Le référendum comme ultime chance de s’affranchir
16 avril 2024
Bonjour M. Marineau,
Merci encore de votre réflexion; elle s’apparente beaucoup à ce que nous entendons un peu partout, et ce depuis des décennies, depuis la Révolution tranquille.
Je suis aussi un indépendantiste; je suis cependant plus indépendant qu’indépendantiste.
Je ne partage pas du tout voir foi en la loi 21; si nous étions indépendants, nous serions hors notre propre charte des droits et libertés par cette loi qui condamne à leur perte d’emploi celles et ceux qui portent des signes religieux ostentatoires : c’est là un non-sens envers notre charte, d’où l’utilisation inconsidérée de la clause dérogatoire. Danger!
La Laïcité est celle de l’État et non celle des personnes, c’est-à-dire que depuis 1975, les religions n’ont plus rien à voir ni à dire dans la gestion de l’État : séparation complète entre les gouvernements et les religions. Les personnes ont par la charte des droits fondamentaux et les libertés fondamentales, mais l’État, lui, dans sa conception même et son administration doit être laïc. Administré par des personnes de toutes les allégeances religieuses ou non : voilà le sens de la laïcité de l’État.
Il n’est pas besoin d’une loi avec des sanctions contre les personnes comme si nous administrions une loi de la circulation routière ou une loi contre le vol des biens d’autrui.
Évidemment, libre à vous de respecter ce point de vue, comme je respecte le vôtre, mais il est important d’en finir avec ce débat actuel qui ne nous mènera qu’à des vainqueurs et des vaincus, et alors, les vaincus auront tous les torts et je m’interroge sur ce qui arrivera après…
La Charte est justement un point d’ancrage duquel nous devrions élaborer nos lois : si nous en dérogeons, à quoi peut-elle bien servir? C’est d’ailleurs ce qui nous distingue du Canada où Dieu est le maître suprême, alors qu’au Québec, c’est nous tous qui devons être la mesure de toute chose. Si nous sommes incapables de mesurer la différence entre la laïcité de l’État et la laïcité individuelle des citoyens, des frictions importantes risquent de surgir. Et alors, comme dans d’autres pays tristes, c’est la paix qui risque d’être en jeu.
Là, l’importance d’une éducation sérieuse des adolescents à cette charte : si l’éducation fait défaut, tous les maux sont latents.
Quant au chef du parti québécois, j’ai entendu là un autre appel à la dernière chance; n’est-ce pas exagéré existentiellement parlant? C’est comme on me disait enfant : «Tu crois en Dieu ou tu iras en enfer»! Après ce dernier référendum, ce sera le déluge et la fin du Québec français! Je ne crois pas ça; il faudra continuer à travailler fort pour notre langue et notre culture différente de celle des États-Unis trop près de nous, avec ou sans notre indépendance politique, n’est-ce pas? Le nerf de la guerre en conception d’indépendance, ce sont les fonds, l’argent qui y est et qui y sera consacré. Être indépendant commande une richesse minimale. Là se joue notre vraie indépendance; comme toujours.
Il faut cesser de rêver en couleur : rêvons oui, mais éveillés, noir sur blanc.
François Champoux, Trois-Rivières