Le premier ministre Philippe Couillard affirme être «préoccupé au plus haut point» par l’arrestation d’une dizaine de jeunes radicalisés il y a quelques jours à Montréal.
Néanmoins, M. Couillard laisse durer le suspense sur la date du dépôt tant attendu du plan d’action de son gouvernement pour lutter contre le radicalisme.
«Les forces de sécurité, heureusement, jouent leur rôle, mais on va bientôt présenter une politique très large sur cette question qui comprendra des éléments de prévention (et) de détection», a-t-il déclaré en point de presse, mercredi.
La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a appréhendé un groupe de jeunes Montréalais vendredi dernier après avoir été alertée par des parents. Des sources indiquent que ces jeunes espéraient quitter le pays pour se rendre en Syrie, via la Turquie. Dix arrestations ont été effectuées à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau et une autre dans l’arrondissement Saint-Léonard, à Montréal.
Le premier ministre a exprimé une inquiétude certaine face à la situation, d’autant plus que ces présumés candidats pour le djihad sont des jeunes nés et éduqués au Québec.
«Il s’agit de jeunes qui sont nés chez nous, [éduqués] dans nos institutions d’enseignement, c’est préoccupant au plus haut point», a avoué le chef du gouvernement.
En dépit des questions pressantes, M. Couillard a refusé de s’engager formellement à déposer le plan d’action avant l’interruption des travaux parlementaires le 12 juin.
«Bientôt», s’est-il contenté de répéter.
Cependant, en Chambre, la ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, a indiqué que des propositions législatives seront déposées avant la fin de la session. Dans le dossier complexe de la lutte contre le radicalisme, le Québec doit attacher les ficelles avec le gouvernement fédéral, a-t-elle dit.
«La session se termine le 12 juin. Il y aura des dépôts de pièces législatives, mais on va se dire les vraies affaires aussi. On parle de radicalisation dans un contexte mondial. Le Québec ne vit pas sur une planète isolée. On fait partie du Canada et on lutte ensemble contre la radicalisation», a souligné Mme Thériault.
La politique «très large» sur laquelle planche le gouvernement depuis plus d’un an pour prévenir et combattre la radicalisation mobilise les ministères de la Justice, de l’Immigration et de la Sécurité publique.
En attendant, Mme Thériault invite les membres de la famille, les enseignants et l’entourage des jeunes à faire montre de la même diligence que les parents qui ont alerté les forces policières pour rapporter le comportement suspect de leur enfant.
«Depuis le début, j’ai toujours fait appel à la collaboration des gens en leur disant : soyez à l’affût de ce que vos enfants font. Si vous voyez que des jeunes se radicalisent, que leur comportement change, signalez-les. On voit que ça marche», a-t-elle dit.
Comme le premier ministre, Mme Thériault a admis avoir peine à s’imaginer qu’un jeune Québécois veuille s’engager comme belligérant dans la poudrière syrienne.
«C’est difficile de concevoir qu’un jeune qui a grandi ici, qui réussit bien, qui va à l’école, qui est bien intégré, veuille aller faire la guerre, prendre l’avion pour aller l’autre côté», a-t-elle dit.
Durant la période de questions, la porte-parole de l’opposition officielle en matière de laïcité, Agnès Maltais, a condamné la lenteur du gouvernement à agir sur le front du radicalisme.
«Combien de parents vont être obligés d’appeler la police ou la GRC parce que c’est tout ce qu’ils ont comme outil entre les mains pour aider à prévenir la radicalisation ? Combien d’arrestations d’enfants ça va prendre, sur l’appel des parents, pour réussir à sortir de là ? Il y a un projet de loi qui a été promis, ça fait un an et demi qu’on l’attend», a-t-elle lancé.
Un phénomène mondial, dit Coderre
Même si les 10 derniers jeunes ont été arrêtés à Montréal — comme d’autres en février et en avril — le maire de la métropole, Denis Coderre, refuse que sa ville soit montrée du doigt.
«C’est un phénomène mondial», a-t-il rétorqué lors d’un point de presse mercredi à Montréal sur un autre sujet.
Et c’est l’affaire de tout le monde, a-t-il insisté après avoir félicité la GRC pour ses récentes arrestations.
Il a rappelé la nécessité pour les villes de trouver un équilibre entre l’ouverture et la vigilance, ce qui est d’ailleurs l’objet d’un sommet international sur «le vivre ensemble» qui aura lieu à Montréal les 10 et 11 juin prochain. Trente-et-une villes ont confirmé leur présence, dont Washington, Hiroshima, Paris, Miami et Bruxelles. L’objectif pour les villes sera d’échanger sur leurs meilleures pratiques face à la radicalisation, a souligné M. Coderre.
Pour ce qui est des récentes arrestations, le maire a insisté sur le fait «qu’il ne faut pas partir en peur, mais qu’il faut être à l’affût».
Il a d’ailleurs incité les citoyens à contacter le Centre de prévention à la radicalisation menant à la violence, en lien avec le Service de police de la ville de Montréal (SPVM), s’ils constatent des changements dans le comportement de leurs proches.
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