Le pétrole de l’Ouest permettrait aux raffineurs québécois de réduire leur empreinte carbone

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C'est l'histoire du doigt dans le tordeur...

En donnant son accord à l’inversion du flux de la canalisation 9B de la compagnie Enbridge, l’Office de l’énergie (ONE) ouvrirait les vannes de la plus importante raffinerie au Québec au « pétrole propre » de l’Ouest, fait valoir le président des activités canadiennes de Valero Energy-Ultramar, Ross R. Bayus.

Cherchant à voir l’Assemblée nationale appuyer un éventuel feu vert de l’organisme de réglementation fédéral au projet de pipeline Ouest-Est, M. Bayus a vanté mercredi les mérites écologiques du pétrole commandé par la raffinerie Jean-Gaulin à Enbridge. « Le produit est plus propre », a-t-il souligné devant la commission parlementaire chargée d’étudier « l’acceptabilité pour le Québec » du projet d’inversion du flux du pipeline d’Enbridge. Ayant « moins de soufre », « moins de contaminants », le pétrole de l’Alberta et de la Saskatchewan permettra à Valero Energy-Ultramar d’occuper une « meilleure position sur le bilan énergétique ».

M. Bayus souhaite troquer le pétrole d’outre-mer par un « produit » dont la « qualité en moyenne […] est supérieure au produit que nous sommes capables d’acheter aujourd’hui ». Détenant les deux tiers de la capacité de production du Québec, le complexe Jean-Gaulin, sis à Lévis, peut raffiner jusqu’à 265 000 barils par jour.

Le pétrole de l’Ouest a une empreinte carbonique de transport plus légère que celui importé à la fois par train et par bateau de l’Europe, de l’Afrique du Nord et de l’Asie, a ajouté le numéro 1 de la compagnie pétrolière au Canada, prenant le contre-pied de plusieurs groupes environnementaux.

Le patron de Valero Energy-Ultramar a « déboulonné » le « mythe », ou la « croyance »,« perpétué par certaines personnes », selon lequel le « pétrole sale » issu des sables bitumineux coulerait à flot au Québec si Enbridge concrétise son projet controversé, a jugé le député péquiste Scott McKay. « Ce qu’on semble plutôt constater, c’est que dans le fond, au Québec et dans le nord-est de l’Amérique, se concentrent maintenant les seules raffineries qui sont équipées pour traiter du brut léger », a ajouté l’ancien chef du Parti vert du Québec. D’ailleurs, la raffinerie Jean-Gaulin est grande championne au palmarès des plus faibles émissions de gaz à effet de serre par volume de pétrole, a mentionné au passage l’adjoint parlementaire au ministre du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs.

S’il prévoit de laisser en plan le pétrole issu des sables bitumineux et n’« acheter que du pétrole léger » de la zone pétrolière de Bakken en Alberta et en Saskatchewan, le représentant de Valero Energy-Ultramar a pris soin d’indiquer la « possibilité que quelqu’un puisse choisir de mettre une petite portion de pétrole lourd dans le pipeline d’Enbridge ». « Dans la province du Québec, il faut mettre de l’asphalte, il faut asphalter des rues de temps en temps », a lancé M. Bayus.

Des milliers de barils de pétrole lourd figurent déjà dans les carnets de commande de la raffinerie de Suncor à Montréal qui, contrairement à la raffinerie de Valero à Lévis, est en mesure de traiter ce type d’or noir.

Ross R. Bayus a également balayé les réticences affichées par certains qui craignent qu’Enbridge fasse courir dans le pipeline construit en 1975 un pétrole davantage corrosif. « Il n’y a pas plus de corrosion avec les produits qui viennent de l’Ouest canadien [par rapport] aux autres types de brut », a-t-il affirmé, disant se fier à des études scientifiques et à une riche expérience de 20 ans dans l’Ouest canadien. Malgré cela, « il y a toujours un risque » d’incident, a-t-il admis. « La chose importante, c’est que les transporteurs apprennent de leurs erreurs. »

Valero Energy-Ultramar, qui dispose depuis moins de deux ans de son propre pipeline « haut de gamme » entre Montréal et Québec, transportait auparavant du pétrole par train entre Québec et Montréal. « Il y avait quelques accidents qui arrivaient de temps en temps », s’est rappelé le député libéral Sam Hamad, qui était ministre des Ressources naturelles d’avril 2003 à février 2005.

Avantage concurrentiel

Au lendemain d’un approvisionnement en or noir nord-américain, Valero jouirait d’un avantage concurrentiel pendant « plusieurs années », anticipe le grand patron de Valero Energy-Ultramar au Canada. L’écart entre les prix WTI et le Brent « va demeurer en place ». « Éventuellement, dans un monde parfait, c’est vrai que les bruts trouveraient un certain équilibre à un moment donné. On [en] est très loin », a-t-il fait valoir lors de son passage à l’Assemblée nationale.« Pour les consommateurs du Québec, c’est important d’agir maintenant. » D’ailleurs, les automobilistes québécois verront-ils les prix à la pompe piquer du nez ? ont demandé coup sur coup les députés caquiste Donald Martel et solidaire Amir Khadir.

S’abritant derrière la Loi de la concurrence, M. Bayus a esquivé la question, se contentant d’insister sur les impacts positifs de l’arrivée de 300 000 barils de pétrole de l’Ouest à Montréal sur l’industrie pétrochimique québécoise. « Je pense que tout le monde convient que la marge de profit, ce sont les raffineries qui vont l’avoir », a dit M. Martel.

La commission parlementaire de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles poursuivra ses travaux vendredi, mais les groupes environnementaux, tenus à l’écart des audiences de l’ONE, se feront entendre seulement la semaine prochaine.


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