas été planifié de longue date par les États-Unis pour redessiner les frontières du Moyen-Orient ? Surtout que ce plan permettrait aux Américains de créer un réseau de gazoducs kurdes ou qataris pour approvisionner l’Europe, en contournant la Turquie par le biais du Kurdistan tout en éjectant l’Iran et la Russie de l’équation.


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Seulement la Turquie représente un objectif stratégique par le fait qu’elle est le point de passage du continent européen vers les continents asiatique et africain par les détroits du Bosphore et des Dardanelles, et que les opérations aériennes contre l’État islamique effectuées par les Américains sont menées à partir de la base aérienne turque d’Incirlik. C’est la raison pour laquelle les États-Unis ont besoin de la Turquie et non l’inverse. L’éventualité pour la Turquie de perdre 45% de son territoire a profondément irrité le président Recep Erdogan. Quelles que soient les critiques que l’on peut faire à l’impulsivité de Erdogan, tout lui est pardonné par le peuple turc, par patriotisme. Cela signifie que, tant que Erdogan sera le président de la Turquie, aucun autre coup d’Etat militaire n’aura de chance de succès.


Cette caractéristique de Erdogan est connue des Américains et, après la mise en œuvre du plan stratégique en Syrie, il semble que la Maison Blanche a préparé un plan de destitution de Erdogan, au cas où ils n’auraient pas réussi à le persuader de démissionner. Le plan de destitution de Erdogan devait être mis en œuvre par les élites « euro atlantistes » fidèles aux Américains, formées à partir du réseau de Gülen. Erdogan affirme que son ennemi, réfugié aux Etats-Unis, serait un paravent de la CIA et que le réseau « euro-atlantiste » en Turquie serait semblable à celui de George Soros implanté dans les anciens pays communistes, après la chute du rideau de fer. Le processus de recrutement utilisé par le réseau de Gülen se ferait à partir de bourses d’études ou de spécialisation dans les institutions occidentales prestigieuses, offertes par le gouvernement américain et la CIA.


Le réseau de Gülen vise particulièrement les jeunes officiers de l’armée turque, qui reçoivent des cours importants organisés par l’OTAN et le Pentagone. Le Pentagone peut ensuite faire pression sur l’état-major général turc pour que ces officiers occupent les fonctions revenant à la Turquie dans les diverses structures de l’OTAN. Comme ce sont des officiers subalternes sans expérience militaire de terrain, leur avancement se fait sur place, sur le mode exceptionnel, montant de deux à trois grades pour atteindre le grade de major, lieutenant-colonel ou colonel, comme l’exige la règle d’encadrement de l’OTAN. Dans l’armée turque, pour dépasser le grade de major et accéder au commandement d’un bataillon, une brigade, une division, un corps d’armée ou une armée, ils est nécessaire de passer des stages suivant l’ancienneté, et obtenir d’excellents résultats de préparation au combat, pour être autorisés à passer les examens d’entrée à l’Académie de Commandement et d’Etat-major d’Istanbul. Après un mandat de 1 à 2 ans dans l’OTAN, le Pentagone fait pression sur les chefs militaires Turcs pour que ces officiers supérieurs d’opérette, sans passer par l’Académie, obtiennent de nouveaux avancements dans des grades leur permettant d’occuper des postes importants à l’Etat-Major ou dans des structures de commandement de corps d’armée et de l’armée turque.


Selon les partisans de Erdogan, des milliers d’officiers turcs recrutés dans le réseau de Gülen auraient effectué leur carrière militaire selon un parcours « d’avancement rapide », pour atteindre les grades de général et de colonel dans des postes clés. Il existe un contraste frappant avec la base kémaliste de l’armée, en ce sens que leurs camarades de promotion kémalistes sont restés capitaines ou majors, dans des fonctions d’exécution. Cette différence, créée artificiellement, est à la base de l’échec du coup d’Etat militaire en Turquie [[2]].


Erdogan dit que le réseau de Gülen a réussi à attirer près de 20-25% des hauts fonctionnaires (l’Armée, les établissements d’enseignement supérieur, les médias, la justice, la police, l’appareil gouvernemental, etc.). Erdogan dit que tout le réseau Güleniste est toujours prêt à trahir la Turquie, sur ordre des ennemis de la Turquie. C’est pourquoi Erdogan a immédiatement commencé à démettre de leurs fonctions tous les membres du réseau « euro atlantiste » sur le modèle des purges staliniennes des anciens pays communistes, en début des années 50. Maintenant, l’enjeu pour Erdogan est de maintenir l’intégrité territoriale de la Turquie, quels que soient les plans américains au Moyen-Orient.


Valentin Vasilescu


Traduction Avic – Réseau International


[1] Ralph Peters. “Blood borders: How a better Middle East would look,” Armed Forces Journal (AFJ) http://armedforcesjournal.com/blood-borders/


[2] Pourquoi le coup d’Etat en Turquie n’a-t-il pas réussi ? (http://reseauinternational.net/pourquoi-le-coup-detat-en-turquie-na-t-il-pas-reussi/).



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