À visage découvert, ou l’ordre canadien

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Le multiculturalisme canadien impose le niqab au Québec

C’est une véritable raclée qu’a infligée le juge Marc-André Blanchard de la Cour supérieure au Procureur général du Québec dans sa décision qui suspend l’application des dispositions sur le visage découvert de la loi sur la neutralité religieuse — la « loi 62 » — le temps que la cause soit entendue sur le fond.


Soulignons d’emblée qu’il est rare et tout à fait exceptionnel qu’un juge suspende ainsi l’application d’une loi, ou d’une partie d’une loi, dont on conteste la validité, une contestation dont les procédures en l’occurrence peuvent s’étendre sur plusieurs années. Le juge Blanchard se défend d’avoir tranché sur le fond, mais c’est tout comme.


Comme s’il s’agissait de tourner le fer dans la plaie, le jugement de dix-sept pages est rédigé en anglais, puisque les deux organisations torontoises qui ont financé la requête de la musulmane Marie-Michelle Lacoste et qui, comme elle, sont plaignantes l’ont exigé. La Commission canadienne des droits de la personne, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et la Fédération des femmes du Québec sont intervenues pour les appuyer.


L’article 10 de la loi édicte que tout employé de l’État doit fournir un service public à visage découvert et que toute personne doit recevoir ce service à visage découvert. Le juge ne s’est pas exprimé sur le sort des employés de l’État, seulement sur celui d’un petit nombre des femmes musulmanes qui portent le niqab ou la burqa au Québec et qui sont directement visées, fait-il observer, par l’interdiction.


Déjà, en décembre dernier, le juge Babak Barin avait suspendu l’application de la même disposition sous le prétexte que les lignes directrices sur les accommodements religieux n’avaient pas été rendues publiques. La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, les a depuis dévoilées, et la loi devait entrer en vigueur intégralement le 1er juillet.


Philippe Couillard a déjà affirmé que le projet de loi 62 ne traitait aucunement des signes religieux parce que l’interdiction ne visait que des fins d’identification, de sécurité ou de communication. Manifestement, le juge Blanchard n’a pas cru à cette mystification. Il confirme que le gouvernement a eu tort d’utiliser un stratagème hypocrite pour faire indirectement ce qu’il ne pouvait pas faire directement.


> La suite sur Le Devoir.



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