Intégrité au petit change

Comment aborder le feu roulant de la confrontation des personnalités politiques au cours de cette même joute politique?

Chronique d'Élie Presseault

Après l’élection de 2008, nous assistons à la reprise de cette même joute électorale. Toujours, les deux mêmes grands partis établis que sont le PLQ et le PQ subsistent. Un troisième parti aspire au pouvoir : il s’agit de la CAQ, deuxième mouture de l’ADQ, fort pourvue de ses nombreux coqs qui laissent la cour des poules que nous serions de caqueter de plus belle. Qu’importe, des partis de fond de grille complètent le portrait de ceux-celles qui refusent de se laisser embrigader par la lutte électorale superficielle. Mentionnons au passage l’existence de Québec Solidaire, Option Nationale et du Parti Vert du Québec.
Au moment d’écrire l’essentiel de mes pensées du moment, j’ai écrit et réécrit plusieurs passages. Ce même texte est la troisième mouture de la version finale que je propose et qui est toujours en progression à mesure que je vous écris ces mêmes lignes. Comment aborder le feu roulant de la confrontation des personnalités politiques au cours de cette même joute politique? Tout d’abord, il convient de revenir sur les dossiers John James, Gilles Duceppe, Amir Khadir, Pierre Duchesne, Pauline Marois et Jacques Duchesneau, entre autres personnalités qui éclipsent l’importance des enjeux et édifient au rang de mythe l’incarnation de l’engagement dans l’arène politique. Reprenons du début.
Comment ne pas ressentir un malaise devant la défense du bilan du gouvernement au pouvoir? Toujours est-il que nous pouvons également ressentir un malaise de par la manière d’aborder l’enjeu de l’intégrité. Souvenons-nous, Maurice Duplessis fut consacré au moment de porter en faux l’enjeu névralgique de la corruption du gouvernement Taschereau. Je ne saurai porter l’odieux de porter aux nues la réélection du gouvernement sortant. Pas plus, nous ne pourrons cautionner dans nos livres d’histoire que le gouvernement John James aura défendu les causes fondamentales de justice sociale et relevant de la nation québécoise.
Plus tôt cette semaine, nous avons assisté à la sortie en règle de Gilles Duceppe qui s’est refusé d’une manière particulièrement véhémente et sèche de donner sa bénédiction au parcours politique d’Amir Khadir. Il s’en est même trouvé pour qualifier Gilles Duceppe comme nouveau suppôt de la droite québécoise. À la réflexion, il est important d’analyser la portée du geste politique de l’ancien chef du Bloc Québécois. Par son refus de condamner ce même geste, Pauline Marois s’est exposée de bien des manières. En outre, Jean-François Lisée peut bien paraître quelque peu fin finaud : à ne pas inviter au prochain party.
Venant de lire ces quelques lignes que je viens d’écrire au dernier paragraphe, je vous invite à ne pas prendre au pied-de-la-lettre ce que j’ai dit. Comment aborder le dossier Amir Khadir? Sa réélection ne sera pas des plus aisées si ce n’est de cette suspicion constante qui teinte les analyses des médias de masse qui couvrent la dimension du personnage. Amir est bien engagé dans une croisade à finir avec les petits personnages à la grandiloquence suspecte qui oeuvrent dans le milieu de la finance et des entreprises québécoises. Pensons à Quebecor, Henri-Paul Rousseau et Lucien Bouchard pour citer les exemples les plus manifestes du phénomène.
Comprenons-nous bien : l’organisation des débats électoraux semble échapper à toute étiquette et bienséance du respect des règles démocratiques les plus scrupuleuses. Quebecor déciderait du cadre à lequel il entrevoit la portée démocratique du geste qu’il s’apprête à commettre. Bienvenue aux «fabulous three and I don’t give a goddamn at the below». Amir, Françoise et Jean-Martin n’auraient pas droit de cité? Et François, lui? Dans cette même mesure, nous avons à exercer avec force discernement la sortie du tribun Gilles. Rendons à César ce qui est à César. Ceci étant dit, Amir Khadir a appuyé le NPD. Ce n’était pas nécessairement le geste le plus souverainiste qui soit. Toutefois, à bien des égards, Amir «Khadir» a compris le ton et la portée du personnage René Lévesque pour porter à sa suite le sens du destin du Québec.
Aussitôt que François Legault s’est constitué transfuge politique, Pauline Marois percevait de plus en plus la dimension d’un adversaire bel et bien réel. Dans cette même mesure, Jacques Duchesneau fut redouté comme ennemi politique. Champion de l’intégrité au sépulcre blanchi tous azimuts, l’ancien chef de police de Montréal réclame les pleins pouvoirs politiques pour faire le ménage dans les affres de la corruption. Il n’est pas sans rappeler la prestance et le port de Lucien Bouchard. Quoi qu’il en soit, le gouvernement John James n’a qu’à bien se tenir. Cela ne semble pas être une chose certaine comme le veut sa prétention à réclamer les faits sur le champ et dit avec le mauvais français qui le caractérise : «visière levée».
Tout autant le PQ et la CAQ prétendent au titre de champion de l’intégrité, l’issue de la lutte comporte sa part d’incertitudes. Néanmoins, Pierre Duchesne se révèle comme un candidat de grande qualité. Exigeant a fortiori des excuses de la part du PLQ à brûle-pourpoint sur les sujets de l’heure qui lui tombent sous le nez, l’ancien journaliste et auteur d’une biographie «non-autorisée» de Jacques Parizeau démontre le panache et le cran qui le caractérisent face à un gouvernement qui se révèle rustre de bien des manières. Est-ce qu’il forcera le gouvernement sortant à abdiquer? Parions qu’il ne sera pas étranger aux prochaines joutes parlementaires des plus épiques.
Essentiellement, l’aspiration de la CAQ au pouvoir semble tenir du patchage. Aligner Legault, Barrette, Duchesneau, Anglade et quelques autres anciens de l’ADQ et se dire que cela va suffire pour tenir les rênes du pouvoir, c’est prendre ses souhaits pour des chances. Jusqu’à preuve du contraire, le Parti Québécois a les effectifs en nombre et en qualité pour assurer une certaine fraîcheur dans un contexte électoral au point de vue des mortels de la chose politique. Le leadership de Pauline Marois et la force de son équipe saura-t-il convaincre les indécis-es de leur confier le pouvoir, notamment pour la résolution de la crise étudiante? Toutefois, il y a un certain nombre d’inconnues au sein de l’équation : Jean-Martin Aussant sera-t-il au débat des chefs, Françoise David saura-t-elle se faire élire et/ou Amir Khadir saura-t-il vaincre ou périra-t-il tout autant par l’épée dont il se sert pourtant avec grande adresse?


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