Le Lisée nouveau

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«Abandonner le terrain identitaire à la CAQ, qui ne demande pas mieux, serait une grave erreur»

À deux ans des prochaines élections, Jean-François Lisée a déjà décidé que les libéraux sont « en chute libre » et que son véritable adversaire sera François Legault.

« La démonstration de l’inaptitude du gouvernement est pas mal faite. Je ne pense pas qu’ils s’en remettent vraiment d’ici deux ans, compte tenu de l’équipe qu’ils ont, compte tenu du désert d’idées qu’ils ont et de la perte de militants qu’ils ont », a déclaré le nouveau chef péquiste dans une entrevue accordée à La Presse.

Il est vrai que le dernier sondage Léger–Le Devoir a enregistré une baisse des intentions de vote libérales de 4 points en un mois et que deux Québécois sur trois se disent insatisfaits du gouvernement Couillard, mais il semble nettement prématuré de vendre la peau de l’ours.

En revanche, il n’est sans doute pas trop tôt pour commencer à se refaire une image. Certes, M. Lisée a promis qu’un gouvernement péquiste ne tiendrait pas de référendum dans un premier mandat, mais il lui reste à démontrer que le grand intérêt qu’il a toujours porté aux multiples dimensions du « nous » peut s’étendre aux « vraies affaires ».

Le nouveau chef du PQ a donc annoncé que les enjeux identitaires seront relégués à l’arrière-plan au profit de l’économie, de la santé et de l’éducation. Dans son discours de victoire, il avait pourtant proposé à Alexandre Cloutier de se joindre à lui pour mettre sur pied les huit chantiers qui définiront concrètement « d’ici un an » de quoi sera fait un Québec souverain. Ces travaux ne recevront peut-être pas toute la publicité qu’imaginait M. Cloutier. Ils pourraient même prendre un certain retard.

On peut compter cependant sur les libéraux pour en faire un suivi attentif. Les conclusions de ces chantiers ne manqueront pas de leur fournir matière à débat. À la prochaine élection, ils ne laisseront certainement pas le PQ évacuer la souveraineté et faire porter la campagne uniquement sur le bilan du gouvernement.

M. Lisée a dit vouloir faire du 150e anniversaire de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique un vaste exercice pédagogique qui permettra de mettre en lumière les torts que le régime fédéral a causés au Québec, mais l’indépendance sera inévitablement mise dans la balance. Sans compter les travaux du nouvel Institut de recherche sur l’autodétermination des peuples et les indépendances nationales (IRAI) laissé en héritage par Pierre Karl Péladeau, qui contribueront à maintenir le sujet à l’ordre du jour.

En 2014, Pauline Marois n’avait pas osé promettre formellement un report du référendum. M. Lisée a réussi à convaincre les militants péquistes que c’était le prix de la victoire à la prochaine élection, mais ils ne toléreront sans doute pas que cela implique de mettre la promotion de la souveraineté en veilleuse.

M. Lisée a été un des plus brillants journalistes de sa génération, un conseiller politique astucieux, un essayiste inspiré et, en d’autres circonstances, il aurait sans doute étonné aux Relations internationales. Son expérience concrète des « vraies affaires » demeure toutefois limitée.

Celui qu’il identifie maintenant comme son principal adversaire peut se targuer d’avoir bâti une entreprise qui connaît un remarquable succès dans un secteur où la concurrence est particulièrement féroce, en plus d’avoir été successivement ministre de l’Industrie et du Commerce, de l’Éducation et de la Santé. Il a beau être « impulsif » et « excessif », il ne faut pas le sous-estimer.

Abandonner le terrain identitaire à la CAQ, qui ne demande pas mieux, serait une grave erreur. Le Mouvement Québec français a accueilli avec un rare enthousiasme le rapport de la députée d’Iberville, Claire Samson, intitulé « Une langue commune à tous pour tous », dont la publication est passée largement inaperçue la semaine dernière. « Cette sortie articulée de la CAQ aura des répercussions certaines sur les autres formations politiques puisqu’il sera difficile d’être meilleur sur ce sujet précis, soit la francisation de l’immigration », a déclaré le directeur général du MQF, Éric Bouchard.

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