La genèse de la cellule Chénier à l'été 1969 sera portée au grand écran

Actualité québécoise 2011


Des jeunes de la Maison du pêcheur, quelques jours après une manifestation qui avait dévoilé à la province entière ce lieu de rassemblement. Le maire de Percé avait demandé, en vain, des renforts policiers importants au gouvernement.
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Thierry Haroun et Gilles Gagné collaboration spéciale Le Soleil (Percé) - Le Groupe PVP et le cinéaste Alain Chartrand tourneront au printemps 2012 le film La Maison du pêcheur, un long métrage qui évoquera la rencontre entre les felquistes Bernard Lortie, Jacques et Paul Rose ainsi que Francis Simard à Percé à l'été 1969.


Les quatre hommes ont formé en 1970 la cellule Chénier du Front de libération du Québec (FLQ). Ils ont enlevé et tué le ministre Pierre Laporte à l'automne de la même année, lors de la Crise d'octobre.
Il s'agit du premier long métrage du Groupe PVP incorporant des éléments romancés. L'entreprise de Matane, autrefois appelée Productions Vic Pelletier, est surtout spécialisée dans le documentaire. Quand M. Pelletier a reçu le premier jet de scénario de Jacques Bérubé, il a vu qu'une autre vocation se pointait pour son entreprise.
«L'approche de Jacques Bérubé au début était surtout documentaire, une approche historique. Il voyait aussi des éléments de fiction. On a confié au scénariste Mario Bolduc la tâche de monter une courbe dramatique, mais ça respecte ce qui s'est passé», précise Vic Pelletier.
Pour respecter les exigences des bailleurs de fonds comme la SODEC et Téléfilm Canada, d'autres personnes chevronnées ont été recrutées, comme le producteur Jean-Roch Marcotte et le réalisateur Alain Chartrand, qui s'enthousiasme en évoquant le futur film.
«Il sera question de la rencontre entre Bernard Lortie, un jeune Gaspésien de 18 ans, et les frères Rose et Francis Simard qui s'étaient installés à la Maison du pêcheur dans le but d'éduquer et de conscientiser les jeunes de la Gaspésie à la politique. Ils y accueillaient tout le monde gratuitement et Bernard Lortie, qui s'en méfiait un peu au départ, a fini par s'y insérer et y faire son apprentissage politique. Le film racontera au fond comment on forme un militant», dit M. Chartrand.
«Vous comprendrez que ces indépendantistes, ces socialistes venus de Montréal étaient mal vus, par les commerçants en particulier qui prétendaient que les activités à la Maison du pêcheur nuisaient au commerce! L'opposition prendra donc forme et elle mobilisera les autorités municipales, les commerçants et la police provinciale», ajoute-t-il.
D'un point de vue historique, ce film est en quelque sorte «la genèse de la cellule Chénier. Il y a eu Les ordres de Michel Brault et Octobre de [Pierre] Falardeau sur les événements d'octobre 1970. Mais avant ça, on ne sait pas ce qui s'est passé vraiment, et c'est sur cette période que je me penche, soit de juin à août 1969 à Percé».
Le film devrait coûter 4 millions $ et comprendra 84 rôles. Il mobilisera environ 200 figurants. Luc Picard jouera un commerçant de Percé tandis que Raymond Bouchard campera le maire de Percé, Évelyne Brochu sera la blonde de Bernard Lortie, Guillaume Otis jouera Paul Rose, Réjean Thomas interprétera Jacques Rose et Jocelyn Bérubé jouera Ti-Loup, un vieux pêcheur immortalisé par une chanson de Claude Dubois. Kevin Parent sera un charpentier gaspésien.
«Écoutez, c'est une grosse fresque ce film, ce n'est pas une petite histoire de chambre à coucher parce qu'il faut recréer Percé de 1969», conclut Alain Chartrand... Le tournage s'échelonnera notamment sur 30 jours à Percé, en mai et en juin 2012.
Le financement est bouclé aux deux tiers, note Vic Pelletier.
Téléfilm Canada demande des changements. Au contenu? «Je ne pense pas. C'est plus sur l'évolution des personnages et les personnages eux-mêmes», dit-il.
Un mouvement planétaire
L'historien gaspésien Jean-Marie Thibeault qualifie l'étape de formation de la Maison du pêcheur et cette époque comme «un pan méconnu mais important de l'histoire du Québec».
L'émergence de la Maison du pêcheur comme lieu de rassemblement des jeunes s'inscrit dans un mouvement planétaire, dit-il.
«On parle de 1969, mais on pourrait en fait s'étendre à toute la fin des années 1960. Sur la planète, il y a de l'effervescence. Il y a eu la crise à Cuba, alors qu'aux États-Unis Martin Luther King prône l'émancipation des Noirs. Il y a eu les événements de 1968 en France et la Révolution culturelle en Chine. C'est la jeunesse dans l'ensemble de l'humanité qui s'éveille», précise M. Thibeault, qui est né dans l'arrondissement Saint-Georges-de-Malbaie de Percé.
«Cette jeunesse s'était trouvée une capitale internationale, Katmandou, au Népal. On cherche le paradis, le nirvana. La drogue semble un moyen de l'atteindre. Il y a d'autres capitales plus proches pour la jeunesse. Aux États-Unis, c'est San Francisco. Au Québec, c'est Percé. En 1969, j'avais 14 ans. J'étais trop jeune pour embarquer dans le mouvement, mais assez vieux pour comprendre. On voyait des jeunes sur des kilomètres faire du pouce aux deux extrémités de Percé», se souvient-il.
«Je me suis souvent demandé pourquoi Percé. C'est un site extraordinaire par sa beauté, et il appartient aux Québécois. Il était possible, à l'époque, de contester le capitalisme parce que les Américains y étaient omniprésents», croit l'historien.


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