ANALYSE

Le marécage

La session fut une suite presque ininterrompue de controverses pour les libéraux

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Et le fond n'est toujours pas atteint !

Les semaines passent et se ressemblent. Dans la dernière ligne droite de la session parlementaire, le gouvernement Couillard continue de s’enfoncer dans des controverses qui donnent la part belle à l’opposition. Tellement que ce qui peut être considéré comme un des bons coups de l’année — l’amélioration de la cote de crédit du Québec — est passé inaperçu.
À travers l’opacité du ministère des Transports, on ne cesse, depuis quelques semaines, d’entrevoir des situations bizarres, inusitées. Un ex-ministre, Robert Poëti, qui se plaint de l’indifférence de son successeur, Jacques Daoust. Une enquêteuse, Annie Trudel, qui est payée par le ministère mais qui travaille au cabinet du ministre. Cette même enquêteuse qui, après avoir remis sa démission, se transforme en dénonciatrice, deux fois plutôt qu’une. Des documents rédigés par l’enquêteuse ou émanant du ministère, contenus dans une clé USB, dont l’UPAC empêche la divulgation, même aux parlementaires. Ces mêmes parlementaires — le pouvoir législatif — qui convoquent le pouvoir judiciaire, en l’occurrence le commissaire de l’UPAC, Robert Lafrenière, pour voir les documents qu’il ne faut pas voir.

Il semble que désormais, quand le MTQ veut rendre publics des documents lui appartenant, il doive demander l’autorisation au patron de l’UPAC. C’est ce que le nouveau sous-ministre, Denis Marsolais, a fait, mercredi, quand Jacques Daoust a voulu dévoiler des documents dans le but de démontrer qu’un suivi du ministère, transmis à la Commission de l’Administration publique (CAP), n’était pas falsifié.

Il y a 15 jours, la sous-ministre Dominique Savoie, celle qui n’a pas d’ordre à recevoir de son ministre, fut forcée de démissionner. Le même traitement fut réservé à Pierre Ouellet, le chef de cabinet du ministre des Transports. « Il est essentiel de conserver la confiance des citoyens envers les institutions », avait dit Philippe Couillard. On apprend que le premier ministre l’a replacé au cabinet du ministre de l’Emploi et de la Solidarité, François Blais. La famille libérale sait faire montre d’esprit de corps. Et il est vrai que la victime n’avait fait que suivre les directives de son ministre.

Mardi soir, Annie Trudel a fait parvenir à la présidente de la CAP, la députée péquiste Carole Poirier, une lettre dont le contenu l’a choquée, selon les dires de l’élue. Un document fourni par le ministère aux parlementaires, que la CAP a diffusé sur le site de l’Assemblée nationale, contient « certaines affirmations [qui] sont fausses », écrit l’ex-enquêteuse, qui ajoute qu’il est « fort probable qu’il y ait davantage d’irrégularités ».

Cette lettre a créé toute une commotion chez les parlementaires, qui s’étaient déjà indignés que le MTQ lui ait transmis des documents auxquels il manquait des pages ainsi que différentes versions qui ne concordaient pas. Ce nouvel affront a stimulé leur détermination à convoquer Robert Lafrenière en lui enjoignant d’apporter la fameuse clé USB.

Cet émoi s’est vite transmis à l’entourage du premier ministre. On s’arrachait les cheveux. La lettre ne précisait pas quelles affirmations étaient fausses. Impossible de répliquer à ce jugement ex cathedra. En fin d’après-midi mercredi, on s’est résigné à envoyer Jacques Daoust au front. « Que diable allais-je faire dans cette galère ? » semblait se demander le ministre. Il a rendu publics un document rédigé par Annie Trudel et un de ses courriels demandant au MTQ de corriger le document et d’ajouter des commentaires, les deux pièces étant datées de novembre 2015. Et des commentaires, le MTQ en a ajouté puisqu’on est passé d’un document de trois pages au document de 16 pages, daté de mai 2016, qui fut transmis à la CAP. Mais le ministre n’a pu confirmer qu’il n’y avait pas de faussetés dans le document du MTQ. « S’il y a des places où, elle, elle voit que c’est erroné […] il faut qu’elle le dise », a-t-il dit en exhortant Annie Trudel.


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