ÉTAT DE DROIT

Décrochage latino-américain

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Une situation qui se dégrade rapidement



Grandeurs mais surtout misères de l’évolution démocratique de l’Amérique latine, du Mexique au Brésil, en passant par le Venezuela. Trois pays qui sont des acteurs centraux des dynamiques latino-américaines, mais qui donnent des signes inquiétants de décrochage de l’État de droit.





D'abord et surtout le Mexique, puisque son gouvernement n’est pas sans savoir que l’opinion internationale sympathise avec les Mexicains dans leur affrontement avec Donald Trump. Pendant que le Mexique dénonce à juste titre le mépris des droits de la personne que représente la nouvelle politique migratoire américaine, il se trouve pourtant que le gouvernement du président Enrique Peña Nieto procède, en catimini, à une réforme de son Code criminel que beaucoup voient comme un recul grave des laborieux efforts déployés depuis la fin des années 2000 pour faire progresser l’État de droit.


 

Le Mexique s’est lancé en 2008 en collaboration avec les États-Unis dans une grande opération de modernisation de son système de justice, un exercice largement considéré, souligne The New York Times dans une analyse publiée récemment à ce sujet, comme la plus importante avancée de son histoire en la matière. Le gouvernement présente maladroitement les modifications qu’il veut aujourd’hui lui apporter comme de simples « ajustements » ; experts et défenseurs des droits de la personne jugent au contraire qu’il est en train de défaire cette avancée capitale dans la mesure, disent-ils, où ces « ajustements » autoriseraient les autorités à détenir des suspects sans procès pendant des années, permettraient à la police de s’appuyer sur des ouï-dire et, potentiellement, aux procureurs d’utiliser en procès des « preuves » obtenues sous la torture. Au-delà, la loi soumise au Congrès mexicain remet en cause un progrès fondamental en proposant de supprimer le principe de présomption d’innocence. Ce qui, concrètement, ouvre la porte à tous les abus dans un pays où le recours à la torture par les forces de sécurité est « généralisé », disent les Nations unies.


 

Comment pareil recul se peut-il ? « Parce que c’est plus facile à faire que de former des policiers et des procureurs, que de nettoyer le système et que de mettre fin à l’usage de la torture comme principale méthode d’enquête », disait, encore au New York Times, un juge de l’État de Chihuahua.


 

Sa guerre contre le crime organisé et les cartels de drogue, combinée à la corruption qui gangrène depuis des décennies les institutions mexicaines, à commencer par la police, fait que le Mexique vit au chapitre de la promotion des droits de la personne une époque proprement dangereuse. Le drame est que, devant la crise sécuritaire que traverse le pays, le gouvernement ne semble plus aujourd’hui trouver la patience de poursuivre des réformes judiciaires dont il sait certainement qu’elles ne porteront leurs fruits que si les autorités y mettent le temps et l’effort — politiquement, budgétairement, culturellement. À défaut, l’horizon est celui d’un pays où la violence sociale, loin d’être déracinée, va se perpétuer en toute impunité.


 

Ensuite, il y a le Brésil, médiatisé par le gigantesque scandale de pots-de-vin impliquant la pétrolière Petrobras. Le fameux juge anticorruption Sergio Moro a condamné jeudi à 15 ans de prison pour corruption l’influent politicien Eduardo Cunha, acteur clé de la destitution de l’ex-présidente Dilma Rousseff. Bravo. Si la grande enquête « Lavage express » n’a pas dit son dernier mot, il reste que la classe politique brésilienne ne trouve rien de mieux à faire que de s’accrocher à ses privilèges, poussant l’arrogance jusqu’à tenter de se voter une loi d’amnistie pour effacer ses crimes de financement électoral illégal. C’est dire à quel point les politiciens sont capables, dans ce pays en crise économique profonde, de faire l’impasse sur les abus dont ils sont coupables.


 
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