Caisse de dépôt et placement -

L'amateurisme caractérisait la gestion du risque

Un rapport de PricewaterhouseCoopers juge sévèrement les anciennes pratiques de l'institution

CDPQ - une enquête publique sur les pertes de 40 milliards$


Au moment de l'éclatement de la crise du papier commercial, en 2007, la gestion du risque à la Caisse de dépôt et placement du Québec était «inefficace» et accusait un «retard par rapport aux pratiques du marché», indique un rapport de la firme comptable PricewaterhouseCoopers jusqu'ici tenu secret.
Le document daté de mai 2008, obtenu hier par la Presse canadienne, souligne que les instruments de placement se sont complexifiés «à un rythme tel que le groupe de gestion des risques de la Caisse ne [parvenait] pas à suivre».
Selon PricewaterhouseCoopers, l'implantation d'une bonne culture de gestion des risques a été «inhibée» par l'autonomie des équipes de placement et l'accent mis sur l'atteinte de résultats portefeuille par portefeuille.
De plus, le personnel du groupe de gestion des risques consacrait «un temps disproportionné» à résoudre les problèmes liés à la mauvaise qualité des données. Il disposait par conséquent d'un temps limité pour mesurer et analyser les risques. C'est sans compter que plusieurs membres du groupe de gestion des risques étaient surqualifiés pour ce travail, une situation qui conduisait à une forte rotation du personnel.
En fait, l'équipe de gestion des risques ne refusait qu'un «faible nombre d'opérations», ce qui découlait d'une «lacune» dans le processus d'examen interne, d'après PricewaterhouseCoopers.
Preuve tangible des faiblesses importantes qui existaient, il pouvait s'écouler jusqu'à sept semaines entre la mesure d'un risque et la communication de l'information s'y rattachant aux personnes concernées.
Pire encore, la mesure du «risque de marché» était fondée sur des hypothèses «non conformes aux pratiques du secteur financier». En outre, la portée des tests de tension, destinés à déceler les risques extrêmes, n'était pas aussi exhaustive que dans les autres grandes caisses de retraite.
Le député péquiste Jean-Martin Aussant a déploré que les recommandations du rapport n'aient pas été mises en oeuvre avant la crise financière de septembre 2008, qui a fortement ébranlé la Caisse de dépôt.
«Ils ont reçu le rapport avant la mi-année et les ajustements n'avaient pas été faits du tout en fin d'année», a-t-il noté au cours d'un entretien téléphonique.
«L'année 2008 a été catastrophique avec 40 milliards de pertes pour la Caisse, a-t-il ajouté. Je conviens tout à fait qu'il y a 30 milliards là-dessus qui étaient proportionnels aux pertes des marchés, mais la Caisse a toujours bien perdu 10 milliards de plus que tous ses comparables. C'est donc un rapport qui ne semble pas avoir été appliqué avec empressement.»
Les recommandations de PricewaterhouseCoopers devaient initialement être appliquées sur une période de trois ans, mais lorsque Michael Sabia est entré en fonctions comme président et chef de la direction de la Caisse, au printemps 2009, ce délai a été raccourci à 18 mois, a indiqué un porte-parole de l'institution, Maxime Chagnon.
Finalement, avec le concours de la firme McKinsey, dont les travaux ont coûté quelque 10 millions, la Caisse a pu mettre en place sa nouvelle politique de gestion des risques en neuf mois, a soutenu M. Chagnon.
«En tout, c'est 30 000 heures de travail qui ont été consacrées à ce dossier», a-t-il précisé au cours d'un entretien téléphonique.
Le porte-parole a expliqué qu'il y avait désormais quatre vice-présidents responsables de la gestion des risques dans les secteurs du revenu fixe, des marchés boursiers, des placements privés et de l'immobilier.
La Caisse doit toutefois trouver un remplaçant permanent à Susan Kudzman, qui a officiellement quitté en mai son poste de première vice-présidente et chef de la direction des risques après un long congé de maladie. Elle était en place depuis 2005, de sorte qu'elle a vécu le scandale du PCAA et la crise financière. L'intérim est assumé par Claude Bergeron, premier vice-président, Affaires juridiques et secrétariat.
Le rapport de PricewaterhouseCoopers vient d'être remis à une commission parlementaire de l'Assemblée nationale, qui en avait fait la demande en mai.
La Caisse a perdu plus de cinq milliards à cause de ses investissements massifs dans le papier commercial adossé à des actifs (PCAA), un titre obligataire à court terme qui a été happé par la crise hypothécaire américaine.


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