Principes de réalité

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« Bref, Peter MacKay, c’est quelque chose comme une tentative de présenter une version conservatrice bleu pâle du Justin Trudeau de 2015. »


À moins d’un revirement monstre d’ici le vote du 27 juin, Peter MacKay a d’excellentes chances d’être élu à la tête du Parti conservateur du Canada (PCC). Chez les membres et dans le caucus, ses appuis se multiplient. Les autres « grosses pointures » de la course se sont aussi désistées. Quand ça sent la coupe...


À 54 ans, l’ex-ministre des Affaires étrangères est surtout connu pour avoir négocié la fusion réussie en 2003 du Parti progressiste-conservateur, dont il était chef, avec l’Alliance canadienne de Stephen Harper. Cette grande union de la droite canadienne, c’est le PCC.


La première « mission » que Peter MacKay s’est donnée samedi à son lancement de campagne n’a donc rien d’étonnant : se rendre aux élections avec un parti plus « uni » que jamais. Sa deuxième : « élargir la grande tente bleue » conservatrice au-delà de sa base actuelle. Sa troisième : « unir » le Canada divisé, selon lui, par la faute de Justin Trudeau. Vaste programme.


Fierté


Comme François Legault l’a fait au Québec, Peter MacKay a tout d’abord promis de redonner aux Canadiens la « fierté » de leur pays. S’en est suivie sa longue liste de clientèles visées. À l’aile harpérienne, il a promis des pipelines. Aux Québécois, il a juré de respecter leur « nation » et leurs « valeurs ». Aux écologistes, qu’il défendra la « splendeur naturelle » du Canada.


Sans compter, figure obligée après Andrew Scheer, son reniement du conservatisme moral. Le tout, en termes immensément généraux. Bref, Peter MacKay, c’est quelque chose comme une tentative de présenter une version conservatrice bleu pâle du Justin Trudeau de 2015.


Au Québec, la faiblesse de son français dérange, mais pas tant que ça. C’est connu, les Québécois ont tendance à apprécier le moindre effort dès qu’un anglophone tente de parler français. De fait, ils sont d’une patience d’ange. Pour Peter MacKay, ça tombe bien. S’il remporte la chefferie, il n’aurait qu’à redoubler d’ardeur d’ici le scrutin fédéral pour apprendre un français moins torturé, et tout lui sera pardonné.


Coquetterie désuète


De toute manière, le PCC n’a plus vraiment besoin du Québec pour remporter une élection. Même au pouvoir, Stephen Harper s’y contentait de deux poignées d’élus. Pour les conservateurs, la clé d’une prochaine victoire se trouve tout d’abord en Ontario. C’est un principe de réalité.


Les appuis montants de Peter MacKay confirment qu’il est maintenant compris même chez des conservateurs de la droite dure. D’où la nécessité de se donner un nouveau chef nettement plus « vendable » en Ontario. Y compris auprès de l’électorat féminin.


Quant au français, bien des Québécois savent que leur langue, dans les autres provinces comme à Ottawa, est une coquetterie dont se prévalent de moins en moins les élites anglo-canadiennes. Cette tendance lourde n’est pas anodine.


Elle témoigne d’un deuxième principe de réalité : la marginalisation accélérée du Québec au sein de la fédération canadienne sur tous les plans — politique, linguistique et culturel. Or, cette marginalisation s’opère dans l’indifférence la plus absolue de nombreux Québécois. Cherchez l’erreur.




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