La Grande Paix de Montréal 4 août 1701
4 août 2010
Mme Morot-Sir,
Vous écrivez : « La Paix de Montréal a été un message monumental lancé aux Anglais qui l’ont reçu cinq sur cinq. Ils ont si bien senti le vent du boulet les effleurer, qu’ils ont, à partir de cet instant, mis en place tous les éléments qui leur permettront cinquante ans plus tard de se saisir de cette Nouvelle France tant convoitée, en constatant que les autorités françaises en France, ne comprenaient pas et même sous-estimaient l’enjeu qu’elles détenaient !
(…)
Est-ce pour ces regrets inexprimés, sous-tendant l’incurie et l’incompétence de ces gouvernants qui n’ont jamais eu la vision supérieure nécessaire à tout grands hommes d’Etat, y compris le roi, est-ce pour cela que nous observons depuis toutes ces années un relatif oubli dans lequel cette épopée française américaine a sombré et que bien peu remettent en avant ? ».
Pourtant, Mme Morot-Sir, « Le Passé est le Passé » et il faut le rappeler tel qu’il fut concernant les conséquences historiques et le résultat de la mainmise anglaise sur la Nouvelle France que vous décrivez, lesquelles n’étaient pas dues à « … l’incurie et l’incompétence… », sinon à la supériorité des forces armées anglaises, surtout navales, si nous voulons rendre hommage à la vérité pour éviter de tomber dans les clichés qui ne font que tuer l’Histoire du Québec et celle de la France.
Avec ce passage extrait de mon article L’Histoire écrite par les vaincus*Québec/Gibraltar** : deux colonies assurant l’équilibre du pouvoir oligarchique, l’on peut mettre un peu plus d’équanimité quand on écrit sur l’histoire de ce passé tristement malheureux pour nous tous :
Dans cette période de conflits paneuropéens, les Anglais ont envahi le cap de Gibraltar (Andalousie), territoire d’outre-mer sous la mainmise du Royaume-Uni depuis 1707. La guerre de Succession d’Espagne, 1701 à 1714, opposant l’Espagne et la France, avait fait que cette enclave stratégique de premier ordre tombe facilement sous contrôle britannique et qu’elle le soit encore aujourd’hui en raison du pouvoir centraliste espagnol corrompu étant sous la tutelle de la monarchie des Bourbon. Gibraltar, colonie considérée illégale par l’ONU, est située au sud de l’Espagne, seul territoire colonial existant aujourd’hui en Europe, tout comme le Québec est la seule colonie en Amérique du Nord. La géopolitique et le trafic illégal ont fait de Gibraltar, comme toujours il a été, une enclave stratégique de grande importance pour les pouvoirs oligarchiques. Cette colonie est située en bordure du détroit de Gibraltar reliant la Méditerranée à l’océan Atlantique où confluait 70% du commerce maritime asio-africano-européen. C’est dans ce contexte d’échanges et de relations multilatérales imposées que le contrôle de ce territoire andalou fut pris par les Anglais en connivence avec des caciques et laquais andalous faisant partie du pouvoir centraliste espagnol à Madrid et les forces anglo-néerlandaises de l’amiral George Rooke le 21 juillet 1704, qui devient gouverneur de Gibraltar. La « légitimité » « juridique » et « politique » de cette colonie est confirmée et « reconnue » par l’Espagne des Bourbon, en raison de ces traîtres pro-royalistes espagnols qui avaient approuvé l’infâme accord dénommé Traité d’Utrecht de 1713. En plus de Gibraltar, la Grande-Bretagne reçut par cet accord, Terre-Neuve, l’Acadie et Minorque.
Toutefois, c’est à partir du contrôle de l’enclave géostratégique de Gibraltar (Calpé en latin, dans la mythologie grecque ce rocher fait partie de l’une des Colonnes d’Hercule. L’autre étant Ceuta ou Mons Abyla au nord du Maroc. L’empereur Charles V les avait incluses dans son blason d’armes comme symbole héraldique de puissance dans l’Empire Espagnol) que furent possibles la conquête du Bas Canada et la soumission des Canadiens français, effectuées par les forces navales britanniques étant sous les ordres du premier ministre et ministre de la Guerre, William Pitt (leader du nationalisme anglais face aux Bourbon français et espagnols qui conduisit la Grande Bretagne à la victoire de la guerre de Sept Ans). Il convient de souligner que la marine française ne pouvait s’aventurer à faire face à ce bouclier maritime anglais qui s’étendait du sud de l’Angleterre jusqu’à Gibraltar (incluant les côtes maritimes du Portugal protégées par les anglais), ni compter sur leur propre force navale ou celle de l’Armada, laquelle avait été détruite par la marine anglaise lors de la bataille de Trafalgar en 1805. En définitive, les forces navales françaises restaient pratiquement neutralisées, ne pouvant aller défendre leurs colonies en raison du contrôle exercé par les britanniques dans cet espace maritime de capitale importance pour l’expansionnisme impérialiste anglo-saxon.
Jean-Louis Pérez