Souveraineté : Du conservatisme au libéralisme... au cul-de-sac
7 janvier 2019
M Éric F. Bouchard
Je pars d'une question que peux d'historien se pose et qui fonde ma démarche :Qu'est-ce qui fut nécessaire pour qu'apparaisse, se développe et existe encore une nation française en Amérique ?
Ma méthode est géopolitique (discipline qui fait de l'État l'objet premier de ses études). D'où la réponse : les assises d'un État.
« Nation : un peuple en possession d'un État » - Karl. Deutsch
« L’histoire mondiale ne retient que les Nations qui se sont constituées en États » - F.W. Hegel
« Le peuple, conçu comme communauté politique, n’a pas d’existence en dehors de l’État et de la Nation » - Jacques Sapir
Extraits du livre, Égalité ou indépendance, de Daniel Johnson, le dernier premier ministre qui avait une doctrine d'État. Sur la nation et l'État :
Il y a derrière cette différence d’interprétation du même mot une importante distinction philologique. Une nation peut se définir de deux façons suivant le degré d’évolution qu’elle a atteint. Elle peut être un phénomène sociologique avant d’être un phénomène politique et sa définition peut s’inspirer autant du contenu sociologique que de la réalité politique.
Il est à noter que l’élément fondamental de la nation n’est pas la race, mais bien la culture. Peu importe son nom, son origine ethnique, on est de l’une ou l’autre nation suivant que par son enracinement, sa formation, son choix, son style de vie, son mode de pensée et d’expression, on appartient, on s’identifie à l’une ou l’autre communauté culturelle. Je pense entre autres à tous les Néo-Canadiens qui ont joint, volontairement, par goût, par choix la culture canadienne-française et qui participent à son épanouissement et à son enrichissement.
Il arrivera cependant, et c’est là un aboutissement normal, que la communauté culturelle, une fois parvenue à une certaine étape de son développement, surtout si elle possède des droits historiques incontestables, cherche à s’identifier avec un État. Car pour s’épanouir dans le sens de son génie propre, cette communauté culturelle a besoin des cadres, des institutions, des leviers de commande que seul peut lui procurer un État dont elle ait la maîtrise.
Ainsi, la nation, phénomène sociologique, tend à coïncider avec l’État, phénomène politique. Dans la mesure où elle atteint à cette identification, elle devient la nation-État. C’est le fait de la plupart des nations parvenues au terme de leur évolution.
Mais la nation canadienne-française tend, de toutes ses forces, de toutes ses fibres, à se réaliser sur le plan de l’État et ses aspirations sont strictement normales et légitimes. Je démontrerai plus loin pourquoi et comment les Canadiens français cherchent à s’identifier à l’État du Québec, le seul où ils puissent prétendre être maîtres de leur destin et le seul qu’ils puissent utiliser à l’épanouissement complet de leur communauté, tandis que la nation canadienne-anglaise tend de son côté à faire d’Ottawa le centre de sa vie communautaire.
L'État est d'abord territorial. Et ce territoire inclu d'autres entités politiques qui ne s'identifient pas à la nation française que nous sommes. Ce constat pose un problème, à moins de renoncer à notre base territorial pour le résoudre, il faut donc préciser les liens statutaires entre nous et les premières nation et les anglophones ayant des droits historiques sur cette base territoriale.
La réponse à ce problème se trouve dans la Loi 99 (an 2000) qui précise les liens statutaires entre ces entités politiques. En fait, le principe de l'unité politique de l'État du Québec.
Jacques Parizeau en commission parlementaire : "le projet de loi n° 99 mérite un meilleur traitement que cela. C'est, à ma connaissance, la première fois que l'on codifie dans un document juridique les droits et prérogatives de l'État québécois. Jusqu'à récemment, ces droits et prérogatives étaient invariablement définis dans le cadre de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et reflétaient le partage des compétences entre le pouvoir central et les provinces. Pour la première fois, je pense, un texte législatif cherche à définir non pas les attributions des provinces, mais celles du Québec, non pas celles du Québec par rapport à celles du Canada, mais à celles du Québec lui-même. Certains des droits exprimés ont un sens absolu. Ainsi peut-on lire à l'article 2: «Seul le peuple québécois a le droit de choisir le régime politique et le statut juridique du Québec.»
La loi 99 (2000), la plus importante de notre histoire. Loi par laquelle le Québec se reconnaît comme un État de jure après 400 ans de peuplement et de mise en valeur du territoire.Il s'agit d'une étape fondamentale dans l'édification de l'État du Québec et qui pose les bases d'une constitution d'État : un État français en Amérique.
JCPomerleau