SELON L'ASSOCIATION NATIONALE

Soccer et hidjab font bon ménage

Voile islamique - étendard idéologique


Laura-Julie Perreault - Soccer et hidjab font bon ménage. C'est du moins ce que croit l'Association canadienne de soccer. Après qu'un arbitre eut exclu une jeune musulmane d'un match à Laval, l'organisation nationale désavoue le mot d'ordre lancé par la Fédération de soccer du Québec pour mettre hors jeu le voile islamique.

«À l'Association canadienne, nous suivons les règles de la Fédération internationale de football association (FIFA). Et elles ne disent pas qu'on ne peut pas porter le hidjab. Elles ne l'interdisent pas», a dit hier à La Presse la responsable des communications de l'Association canadienne de football, Sandra Campbell.
La position de l'organisation nationale, qui chapeaute toutes les associations de soccer provinciales, contredit une lettre qu'a envoyée le 26 janvier dernier la directrice générale de la Fédération québécoise à l'Association régionale de soccer de Laval. Dans cette missive, Brigitte Frot stipule qu'en vertu de ces mêmes règles de la FIFA, le «voile islamique ou tout autre objet religieux» ne sont pas autorisés sur les terrains de soccer.
L'association lavalloise a transmis cette information à ses arbitres, a expliqué hier à La Presse Jean-Philippe Mayrand, directeur exécutif de l'ARS Laval. Ce week-end, l'un d'entre eux a mis la directive en pratique lors d'un tournoi.
Problème de sécurité?
Prétextant que le foulard islamique représentait un danger à la sécurité des joueuses, l'arbitre, lui-même musulman, a expulsé Asmahan Mansour, une Ontarienne de 11 ans après que cette dernière eut refusé de retirer le foulard rouge qui lui recouvrait les cheveux. Son équipe a boycotté le tournoi lavalois et songe à poursuivre les organisateurs pour les frais entraînés par cette décision.
M. Mayrand ne comprend pas tout le tollé causé par l'expulsion de la jeune fille voilée. «L'arbitre a suivi une règle qui est là depuis longtemps. S'il juge que quelque chose est dangereux, il a le droit de l'interdire», précise-t-il. M. Mayrand croit que le hidjab représente notamment un danger d'étranglement pour les jeunes joueuses. Dans le même tournoi, deux autres arbitres ont fermé les yeux sur le foulard de la jeune musulmane. Ce n'est qu'au troisième match que le voile de la petite Mansour est devenu un enjeu. À la Fédération de soccer du Québec, Brigitte Frot souligne que l'arbitre a pris la bonne décision. «Il n'y a pas de considérations religieuses là-dedans. Le règlement ne permet ni bandeau, ni casquette et il ne permet pas le voile pour l'instant. Si la jeune fille ne veut pas respecter ces règles, elle n'est pas obligée de jouer au soccer», a affirmé Mme Frot au téléphone hier.
Contre l'exclusion
En réponse, l'Association canadienne de soccer affirme qu'elle voit les règlements de la FIFÀ d'un tout autre oeil. «Il y a des femmes qui portent le voile dans des matchs de soccer internationaux et c'est accepté. Il y a aussi des sikhs qui portent le turban», a rappelé la porte-parole de l'Association, tout en reconnaissant que l'arbitre a un pouvoir discrétionnaire.
«Une chose est certaine cependant. Nous voulons que tout le monde joue au football. Nous ne voulons exclure personne», a tranché Sandra Campbell.
Rebondissements politiques
Hier, le ballon de soccer a rebondi dans l'arène politique québécoise. Interrogé sur la décision de l'arbitre lavalois, le chef du Parti libéral, Jean Charest, a pris le parti de la Fédération québécoise. «Je vois ça comme étant l'application d'un règlement d'une fédération sportive qui veut, pour la pratique de son sport, faire en sorte que tous les joueurs puissent se comporter correctement», a-t-il dit.
Mario Dumont a abondé dans son sens. «C'est un dossier de sécurité dans les sports. N'importe qui, qui pratique un certain nombre de sports, ne peut pas se mettre n'importe quoi sur la tête ou dans le cou en termes de bijoux et autres. Il ne faudrait pas tout amalgamer», a dit le chef de l'Action démocratique.
Avocat spécialisé dans les droits de la personne et des minorités, Julius Grey croit que les arguments de la Fédération québécoise, repris par Jean Charest et de Mario Dumont ne tiendraient pas la route devant un tribunal. «Je pense que cette décision est illégale», a dit l'avocat qui a remporté maintes causes d'accommodements raisonnables devant les cours du pays.
«Le foulard n'a rien à voir avec la capacité de jouer au soccer. Ce n'est pas une question de danger, c'en est une d'inflexibilité de la part de ceux qui ont pris la décision», plaide M. Grey.


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