Israël : vers de nouvelles élections en mars, les troisièmes en moins d’un an

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Netanyahu fait de la surenchère nationaliste pour s'assurer du soutien de son propre parti

Pour la troisième fois en moins d’un an, les partis politiques israéliens s’avancent vers un nouveau scrutin législatif. Les parlementaires israéliens ont approuvé mercredi 11 décembre en première lecture un projet de loi pour la tenue de nouvelles élections le 2 mars prochain. Des élections qui s’annoncent comme un nouveau duel entre le premier ministre Benyamin Nétanyahou et son rival Benny Gantz.


Les députés israéliens ont en théorie jusqu’à 23 h 59 mercredi pour offrir une majorité inespérée aux deux rivaux, au coude-à-coude lors des élections d’avril puis de septembre et à chaque fois dans l’incapacité de rallier 61 élus sur les 120 du Parlement. En l’absence d’accord, cet hémicycle disparaîtra au 12e coup de minuit.


Mercredi matin, un comité parlementaire a proposé de précipiter les choses et de réunir les députés afin de voter directement la dissolution de la Knesset, le Parlement, pour convoquer de nouvelles élections le 2 mars prochain. Dans la foulée, les députés ont tenu un vote préliminaire pour dissoudre le Parlement et tenir des élections à cette date, juste avant les fêtes juives de Pourim.


Ce projet doit faire l’objet d’autres votes en journée, mais réduit d’emblée les chances d’arracher un accord de dernière minute pour la formation d’un gouvernement d’union, MM. Nétanyahou et Gantz étant incapables de s’entendre pour partager le pouvoir.


Des affaires judiciaires sont au cœur de ce différend. Premier ministre le plus longtemps en poste de l’histoire d’Israël — treize ans, dont la dernière décennie sans discontinuer —, M. Nétanyahou, 70 ans, a été inculpé fin novembre pour corruption, abus de confiance et malversations dans une série d’affaires. Certains de ses proches, dont son avocat, doivent aussi être mis en examen pour blanchiment d’argent, pour l’achat de sous-marins à la société allemande ThyssenKrupp.


M. Nétanyahou souhaitait diriger en premier un éventuel gouvernement d’union, dans l’espoir notamment d’obtenir une immunité judiciaire, ce que M. Gantz refusait, estimant que son rival devait régler ses démêlés avec la justice avant de reprendre le poste de premier ministre.


Entre les deux rivaux se tient le nationaliste Avigdor Lieberman, chef de la formation Israel Beitenou, la seule qui restait encore non alignée et dont le soutien à MM. Nétanyahou ou Gantz pourrait suffire à décrocher une majorité et éviter de nouvelles élections.


« Une valeur-clé pour moi est l’amitié. C’est une chose qui vous est totalement étrangère », a commenté M. Lieberman à l’endroit de M. Nétanyahou, dont il fut jadis proche.


Malgré cette critique, le « faiseur de roi » Lieberman n’a pas joué son atout ces derniers mois, menant ainsi Israël à de nouvelles élections, au grand désarroi d’une partie de la population et d’une partie des médias qui ironisent déjà sur la date de la… 4e élection.


En cas de nouveau scrutin, les derniers sondages, diffusés cette semaine par la chaîne Kan, placent le Likoud de M. Nétanyahou et la formation Kahol Lavan (Bleu Blanc, les couleurs du drapeau) de M. Gantz dans un mouchoir de poche.


Confronté à une contestation au sein même de son camp, menée par le député Gideon Saar, Benjamin Nétanyahou a ouvert la porte à des primaires pour désigner le chef du Likoud, tout en assurant qu’il remporterait un tel scrutin interne.


Pour faire mousser ses appuis, M. Nétanyahou a déjà souligné l’importance, selon lui, d’aller de l’avant avec son projet d’annexer un pan stratégique de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé, et de parapher un traité de défense commune avec les Etats-Unis.


M. Nétanyahou est réputé proche du président américain Donald Trump, qui a reconnu la souveraineté israélienne sur le Golan, reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël et récemment jugé que les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée n’étaient pas contraires au droit international. D’où le propos du premier ministre israélien selon lequel il serait le seul, à la faveur de ses relations avec l’administration Trump, à pouvoir faire avancer ces dossiers sensibles.


De son côté, le parti de Benny Gantz a en quelque sorte entériné la future candidature de l’ancien militaire pour le poste de premier ministre. Les statuts de la formation prévoient une alternance avec son associé Yair Lapid comme tête d’affiche des élections. Mais M. Lapid a déclaré lundi aux députés Bleu Blanc qu’il laissait toute la place à M. Gantz dans ce remake à venir.


« L’important n’est ni la rotation ni le siège, mais la guerre de libération, pour libérer le pays de la corruption », a-t-il déclaré, en donnant peut-être le ton à la joute en gestation.