Le «courage» de Lisée

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La division des péquistes sur la question du leadership ravit les fédéralistes

L'entrée en scène de Pierre Karl Péladeau en a saoulé plusieurs. Jamais un homme d'affaires d'une telle envergure n'avait fait le saut en politique au Québec.
Pour le Parti québécois comme pour la souveraineté, c'était un symbole extraordinaire de succès.
Alors tout le monde a ravalé ses doutes. À gauche, on s'est rallié pour la cause. Le collègue Foglia a bien résumé l'esprit du moment: oui, il déteste l'homme de «tout son coeur de journaliste», mais c'est une sorte de dernière chance de la souveraineté. Vive PKP!
La FTQ a eu beau dire que Péladeau, avec ses lockouts brutaux à répétition, avait peut-être été «un des pires employeurs que le Québec ait connu», Françoise David a eu beau dire qu'elle ne s'assoirait jamais à ses côtés, les journalistes avaient beau soulever la question délicate de son contrôle du plus grand empire médiatique au Québec...
Tout ceci était balayé du revers de la main. On a vu l'aile gauche du PQ se rallier sans réserves, des personnalités politiques importantes signer une déclaration d'appui: c'était la fête au village péquiste.
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Malaise en plus: les commentateurs des médias de masse travaillent ou chez un concurrent, ou chez Québecor. Les questions ont tout de même été posées, évidentes, sur la propriété d'un empire de presse (notamment dans des médias de Québecor, et parfois très durement).
Jean-François Lisée, dans son blogue au mois de mars, reconnaissait la pertinence de ces interrogations, mais avait réglé le cas assez vite, en ce début de campagne électorale:
«Exiger de Pierre Karl Péladeau qu'il vende ses parts d'une entreprise fondée par son père nous semble excessif, d'autant plus qu'un tel scénario déboucherait sans doute sur la perte de contrôle, par le Québec, d'un fleuron de notre industrie culturelle et par le fait même, du siège social d'une entreprise à l'importance vitale.
«Tout en demeurant vigilants, nous invitons tout le monde à faire confiance aux institutions et, au lieu de s'attaquer à un homme ayant choisi l'engagement politique, saluons son geste!»
M. Péladeau, en effet, s'en est remis au commissaire à l'éthique, qui jusqu'ici juge la situation tout à fait correcte. Légalement, rien n'oblige M. Péladeau à se départir de ses actions de Québecor, où il a abandonné toute position de direction ou d'administration.
On a vu depuis quelques jours que Jean-François Lisée a haussé ses exigences...
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Voici l'automne venu, l'effet enivrant de PKP s'est estompé, la course au chef a commencé. Et les cigales déchantent. La gauche ultra du PQ s'inquiète ouvertement. Jean-François Lisée a retrouvé son esprit de contradiction journalistique.
La situation de PKP est «une bombe à retardement», dit-il. L'homme qui contrôle le premier média au Québec placerait le PQ «dans une situation de vulnérabilité incroyable».
«Ça marche pas, ça n'a pas de bon sens!»
Personnellement je suis bien d'accord. La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a manifesté la même inquiétude dès l'annonce de la candidature de M. Péladeau: «Le mélange entre une éventuelle haute fonction politique au gouvernement et la propriété de 40% de l'information au Québec est explosif.»
Je suis bien content, donc, du souci que manifeste tardivement le député Lisée.
Au PQ, où plusieurs ont déjà décidé que PKP sera le prochain chef, on mettra ce changement de cap sur le compte de la mesquinerie et de l'intrigue politique.
Je pense au contraire que l'appui du printemps en était un de façade, comme celui de Dominique Payette: on n'attaque pas le candidat-vedette de son parti en pleine campagne.
Certains ont déjà commencé à exprimer leur rage envers Lisée, qui serait devenu un allié objectif des libéraux. Peut-être que si Bernard Drainville se souvient des principes qui l'animaient naguère comme journaliste, il pourrait lui aussi poser quelques questions fondamentales au candidat Péladeau. Il a plutôt l'air du gars qui ménage ses arrières pour son après-défaite.
Il est tout de même extraordinaire qu'il faille du «courage» politique pour poser une très simple question démocratique: peut-on être chef de l'opposition, aspirer à être premier ministre et propriétaire du plus grand empire médiatique de la nation? Qu'y a-t-il d'audacieux à dire au candidat Péladeau: choisissez?
Lisée a beau ne pas être le plus populaire, on a beau le caricaturer en pédant, c'est un homme brillant jusqu'à l'agacement, peut-être le plus de tous les candidats connus, et assurément le plus redoutable dans un débat d'idées. Un débat: c'est ce que le parti souhaite, non?
Comme l'impression qu'il y aura une course, donc, et que ça ne se fera pas en ronronnant, maintenant que tout le monde reprend ses esprits...


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