Si nous ne réalisons pas notre souveraineté, on nous l'imposera!
19 janvier 2011
J'éprouve toujours un certain malaise devant les propos de ceux qui, périodiquement mais avec ténacité, nous présentent l'indépendance comme une chose inévitable et, ici, comme une évolution qu'il nous faudra même accepter malgré nous. Si l'indépendance était si inéluctable, le Québec le serait depuis 1995, car jamais avant cette date, ni depuis d'ailleurs je le rappelle, les forces tournées vers ce changement radical de régime ne furent plus nombreuses et plus déterminées. J'ai le sentiment que nous vivons depuis une douce déprime post-référendaire qui s'étire dans le temps. La pression de la marmite est relâchée depuis belle lurette et les leaders du temps, voulant libérer les Québécois d'une angoisse référendaire inconfortable, ont décidé de «soulager le peuple» d'une vilaine lutte politique en passant à autre chose. L'optimisme est une belle qualité mais compte tenu du discours souverainiste prépondérant, il est clair, selon moi, que monsieur Nantel rame à contre-courant. Son optimisme est peut-être de bon aloi mais il s'inscrit en faux avec Pauline Marois et l'État-major du Parti Québécois pour qui l'indépendance est promesse de jours sombres et conséquemment, un objectif éloigné sur lequel on préfère ne pas élaborer. La pensée quasi magique de Monsieur Nantel est également en rupture avec la détermination historique et profondément ancrée du Canada britannique de maintenir le Québec dans le cadre canadien (non réformable et non négociable) et de compléter l'oeuvre d'assimilation entreprise de longue date et déjà fort avancée des Canadiens-français, désormais décimés et circonscrits, comme les Gaulois d'Astérix, au seul Québec. Le seul endroit encore où leur nombre constitue une nuisance.
Je voudrais bien vibrer aux lendemains qui chantent, mais dans les circonstances du réel, les propos jubilatoires ne valent que pour désarmer celui qui les écrit et ceux qui les lisent en les prenant pour argent comptant. Ce qui se déroule sous nos yeux c'est la continuité d'une assimilation planifiée, inscrite dans une volonté historique délibérée qui ne donne aucun signe de relâche. L'analyse politique de M. Nantel est certes une bonne pilule analgésique, mais il faudra plus que des dragées pour renverser le sens de l'histoire. Les Québécois qui veulent vivre pleinement et à la face du monde leur identité nationale devront lutter pour le faire et le Canada ne leur fera pas de quartier. Ne croyez pas à ceux qui vous invitent à une promenade sur le sentier fleuri de la libération où les intérêts du Canada coïncideront avec les nôtres. Cette pensée est profondément canadienne, profondément désarmante et, selon moi, se situe en totale rupture avec notre histoire pluri-centenaire d'âpre résistance. En tout cas, Monsieur Nantel n'est pas parvenu à me convaincre que le sens de l'histoire avait changé.
Gilles Verrier