Une vraie et triste histoire vécue
21 mai 2010
J'ai voté deux fois dans ma vie. En 1980 et en 1995. La première fois, j’avais vingt ans (Hier encore, j'avais...). Enveloppé dans un drapeau québécois, je pleurais à chaudes larmes lorsque René Lévesque – homme à qui j’avais serré la main peu auparavant (jamais une main ne m’avait paru plus douce ! Sauf peut-être celle de la femme que j’ai le plus aimée !) – a parlé au micro, le soir du vingt mai.
En quatre-vingt-quinze, de retour de Paris, le 30 octobre, juste à temps pour voter, je me suis de nouveau retrouvé bercé par les larmes ! Sans le drapeau ! L’emblème, sur moi, n’avait plus prise.
Depuis, je ne vote plus (Entendons-nous bien. Pourquoi voterais-je pour quiconque n’est pas à la hauteur de mon pays, y compris les inféodés du Parti Québécois ?). Mon vote ne comptera que lorsque je pourrai dire, voilà ! Je suis citoyen Québécois avec tous ses devoirs et responsabilités (qui ne sont pas ceux des armes, de l’agression, du fondamentalisme, peu importe où il se trouve). Car je place les droits à leur suite. Ces pays qui mettent ces derniers au centre de «leur» souveraineté ne peuvent que faillir. Car ils sont pour un ordre sans intelligence (la loi du plus brutal, non du plus fort. Je les trouve insignifiants – qui ne signifie rien – ceux qui annihilent. Avant de tuer, il faut d’abord commencer par se tuer soi-même. Le hurlement qui accompagne le premier coup de poignard qu’on donne est double. Il y a à la fois le cri de l’agresseur comme celui de l’agressé. Après, c’est plus « facile ») et savent bien semer la zizanie partout où ils passent. Quand un pays est un peuple, il n’a pas besoin d’instaurer un régime de droits pour « se » (comme s'il existait, comme s'il était incarné) protéger de ses citoyens. Actuellement, tous les pays sont des monarchies quand ce ne sont pas des dictatures. Ils asservissent leur peuple, ne les guident ni ne les consolent.
Ainsi, le British Law n’a pas pris une ride. Il règne sur le monde et se dissimule derrière le sionisme, le républicanisme, la Révolution française, Wall Street ! Quant à l’Islam ? Il faut remettre cette politique dans son contexte. Tout comme le christianisme, cette idéologie s’explique par une lente fermentation des pulsions et des pouvoirs. Il ne servira à rien, dans un pays nouvellement acquis comme le Québec, de faire se heurter ces confuses idéologies. On n’acquière le droit d’être que quand on équilibre et la vie de l’autre, et la sienne.
Peut-être qu’un jour, je voterai de nouveau. Mil neuf cent quatre-vingts, mil neuf cent quatre-vingt-quinze, deux mil dix !
Il ne reste que six mois. Et pourtant, quelle façon de galvaniser un peuple ce serait que de lui donner rendez-vous tous les quinze ans !
André Meloche
Sainte-Sophie
P.S. En littérature, on étudie ce qu’on appelle la « génération des vingt ans ». Comme on dit que les enfants s’éveillent plus rapidement qu’auparavant et que les adultes s’abrutissent au même rythme, il me paraît raisonnable de retrancher quelques années au concept littéraire. Cela dit, la fenêtre qui s’ouvre, entre l’éveil et l’abrutissement, est bien étroite. Il faut donc faire voter les jeunes « à » dix-huit ans ! Car ils sont assez rêveurs pour renverser l’ordre établi et pas encore encroûtés pour s’y réfugier ! Le Québec n’est pas prêt à voter avec clairvoyance. Nous devons descendre plus bas encore. Il faut atteindre le « fond », sachant qu’il n’existe pas. Gaston Miron le savait. Et lorsque je voterai de nouveau pour mon pays, j’aurai encore une fois l’impression que j’ai dix-huit ans ! Cela dit, j’aime le Québec. Pour moi, il est déjà un pays de par son incroyable soif d’être, mais de n’être pas seul.