Refuser la censure est un devoir

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La France se tient debout devant la pleurniche victimaire autochtone

Bravo à Ariane Mnouchkine, la directrice du prestigieux Théâtre du soleil. Bravo à Robert Lepage, metteur en scène renommé et un des grands créateurs de ce siècle.


Bravo, parce que vous venez de poser ensemble un geste essentiel.


Un geste qui lance un «non» royal aux tentatives de certains groupes de pression de vous faire taire, soit de sortir carrément certaines de vos œuvres de l’espace public pour des raisons essentiellement idéologiques et politiques.


Bravo parce que ce faisant,  vous dites également «non» aux bailleurs de fonds frileux qui, pour protéger leurs propres intérêts affairistes, ont cédé devant les protestations non fondées des mêmes dits groupes d’intérêts.


Les premiers furent les dirigeants du Festival international de jazz de Montréal qui, en juillet,  ont làchement ordonné l’annulation, donc la censure, du spectacle SLAV. Les seconds furent des producteurs du spectacle Kanata, dont le retrait vous avait obligés à annuler à votre tour Kanata.


Cet été, j’ai beaucoup écrit sur le sujet. Je l’ai décortiqué et documenté sous tous ses angles, dont, entre autres, ici et ici.


La raison? Parce que les libertés d’expression et de création artistique sont des valeurs fondamentales en démocratie. La censure, elle, est leur pire ennemi. (Dans mes textes, j’épilogue aussi sur d’autres raisons.)


Voilà donc que ce matin, Ariane Mnouchkine et le Théâtre du soleil annoncent que Kanata ira de l’avant.


Le geste est majeur, mais pour tout dire,  il aurait dû aller sans dire dès le début de cette fausse controverse. Idem d’ailleurs pour SLAV.


Parce que le communiqué de presse du Théâtre du soleil énonce des principes non négociables en démocratie, je vous le reproduis ici dans son entièreté.


Sa lecture attentive est un must.


Y compris pour ceux et celles qui, cet été, sont restés muets devant ces tentatives choquantes de censure.


***


«KANATA


du 15 décembre 2018 au 17 février 2019


Après avoir, comme ils l'avaient annoncé dans leur communiqué du 27 juillet, pris le temps de réfléchir, d'analyser, d'interroger et de s'interroger, Ariane Mnouchkine et le Théâtre du Soleil sont finalement arrivés à la conclusion que Kanata, le spectacle en cours de répétition, ne violait ni la loi du 29 juillet 1881 ni celle du 13 juillet 1990 ni les articles du Code pénal qui en découlent, en cela qu'il n'appelle ni à la haine, ni au sexisme, ni au racisme ni à l'antisémitisme ; qu'il ne fait l'apologie d'aucun crime de guerre ni ne conteste aucun crime contre l'humanité ; qu'il ne contient aucune expression outrageante, ni terme de mépris ni invective envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, ou une religion déterminée.


Ne s'estimant assujetti qu'aux seules lois de la République votées par les représentants élus du peuple français et n'ayant pas, en l'occurrence, de raison de contester ces lois ou de revendiquer leur modification, n'étant donc pas obligé juridiquement ni surtout moralement de se soumettre à d'autres injonctions, même sincères, et encore moins de céder aux tentatives d'intimidation idéologique en forme d'articles culpabilisants, ou d'imprécations accusatrices, le plus souvent anonymes, sur les réseaux sociaux, le Théâtre du Soleil a décidé, en accord avec Robert Lepage, de poursuivre avec lui la création de leur spectacle et de le présenter au public aux dates prévues, sous le titre Kanata – Épisode I — La Controverse.


Une fois le spectacle visible et jugeable, libre alors à ses détracteurs de le critiquer âprement et d'appeler à la sanction suprême, c'est-à-dire à la désertification de la salle.


Tous les artistes savent qu'ils sont faillibles et que leurs insuffisances artistiques seront toujours sévèrement notées. Ils l'acceptent depuis des millénaires.


Mais après un déluge de procès d'intention tous plus insultants les uns que les autres, ils ne peuvent ni ne doivent accepter de se plier au verdict d'un jury multitudineux et autoproclamé qui, refusant obstinément d'examiner la seule et unique pièce à conviction qui compte c'est-à-dire l'oeuvre elle-même, la déclare nocive, culturellement blasphématoire, dépossédante, captieuse, vandalisante, vorace, politiquement pathologique, avant même qu'elle soit née.


Cela dit, et sans renoncer à la liberté de création, principe inaliénable, le Théâtre du Soleil s'emploiera sans relâche à tenter de tisser les liens indispensables de la confiance et de l'estime réciproques avec les représentants des artistes autochtones, d'où qu'ils soient, déjà rencontrés ou pas encore.




Artistes à qui nous adressons ici notre plus respectueux et espérant salut.


Le Théâtre du Soleil

5 septembre 2018
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Et voilà qui est enfin dit.