L'Europe finance les banques qui se gavent sur la dette pendant que les banquiers vivent du «bien-être fiscal»

Les banksters s'engraissent à nos dépens et sans vergogne aucune. Jusqu'à quand?...

Philippe Cohen . Rédacteur en chef de Marianne2.fr - La crise a disparu des radars électoraux, comme si elle s'était brusquement évanouie. Le brusque recul du CAC 40 montre que le feu couve sous la braise. Tandis que la BCE refinance les banques qui réalisent des plus-values sur les dettes souveraines, les plans d'austérité, comme prévu par les économistes raisonnables, engendrent une récession qui ne peut qu'accentuer les déficits publics. La plupart des acteurs de notre campagne présidentielle font comme si la double crise de l'euro et de la dette était derrière nous. Or, plusieurs nouvelles rappellent utilement que le feu continue de brûler sous la braise. Le premier signe est, en apparence, une bonne nouvelle, tombée durant le week-end et peu évoquée par les médias : en deux mois, la Banque centrale européenne vient de prêter la bagatelle de 1 000 milliards aux établissements bancaires à un taux qui fait rêver tout acheteur de logement : 1%. Officiellement, ces liquidités octroyées à quelque 800 banques pour une durée de trois ans, leur permettent de répercuter ces largesses sur les prêts consentis aux états pour refinancer leur dette : ainsi les taux d’emprunts à dix ans consentis à l’Espagne et l’Italie sont ainsi passés de 7 ou 8 % à respectivement 3,9 et 4,9%. Tant mieux. Mais il s’agit encore une fois d’un cadeau aux banques privées : un enfant de trois ans comprend que lorsqu’on peut emprunter à 1% et prêter à 3,9%, on réalise des bénéfices considérables. Parallèlement, l’anxiété grandit en Allemagne : on a découvert à travers Target 2, un système de transactions automatiques interbancaires d’une remarquable opacité, que la Bundesbank allemande avait 500 milliards de créances possiblement douteuses dans les autres pays européens. En réalité, ces créances ne sont que le reflet de l’excédent commercial allemand et des déséquilibres qu’il engendre. Ces créances résultent, comme l'explique très clairement François Leclerc, de « la substitution de l'Eurosystème au marché interbancaire qui ne fonctionne plus » : « Les banques commerciales d’un pays donné de la zone euro se finançant sans limites auprès de leur banque centrale nationale, celle-ci enregistre ses créances auprès de sa consœur du pays d’où sont importés des biens et des services grâce à ses crédits. Le cumul net de ces créances a abouti aux montants évoqués dans les livres de la Bundesbank, soit 20 % de son PIB, tout simplement parce que l’Allemagne est le principal exportateur net au sein du marché européen. » Pour rétablir l'équilibre, il faudrait donc que l'Allemagne augmente sa consommation et ses importations. Mais comme Angela Merkel refuse, toute relance de la consommation intérieure allemande, cette créance de 500 milliards commence à semer l’inquiétude sur les marchés. Enfin, les signaux sur les marchés sont d'autant plus alarmants - cf. la dégringolade du CAC 40 de 3,58% mardi 6 mars - que la politique d’austérité imposée un peu partout en Europe ralentit les recettes des états et … accentue leurs déficits publics. Même les Pays-Bas, l'un des bons élèves de l'euro est à présent touché, avec un déficit public de 4,5%, alors que ses dirigeants multipliaient les admonestations contre les PIG'S. En Espagne, le gouvernement Rajoy a annoncé que le déficit public serait de 5,8 et non de 4,4 comme le stipulait la feuille de route Merkozy. Au Portugal, les fuites sur une rencontre informelle entre le ministre des finances portugais, Victor Gaspar, et son homologue allemand, Wolfgang Schäuble, ont alimenté la rumeur sur une possible renégociation de la dette portugaise. Avant même d’être adopté, le fameux mécanisme européen de stabilité est ainsi piétiné. Il ne reste plus qu'à attendre le retour de bâtons en Allemagne même de la récession qu'a imposée son gouvernement aux autres pays d'Europe. Le seul suspens de la campagne est de savoir s'il aura lieu avant ou après l'élection présidentielle.



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